Le Directeur exécutif du Réseau des Enfant et VIH en Afrique (EVA) a reconnu les avancées réalisées ces dernières années dans la lutte contre le VIH pédiatrique tel qu’indiqué dans le Rapport du Programme commun des Nations unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA), même si les adolescents constituent malheureusement des foyers des nouvelles infections.
D’après ce médecin qui s’exprimait lors du lancement de ce Rapport de l’ONUSIDA, intitulé : « L’urgence du moment : Le SIDA à la croisée des chemins », le 23 juillet dernier à Dakar au Sénégal, on peut dire que le VIH pédiatrique est l’enfant pauvre, mais il faut reconnaitre que ces dernières années, il y a beaucoup d’efforts qui ont été fournis.
« (…) il y a beaucoup d’efforts qui ont été fournis avec des perspectives encourageantes, ces dernières années les lumières sont mises sur le VIH pédiatrique. J’en veux pour preuve la mise en place de l’Alliance globale pour l’élimination du VIH pédiatrique même si elle n’intègre pas tous les pays de la région, on a quand même quatre grands pays qui ont les prévalences les plus élevées qui sont membres de cette alliance », s’est réjoui le Directeur exécutif du Réseau EVA, le docteur Gères AHOGNON.
Parmi ces quatre grands pays, il y a le Nigeria, la République démocratique du Congo, la Côte d’Ivoire et le Cameroun, tous membres de l’Alliance globale pour l’élimination du VIH pédiatrique.
En plus de l’Alliance globale pour l’élimination du VIH pédiatrique, soulignons qu’au niveau régional, un groupe de travail technique a été mis en place et se penche spécifiquement sur les questions du VIH pédiatrique.
Un autre progrès de taille, est qu’au niveau thérapeutique, il y a eu ces dernières années une nouvelle donne : « La formulation pédiatrique optimisée ». Autant d’avancées qui couronnent aujourd’hui le succès rencontré dans la lutte contre cette maladie chez les enfants.
« Le VIH pédiatrique est réellement au cœur des actions. En termes de chiffres, quand vous prenez le dépistage-la connaissance du statut sérologique, globalement nous sommes au tour de 40% comparé aux années où nous étions toujours autour de 36…. Il y a des efforts qui sont faits et on peut s’en réjouir même s’il reste encore beaucoup à faire », a fait savoir le Directeur exécutif du Réseau EVA.
Encore des défis liés au VIH pédiatrique
A côté des avancées, le Réseau Eva, cette structure de la société civile, fait cependant remarquer qu’il y a encore d’énormes défis à relever dans la lutte contre le VIH pédiatrique. Selon le Dr Gérès AHOGNON, le principal défi ici, c’est celui lié au renforcement du pouvoir économique des familles.
« Beaucoup de choses se jouent sur ce plan, et ça ne dépend pas que de nos Etats, parce qu’un enfant sous traitement doit être bien nourri pour avoir des chances de succès thérapeutiques. Le traitement n’est pas que médical. En deuxième lieu, pouvoir mettre en place des stratégies différenciées, démédicalisées pour rechercher les femmes enceintes séropositives pour pouvoir les mettre sous traitement. Le traitement est efficace mais pour traiter, il faut bien pouvoir trouver ces enfants. Trouvez et les mettre sous traitement. Autre défis, le VIH est une maladie chronique. Ça veut dire, je commence à prendre aujourd’hui et je prends à vie. Donc, la personne qui est mise sous traitement il faut pouvoir la maintenir pour une bonne observance afin d’atteindre les objectifs thérapeutiques (…) », a-t-il indiqué, soulignant que le traitement répond convenablement cependant, il faut une vie de qualité qui prend en compte l’environnement, l’accompagnement psycho-social et tout le reste qui va concourir.
Le vaccin, encore du chemin
Il y a encore du chemin à parcourir pour arriver au vaccin contre cette pandémie. Des recherches sont en court et il faudra de la patience pour voir le bout du tunnel. Cependant, des essais cliniques sont en train d’être faits et s’avèrent prometteurs.
« Des essais sont en train d’être faits sur ce plan, mais il y a aussi des avancées thérapeutiques. Il s’agit des formulations pédiatriques optimisées, et nous au sein du Réseau EVA, nous sommes en train de travailler sur l’acceptabilité et la faisabilité des traitements à longue durée d’action chez les adolescents. Ce sont des traitements, par voie injectable à prendre à intervalle de 2 voir 6 mois. Et là, nous espérons que cela réduira les problèmes d’inobservance: qui a pris ou qui n’a pas pris… Ce sont des choses qui ne sont pas spontanées. Il faut du temps pour faire la recherche. La recherche prend du temps. Donc, actuellement, nous menons un projet sur l’acceptabilité des traitements à longue durée surtout chez les adolescents, parce que chez un enfant, vous pouvez facilement lui donner mais chez un adolescent, vous n’avez aucun contrôle pour savoir s’il a pris. Les long- acting sont déjà utilisés chez les grandes personnes dans certains pays. L’idée, c’est de voir quels sont les différents paramètres à maitriser avant de passer à l’échelle, par exemple il y a toutes les questions de la chaine de froid qu’il faut », a fait savoir le Dr. Gères AHOGNON. C’était avant de préciser que l’étude qui est en train d’être menée concerne l’analyse de tous ces facteurs pour voir si chez les adolescents ça peut passer. Cette étude est menée en Afrique de l’Ouest et du Centre avec certains pays dont le Benin. Elle pourra révéler si ce traitement peut passer chez les adolescents ou pas avec tout ce qu’il y a comme mesures thérapeutiques ou mesures techniques à prendre.
Les adolescents, le focus actuellement du réseau EVA
Selon Directeur exécutif du Réseau Enfants et VIH en Afrique (Eva), actuellement sa structure se concentre sur la problématique des adolescents. Et c’est avec raison, car d’après le dernier rapport de l’ONUSIDA, les nouvelles infections à VIH sont concentrées entre 15 et 24 ans.
« Le chantier actuellement pour nous, le gros focus, c’est sur la question des adolescents. Une étude récente sur le Burkina Faso et le Sénégal, nous a montré que la plupart des adolescents vivants avec le VIH ont des rapports sexuels non protégés. Sur 100 adolescents, à peine 4 utilisent le préservatif pour avoir des rapports sexuels. Sur 100 adolescents, plus de 36% ont des pratiques sexuelles avec de multiples partenaires. Donc, ce sont des chiffres qui interpellent. Et sur 100 adolescents, à peine 10 sont prêts à dévoiler leur statut sérologique à leur partenaire par faute d’être discriminé ou rejeté. Pour nous aujourd’hui, c’est une bombe à retardement. Parce qu’une adolescente qui ne se protège pas, même quand aujourd’hui elle prend correctement son traitement et qu’elle est indétectable, elle ne va infecter pas mais elle ne fait pas la charge virale chaque jour pour savoir si elle est indétectable ou pas. Une seule adolescente si elle a des pratiques multisexuelles, regarder le nombre des personnes qu’elle peut infecter et le nombre des personnes infectées qui peuvent retransmettre. Donc, pour nous aujourd’hui, c’est focus adolescents. La plupart de nos projets aujourd’hui, c’est au tour de la question des adolescents, parce que pour nous c’est là le domaine inexploré, inexploité qui va influencer l’avenir de la lutte contre le VIH », a-t-il conclu.
Prince Yassa depuis Dakar.