Deux universitaires, la théologienne Catherine Clifford et le politologue Sami Aoun, la religieuse Chantal Desmarais et l’administratrice scolaire Linda Staudt du Canada font partie de la délégation de dix personnes qui représentent l’Amérique du Nord au Synode des évêques à Rome (4-29 octobre 2023), indique le site Présence.Information religieuse
Tous et toutes ont été sélectionnés « principalement en raison de leur participation à divers titres au processus synodal », a précisé le cardinal Mario Grech, secrétaire général du Synode, lors de la présentation de la liste des participants à la presse. 70 personnes au total, ces délégués non-évêques auront droit de vote lors du Synode sur la synodalité.
La théologienne Catherine Clifford
La professeure de l’Université Saint-Paul et spécialiste du Concile Vatican II, elle a codirigé une œuvre sur le concile, The Oxford Handbook on Vatican II (Oxford University Press, 2023).
Depuis deux années, Catherine Clifford a lu un grand nombre des rapports que les diocèses canadiens ont préparés en vue du Synode.
Partout, estime-t-elle, on souhaite des changements et partout on signale que les laïcs sont prêts à y prendre des engagements, à la condition qu’on leur reconnaisse « l’égale dignité de tous les baptisés ».
À ce propos, la professeure rappelle un élément central d’un document conciliaire, la constitution dogmatique Lumen gentium (1964) où il est dit qu’il « n’existe donc pas d’inégalité dans le Christ et dans l’Église en raison de la race ou de la nation, de la condition sociale ou du sexe ».
Catherine Clifford explique que l’Instrumentum laboris, élaboré par le secrétariat général du Synode, soumet aux participants quinze questions importantes sur les trois thèmes de la rencontre, soit la mission, la participation et la communion : « Bien sûr, on ne pourra pas résoudre, en quelque quatre semaines, toutes ces grandes questions, note-t-elle. Mais l’essentiel c’est de nommer comment on pourra avancer ensemble et comment on pourra faire face à toutes ces questions ensemble. »
« Que nous soyons présents au Synode comme représentants non épiscopaux », c’est déjà un signe que l’assemblée «va étudier toutes ces questions autrement », précise-t-elle.
« La synodalité, affirme la professeure, c’est le fruit de 60 ans de dialogue entre les Églises chrétiennes. » Ces années, estime-t-elle, ont montré « les limites de nos structures et pratiques dans la gouvernance de l’Église ». « Nous avons à réformer nos structures et nos pratiques si on entend prendre au sérieux la dignité de tous les baptisés », conclut Catherine Clifford.
Le politologue Sami Aoun
« Je me sens béni, privilégié et même un peu craintif », reconnaît Sami Aoun, professeur émérite de l’École de politique appliquée (Université de Sherbrooke) et directeur de l’Observatoire sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (OMAN). Libanais d’origine, il est récipiendaire de la Croix de Saint-Maron (la plus haute distinction de l’Église maronite). « Je sens tout le poids de cette nomination. Est-ce que je serai à la hauteur de leurs attentes ? », se demande-t-il en pensant aux trois éparchies des Églises orientales qui ont proposé son nom aux responsables du Synode. Ce sont l’éparchie pour les Grecs-melkites catholiques, l’éparchie pour les maronites catholiques et l’exarchat apostolique pour les fidèles syro-catholiques.
Lors du Synode, Sami Aoun souhaite « mettre en relief les particularismes des chrétiens orientaux » dans la société canadienne et expliquer leur « expérience singulière au sein du Québec où ils vivent une dynamique autre que celle que l’on observe au Proche-Orient ».
« La foi se vit ici selon des paramètres qui diffèrent certainement de ce que connaissent les catholiques orientaux dans leurs foyers d’origine », précise-t-il.
Au Synode, Sami Aoun va « chercher des convergences le plus possible ». « Bien sûr, j’ai des convictions », dit-il. « J’estime que la foi chrétienne peut être bien vécue au sein de la modernité, et non pas contre la modernité. » Il ajoute que selon lui « l’Église ne devrait pas être à contre-courant ». Elle ne devrait pas non plus « être emportée par le courant ».
La religieuse Chantal Desmarais
Membre de la communauté des Sœurs de la charité de Sainte-Marie, Chantal Desmarais a déjà fait partie de la délégation du Canada présente à l’ouverture du Synode, en 2021. Aujourd’hui, elle est responsable de communautés chrétiennes dans le diocèse de Joliette, au Québec.
« On reproche souvent à l’Église de ne pas être à l’écoute », dit Sœur Chantal. Mais dans la préparation à ce Synode, estime-t-elle, l’Église a « été à l’écoute ». « C’est un grand pas », admet la Sœur. « Maintenant, on va voir où cette écoute va nous emmener. »
Soulignant qu’elle ne va pas au Synode pour lancer des débats ou pour « agiter un drapeau », Sœur Chantal dit : « Je ne vais pas me battre pour ceci ou cela. Non, je veux être à l’écoute de l’Esprit-Saint. »
En même temps, elle est persuadée que « l’Église doit changer et ne peut plus continuer d’agir comme elle le fait présentement ». « Bien sûr qu’on va changer », affirme-t-elle.
Ses propos lors du Synode seront toujours ancrés, ajoute-t-elle, dans « l’amour et la vérité », des mots qu’elle emprunte au Psaume 84.
L’administratrice scolaire Linda Staudt
Il y a quelques années, lorsqu’elle a pris sa retraite du milieu scolaire, Linda Staudt avait indiqué à Mgr Ronald Peter Fabbro (évêque du diocèse de London en Ontario), qu’elle aurait du temps à consacrer à son diocèse. L’évêque lui demande alors de co-diriger la phase diocésaine du Synode puis de voir à la rédaction du rapport final qui sera acheminé à Rome.
Ce document est intitulé Ensemble sur la route, conversations pour une Église à l’écoute dans le diocèse de London. Paru le 18 juin 2022, le texte affirme que les catholiques consultés « rêvent d’une Église mieux adaptée au monde contemporain ».
Ils espèrent « une Église inclusive qui pardonne, accepte, se repent, est ouverte au changement, qui est dynamique, va de l’avant, soutient le bien-être des gens, est accueillante, compréhensive, transparente, réactive en temps de crise ».
En lisant les rapports reçus des autres diocèses catholiques de l’Ontario, Linda Staudt dit qu’elle a reconnu bien des similarités avec le document qu’elle a corédigé pour son diocèse.
À Rome, la déléguée entend rappeler aux participants que les catholiques veulent être « coresponsables dans les ministères ». « Non, ils ne veulent pas prendre le contrôle, dit-elle, mais ils ne veulent plus être mis de côté. Ils veulent être engagés dans la prise de décisions. »
Elle note que « beaucoup de laïcs consultés ont dit qu’ils ne savent pas comment s’y prendre » pour atteindre la coresponsabilité en Église. D’autres estiment « que leur apport n’est tout simplement pas le bienvenu ».
La seconde conviction que Linda Staudt entend partager que les catholiques souhaitent « une Église davantage
accueillante et inclusive ».