Après le retrait des terroristes du M23: La force régionale se déploie à Bunagana
Les terroristes du M23 ont commencé à se retirer de Bunagana, ville située à 60 Km de Goma, mais en ne se rendant pas au mont Sebigno pour leur cantonnement comme indiqué par la feuille de route de Luanda, mais vers une destination inconnue. Selon France 24 qui donne cette information via son édition focalisée sur l’Afrique, ce sont les Ougandais qui sont désormais déployés à Bunagana, 9 mois après que cette cité était sous le contrôle du Rwanda sous couvert des terroristes du M23, selon l’annonce faite par le porte-parole du contingent ougandais de la force est-africaine.
C’est France 24 qui a affirmé ce mardi, dans son édition Journal d’Afrique, que les forces régionales de l’Afrique de l’Est ont repris le contrôle de Bunagana, cette ville stratégique de l’Est de la Rdc située à 60 Km de Goma, qui était tenue par les terroristes du M23 depuis 9 mois, et c’est un contingent ougandais qui s’y est déployé.
En effet, cela faisait près de 9 mois que Bunagana était sous le contrôle des terroristes du M23. Les troupes ougandaises y sont désormais déployées, l’annonce a été faite hier soir par le porte-parole du contingent ougandais de la force régionale est-africaine. Cette force va essayer d’obtenir le retrait du M23 dans d’autres territoires de Rusthuru.
Selon la même source, les troupes burundaises et kényanes sont déployées dans le territoire de Masisi. Mais s’il s’agit d’un pas positif dans le processus de paix, à Kinshasa, le mandat de la force régionale et particulièrement l’arrivée des troupes ougandaises a provoqué un vif débat et des députés ont initié des questions orales avec débat à l’Assemblée nationale.
Et le député Juvénal Munubo de rappeler qu’en juin 2022, l’Ouganda a été cité par le groupe d’experts des Nations unies comme étant celui avec le Rwanda ayant servi de base-arrière au M23. « On ne sait pas comprendre comment un pays qui a servi de base arrière au M23 et qu’il faut considérer comme pays agresseur, au même titre que le Rwanda, un pays condamné en 2005 pour activités criminelles sur le territoire congolais et sommé par la Cour internationale de justice à payer les dommages-intérêts à la Rdc… On ne sait pas comprendre comment il peut être considéré comme un partenaire de paix et envoyer ses troupes dans la force est-africaine », se demande l’élu du Nord-Kivu, avant de s’y opposer et d’expliquer que c’est la raison pour laquelle le nouveau Vice-Premier ministre, ministre de la Défense et anciens combattants doit venir au Parlement pour donner à la représentation nationale d’amples précisions.
Toujours selon France 24, un autre point de crispation, c’est la reprise par l’armée congolaise des zones abandonnées par le M23. Disons que ces terroristes ont quitté ces zones avec une garantie que les FARDC ne s’y déploieraient pas avant tout dialogue avec Kinshasa.
Le ministre de la Communication a été plus que clair lorsqu’il a dit lors du briefing de ce lundi qu’il est impossible d’interdire aux FARDC de faire leur travail sur le territoire national. Il soutient que ces zones passées sous le contrôle de la force régionale, seront progressivement remises aux FARDC.
” La force régionale est en appui aux forces armées de la Rdc et toutes ces troupes qui sont actuellement sur le sol congolais, y sont sur invitation du Gouvernement congolais dans l’objectif de travailler pour le retour de la paix. Cela ne doit donc pas être interprété comme une quelconque forme de balkanisation, d’autant plus que l’objectif recherché est de parvenir à la fin des hostilités. Le schéma convenu est que le M23 qui a commencé progressivement à se retirer, puisse laisser la place à la force régionale”, a insisté le ministre Muyaya.
Une situation complexe
Alphonse Mendo, chercheur en Sciences politiques à l’Université de Kisangani, a été interrogé par France 24 pour s’exprimer sur la question. Après le retrait du M23 des zones illégalement occupées, il ne pense pas qu’on puisse parler de succès. Pour lui, en effet, le succès voudrait dire qu’on puisse sécuriser totalement la zone et rétablir l’autorité de l’Etat congolais avec les FARDC.
« Je pense que c’est une grosse erreur de penser que les forces de l’EAC sont une solution. Au contraire, c’est un problème. Cela ajoute à la complexité des forces que nous avons là-bas. Outre la Monusco constituée de plusieurs nationalités, on a plus de 120 groupes armés qui opèrent dans la région, les FARDC, l’armée ougandaise, et cela augmente à la complexité du problème. Ces forces s’interposent, c’est une espèce de zone tampon pour imposer le dialogue avec Kinshasa », pense-t-il.
Au sujet d’un quelconque dialogue, le Gouvernement congolais ne décolère pas. « On ne peut pas accorder une prime aux tueries des Congolais et aux pillages des ressources naturelles de la Rdc », annonce-t-on à Kinshasa. Toutefois, Kinshasa a toujours recommandé d’abord le retrait de ces terroristes, avant d’envisager une quelconque autre mesure.
Et M. Alphonse Mendo, chercheur en Sciences politiques à l’Université de Kisangani de souligner qu’on ne peut pas parler de forces neutres. Car si on avait besoin d’une force neutre, on n’allait que garder la Monusco de jouer ce rôle. C’est ainsi qu’il y a un certain ressentiment de la population pour demander le départ de la force de l’EAC. Il y a un désenchantement. Il y aura de plus en plus des mécontentements et un appel à chasser les forces de l’EAC.
Et d’insister que les forces de l’EAC sont celles qui ont déstabilisé le Congo. A l’en croire, vous ne pouvez pas demander aux forces qui ont déstabilisé de venir stabiliser le Congo. C’est comme si vous demandiez à un violeur de prendre sa victime comme épouse. Il va continuer à augmenter le traumatisme. La solution pour la Rdc, c’est une réforme profonde des services de sécurité. Il n’y a que les congolais, les FARDC qui peuvent rétablir la sécurité dans cette région.
Face aux craintes justifiées de ce chercheur, Patrick Muyaya a eu les mots justes pour rappeler, en début de semaine, le point (e) de la feuille de route de Luanda, selon lequel, si le M23 refuse de se d’engager, le chef d’état-major demanderont à la force régionale de faire usage de la force.
La force régionale a reçu comme mission de contenir et d’éradiquer les forces négatives opérant en Rdc et non d’organiser une quelconque zone tampon. Et tout le monde doit comprendre que la force, c’est le recours ultime. Il ne s’agit pas seulement du M23 qui sont visés, mais de toutes les forces qui écument la Rdc.
Jean-Marie Nkambua