Avec quatre des sept signataires des accords de Genève dans l’administration Tshisekedi (Matungulu étant déjà désigné par Tshisekedi comme fonctionnaire international à la BAD), Lamuka original qui s’était opposé au 3eme mandant de Joseph Kabila et signé des accords à Genève, semble renaître de ses cendres malgré la position pas très tranchée de Moïse Katumbi.
En intégrant Jean-Pierre Bemba et Vital Kamerhe, deux poids lourds de la politique congolaise dans le gouvernement Sama Lukonde 2, l’option du Président Félix Antoine Tshisekedi semble être l’éradication au plus vite des velléités expansionnistes de Paul Kagame et des pillages des richesses naturelles de la Rdc via le M23/RDF. Ce qui semble justifier l’intégration dans le gouvernement Sama Lukonde 2 de ceux qui semblent le connaître le mieux, le maître des mille Collines, parrain des nombreux groupes armés qui opèrent dans la zone sous état de siège.
En outre, la tenue des élections devenant de plus à plus hypothétiques ‘dans le délai constitutionnelle’ suite effectivement à l’agression rwando-ougandaise, la présence de Jean-Pierre Bemba et Vital Kamerhe aux affaires réduira sensiblement la pression pour l’appel aux élections ‘dans le délai constitutionnel’ de l’opposition (principalement de l’Ecidé de Martin Fayulu et de l’Envol d’Adolphe Muzitu ou de Ensemble de Moise Katumbi) qui, d’ailleurs, n’est plus que l’ombre d’elle-même.
De l’autre côté, des voix s’élèvent, dont celle de l’unique femme candidate à l’élection présidentielle de 2018 Marie Josée Ifoku, qui en appelle à ‘une coalition pour une transition menant à la 4e République.
Tout semble donc faire se dessiner le schéma de Lamuka original de passer par une transition de 2 ans, conduite par la coalition anti-Kabila jadis au pouvoir.
Ainsi, sur les 7 négociateurs des accords de Genève, qui avaient juré de ” ne jamais trahir le Congo”, c’est l’UDPS Tshisekedi, le MLC Bemba , l’UNC Kamerhe et Katumbi de la plateforme Ensemble pour la République qui avaient des bases électorales réellement établies (contrairement à Muzitu et Matungulu qui étaient en ballotage au sein du PALU et l’Ecidé Fayulu pas très populaire avant sa désignation comme candidat unique de l’opposition) et pouvaient rivaliser en armes quasi égales contre le dauphin de Joseph Kabila Kabange, Emmanuel Ramazani Shadari.
En se retrouvant tous (exception faite de Katumbi un peu tergiversant) dans le Gouvernement Sama Lukonde 2, Tshisekedi est désormais seul maître à bord comme JKK à l’époque de 1+4.
Des nominations stratégiques
Par la configuration de la nouvelle équipe gouvernementale, le Chef de l’Etat vient d’envoyer un message fort quant à ce qui concerne sa stratégie dans la guerre de l’Est du pays. En intégrant JP Bemba comme ministre de la Défense, Vital Kamerhe à l’Economie nationale, Antipas Mbusa Nyamwisi à l’intégration nationale et en maintenant Patrick Muyaya à la Communication, le Commandant suprême met en place ‘des généraux’ pour commander la guerre sur quatre fronts.
Il sied de rappeler que la guerre qui décime l’Est de la Rdc depuis bientôt trois décennies se passe principalement sur quatre fronts : Front militaire, front diplomatique, front économique et front médiatique dans la guerre de communication.
Ayant été un des belligérants qui ont négocié le “1+4” qui a sauvé la Rdc de la balkanisation avec la complicité du tutsi power, Jean-Pierre Bemba maîtrise mieux les contours de l’agression ‘rwando-ougandaise’ étant ancien allié de Museveni (comme d’ailleurs Kagame), dans cette partie du pays actuellement en état de siège. Jean-Pierre Bemba est l’un des acteurs politiques les mieux outillés pour administrer le portefeuille de la Défense nationale en ce moment où le M23/RDF bat de l’aile pour l’assommer définitivement. Il ne faut pas oublier que lors de la campagne électorale de 2018, le chairman du Mouvement de Libération du Congo (MLC), avait affirmé être capable de mettre fin à cette guerre dans les 6 mois une fois élu Président de la République.
Il faut noter également que la guerre dans l’Est est d’abord économique. Avec son expérience de Président honoraire de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, dont le fief électoral fait partie de cette zone en proie aux pillages des richesses minières, est acteur économique dans la région, il est à même de donner des coups ciblés pour protéger les richesses du pays contre les pillards qui s’adonne aux razzias dans son grand Kivu natal. Et suite aux antécédents du procès très médiatisé dit des ‘100 jours’, ‘le pacificateur jusqu’au bout’ est tenu non seulement de laver son image en prouvant qu’il est bon gestionnaire et aussi en démontrant sur terrain ses prouesses de ‘pacificateur’. En outre, Vital Kamerhe est l’un des acteurs principaux dans les accords de Nairobi qui donna naissance au CACH après l’éclatement de ‘Lamuka’ en Genève. Il est donc tout indiqué pour lui, d’être le Commandant des opérations dans la guerre économique qu’imposent au pays les voisins orientaux de la RDC.
Quant à la culture des agresseurs de la RDC sous masque de M23, le tutsi power sous le leadership de Kagame et Museveni, qui puisent leurs stratégies de combat dans l’infiltration et la diplomatie asymétrique basées sur l’ésotérisme ‘ubwenge’, l’art du mensonge et de la duperie, très prisé dans la région est africains, le natif de Beni-Butembo dans la région et important acteur politique dans les Grands-lacs africains, Mbusa Nyamwisi est tout indiqué pour mener à bien les négociations avec ses ubwengistes de la région dans la diplomatie pour l’intégration régionale dans cette partie du continent. Le peuple Nande, dont il fait partie, se bat majoritairement contre les agresseurs non seulement pour l’intégrité territoriale nationale, mais également pour protéger la terre de leurs ancêtres.
Le quatrième front dans cette guerre étant médiatique, la stratégie de la Communication actuellement installée par Muyaya a donné des résultats très encourageants. Le monde entier est largement aux parfums non seulement des atrocités dans l’Est de la Rdc, mais surtout de qui en sont les acteurs. Tout cela grâce à la politique de communication gouvernementale mise en place par Patrick Muyaya. Comme on ne change pas l’équipe qui gagne, Félix Tshisekedi ne pouvait que le maintenir en son poste ce ‘général des FARDC’ dans la guerre médiatique.
Les nominations de Jean-Pierre Bemba, Vital Kamerhe, Mbusa Nyamwisi et Patrick Muyaya dans ces quatre ministères sont un message fort du Chef de l’Etat Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, démontrant sa ferme volonté d’en finir avec la guerre dans l’Est de la RDC.
Willy Makumi Motosia