A l’Onu, Félix Tshisekedi réduit le retrait de la Monusco à l’expression ” Transition post-MONUSCO”. Plus de date du départ !_”

Mercredi 25 septembre 2024. Du haut de la tribune des Nations Unies, Félix Tshisekedi délivre le message de son pays. L’opinion avertie l’attend sur le retrait de la Mission onusienne réclamé avec force une année plus tôt. Il y consacre ce bout de phrase : _”En assurant une transition post-MONUSCO, nous priorisons également le rapatriement des combattants étrangers_”. C’est tout. Car, dans son discours d’une douzaine de pages, aucun autre passage ne fait allusion à la Mission onusienne en RDC…

Le régime UDPS/USN était catégorique

Ainsi, on est loin de la tonalité conquérante du discours du 23 septembre 2023. En témoigne, ce triple paragraphe :

1._«Nous sommes reconnaissants envers la communauté internationale et les Nations Unies pour leur soutien et leur partenariat, mais nous sommes également conscients que le retrait progressif de la MONUSCO est une étape nécessaire pour consolider les progrès que nous avons déjà réalisés_”.

2._«Aussi, le projet de retrait échelonné, responsable et durable de la MONUSCO, annoncé depuis 2018 et dont le plan de transition a été adopté en 2021, devient-il anachronique au regard de l’évolution des contingences politiques, sécuritaires et sociales actuelles ! Il est donc illusoire et contreproductif de continuer à s’accrocher au maintien de la MONUSCO pour restaurer la paix en République Démocratique du Congo et stabiliser celle-ci_”.

3._”Par ailleurs, l’accélération du retrait de la MONUSCO devient une nécessité impérieuse pour apaiser les tensions entre cette dernière et nos concitoyens. Il est temps pour mon pays d’explorer de nouveaux mécanismes de collaboration stratégique avec les Nations Unies, davantage en phase avec nos réalités actuelles. C’est pourquoi, en ma qualité de garant constitutionnel de l’intégrité territoriale, de la souveraineté et de l’indépendance de mon pays, de la bonne tenue de notre Nation ainsi que du bien-être de mes concitoyens, j’ai instruit le Gouvernement de la République d’entamer des discussions avec les autorités onusiennes pour un retrait accéléré de la MONUSCO de la République Démocratique du Congo en ramenant le début de ce retrait progressif de décembre 2024 à décembre 2023_”

Bref, le régime Udps/Usn était, pardon semblait catégorique à l’époque pour l’échéance du 31 décembre 2024.

Presqu’un matériel de guerre

Que s’est-il passé sur le terrain pour vivre la rétractation une année après ? Il se passe que la situation sécuritaire reste volatile dans les deux provinces particulièrement concernées par l’état de siège : le Nord-Kivu et l’Ituri.

A propos justement de l’état de siège instauré le 3 mai 2021 (cinq ans déjà), son application pose problème. A preuve, la 82 ème prorogation de l’état de siège a été adoptée à l’Assemblée nationale le 19 septembre 2024 sans la participation de plusieurs députés de l’Ituri, du Nord Kivu et du Sud Kivu qui en appellent à un débat parlementaire de fond.

Sur le terrain, les faits vrais sont de trois ordres :

1.Les affrontements se poursuivent. Ils impliquent forces gouvernementales congolaises (Fardc), ougandaises (Updf), burundaises (Fdnb) et rwandaises (Rdf), troupes de la Monusco et de la Sadc, groupes armés congolais et étrangers. Les uns font la guerre aux autres et, parfois, les “alliés” se tirent dessus par inadvertance.

2.Les déplacements de la population se poursuivent, créant une situation humanitaire prise en charge plus par les partenaires bilatéraux et multilatéraux que par le Gouvernement de la République. L’Odep a révélé dernièrement le montant de la prise en charge par le Gouvernement par an et par individu : 150 FC, soit 12,50 le mois.

3.La situation politique, économique et sociale continue de s’empirer. L’état de siège a sensiblement réduit l’exercice des libertés fondamentales pendant que l’insécurité affecte la production et le commerce de certains biens.

Il y a lieu de préciser que dans sa majorité, la population forcée à survivre dans les camps des déplacés est constituée de ressortissants des provinces sous état de siège. Elle est devenue presqu’un “matériel de guerre” au même titre que le soldat, l’obus, le blindé, le drone ! Plus on en a, plus on croit détenir un moyen de pression dans des négociations…

2023 était une année électorale

Malheureusement, se dégradant de plus en plus, la situation humanitaire devient, en droit international, l’occasion de remise en cause de l’autorité de l’État dans certains cas espaces.

La nature ayant horreur du vide, la Communauté internationale a de plus en plus tendance à se substituer à l’Etat. C’est ainsi que, par la voix de Jean-Pierre Lacroix, l’Onu a signifié au Gouvernement sa décision de rester en Ituri et au Nord Kivu.

Elle a certes reconnu qu’on est en négociations depuis juin dernier pour un retrait sécurisant pour la Monusco et sécurisé pour la population, mais la vérité est que l’échéance de 2024 ne sera pas tenue, et peu sont les chances d’une échéance en 2025.

Au fait, tout est lié : processus de Nairobi (au point mort alors qu’il est décisif pour les 250 groupes armés congolais devant intégrer le P-DDSC) et processus de Nairobi hypothéqué par le “troc” “RDC avec Fdlr et Rwanda avec M23/AFC”. Malgré l’appui des partenaires, la pierre d’achoppement est à ce niveau.

Tant qu’on aura pas démêlé ce package, les tensions vont continuer à persister, la population sera contrainte à l’errance continue et la Monusco trouvera prétexte à rester. Et plus on va se rapprocher de 2028, plus son retrait deviendra hypothétique pour avant 2026.

Premier signal à bien interpréter : depuis le 20 septembre que Jean-Pierre Lacroix nous a balancés sa vérité, on n’a entendu ni à l’Est (où les gens meurent de tout), ni à l’Ouest (où les gens s’amusent avec tout) un acteur politique, un activiste de droit de l’homme, un ministre de Dieu, un chef coutumier etc. mobiliser la rue de Bunia, de Goma ou de Kinshasa pour réclamer le départ de la Monusco au plus tard le 31 décembre 2024, tel que mis en évidence en 2023. L’autre rappellerait que 2023 était une année électorale !

Ce silence a pour signification le fait que l’État n’est pas jusque-là en mesure d’exercer son autorité sur l’ensemble du pays.

A New-York (siège des Nations Unies) – tout comme à Bruxelles (siège de l’Otan), c’est de cette façon que la réalité rdcongolaise est, hélas !, perçue.

Omer Nsongo die Lema