Après une semaine de visite en Rdc : Jean-Pierre Lacroix fait le point de sa mission en Rdc

Au terme d’une visite de presqu’une semaine en République démocratique du Congo, M. Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux Opérations de paix a animé une conférence de presse. A l’en croire, la visite s’inscrit naturellement dans un contexte marqué par la situation post-électorale, bien sûr, des dynamiques politiques afférentes. Le plan de désengagement de la MONUSCO, qui a été négocié et agréé avec les autorités congolaises à la fin de l’année dernière, qui a été endossée par le Conseil de sécurité, bien sûr, les évolutions de la situation sécuritaire et nous avons aussi voulu mettre un accent particulier sur les mesures qui sont prises pour renforcer la lutte contre les abus sexuels dans le système des Nations Unies en République démocratique du Congo ; faire le point sur les mesures qui sont en cours et évaluer ce qui doit être fait en plus de ces mesures, le cas échéant. 

Cette visite les a conduits dans l’Est de la République démocratique du Congo, à Beni, à Bukavu et à Goma. « Nous avons eu des contacts avec les autorités provinciales, avec la société civile, bien sûr avec nos collègues de la MONUSCO. Et ici, à Kinshasa, j’ai rencontré le chef de l’État qui était accompagné de plusieurs Vice-Premiers ministres et ministres et nous avons aussi bien sûr rencontré à nouveau les représentants de la société civile, les forces politiques, évidemment bien sûr les collègues de la MONUSCO », dit-il.

Du plan de désengagement

Le désengagement de la MONUSCO répond à une demande faite par les autorités congolaises. Notre feuille de route, c’est ce plan de désengagement dont j’ai parlé tout à l’heure, qui a été maintenant endossé par le Conseil de sécurité. Il prévoit une première étape qui concerne le Sud-Kivu avec un horizon de temps qui consiste à ce que le désengagement soit total de cette province à la fin du mois de juin. C’est un processus qui est en cours.

« Je vous avais dit que nous étions à Bukavu précisément pour faire le point de ce processus, pour évaluer avec les interlocuteurs, et notamment les collègues de la MONUSCO, mais aussi les autorités provinciales où nous en étions, quelles pouvaient être les défis à relever ? Il y a un certain nombre de défis logistiques de notre côté, que nous allons nous efforcer de surmonter. Il y a aussi l’importance qui s’attache à ce que, comme cela est prévu dans le plan de désengagement, le désengagement graduel de la MONUSCO s’accompagne du redéploiement graduel des composantes de l’État, les composantes en uniforme, forces armées, forces de police et aussi la composante civile de l’État », avoue-t-il.

Et nous avons notamment souligné l’importance qui s’attachait à ce que ce redéploiement des composantes de l’État, et notamment des composantes de sécurité, soit bien au rendez-vous de manière à ce que nous puissions effectuer cette première phase du désengagement dans les meilleures conditions possibles.

Il a expliqué que l’objectif, d’une manière générale, c’est que le désengagement se fasse d’une manière ordonnée et responsable. Et si je ne me trompe, ce sont les mots qui sont utilisés également par les plus hautes autorités de l’État congolais. Nous sommes totalement en phase sur la nécessité de faire en sorte que ce désengagement soit donc opéré de façon raisonnée, ordonnée et responsable.

Maintenant, nous sommes également allés au Nord-Kivu, comme je vous l’ai indiqué, à la fois à Beni et aussi à Goma. La situation sur place, vous le savez, est très préoccupante et est inquiétante. Elle fait planer le risque d’une déflagration au niveau régional, en tout cas d’une intensification très forte avec une caractéristique régionale, une composante régionale accrue avec une implication de divers pays de la région de manière renforcée, d’ailleurs de part et d’autre.

Pour ce qui concerne la MONUSCO, il y a bien sûr l’horizon du plan de désengagement. Je vous parlerai tout à l’heure de prochaines étapes du plan de désengagement. Il y a aussi le court terme, le court terme, c’est ce que fait la MONUSCO pour contribuer aux efforts afin de traiter, de répondre à ces défis sécuritaires et humanitaires. Sur le plan sécuritaire, la Force de la MONUSCO travaille très étroitement avec les autres composantes déployées sur place. La MONUSCO et les Forces armées congolaises et aussi la Force de la SADC dont une partie des éléments se sont déjà déployés et il s’agit en particulier de protéger la région de Goma.

« Nous avons déployé beaucoup d’éléments pour atteindre ces objectifs et nous espérons que les opérations en cours se poursuivront dans la meilleure coordination possible avec les autres composantes que j’ai évoquées. Sur le plan humanitaire, bien sûr, nos collègues continuent de faire le maximum dans des conditions difficiles pour répondre aux besoins des populations qui sont en souffrance et qui pour beaucoup d’entre elles, sont en situation de déplacement », note-t-il.

Un mandat plus large de la Monusco

Parallèlement à cela, j’ai mentionné la Force de la SADC et vous le savez, nous avons depuis le début pris l’initiative, il y a déjà pas mal de temps, de proposer que la MONUSCO puisse avoir un mandat de la part du Conseil de sécurité plus large pour apporter un soutien plus significatif à la Force de la SADC.

« Nous sommes en train de travailler sur des options en liaison avec la SADC et aussi les autorités congolaises. Options qui seront présentées au Conseil de sécurité puisque nous dépendons des décisions du Conseil de sécurité pour que la MONUSCO se voie donner, nous l’espérons, un mandat pour soutenir davantage cette Force de la SADC qui est en cours de déploiement, et dont le déploiement se poursuivra dans les semaines et mois à venir », explique Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux Opérations de paix.

Maintenant, sur le long terme et parallèlement à cet horizon du désengagement de la MONUSCO et compte tenu de la dégradation de la situation dans cette zone, il est aussi essentiel que les efforts diplomatiques reprennent.

Il y a plusieurs processus que vous connaissez, le processus de Luanda, le processus de Nairobi, le rôle de l’ancien président du Kenya, le président Kenyatta en tant que médiateur. L’engagement d’autres partenaires dans le continent africain et au-delà qui ont fait des efforts, qui ont déployé un certain nombre d’actions pour engager les parties. Et alors que la phase électorale est maintenant derrière nous, il nous semble essentiel que ces efforts diplomatiques reprennent et les Nations Unies souhaitent, et le font déjà d’ailleurs, activement soutenir la reprise de ces efforts diplomatiques, puisque la solution de cette situation dans l’Est du Congo et plus généralement dans la région des Grands Lacs, devra être une solution diplomatique et impliquant tous les acteurs de la région.

Alors bien sûr, le désengagement, comme je vous le dis, commence à s’opérer dans la province du Sud- Kivu. Le plan de désengagement négocié avec les autorités congolaises prévoit une évaluation conjointe avec ces autorités, donc évaluation de la part de la MONUSCO avec les autorités congolaises tous les trois mois. La première et la prochaine évaluation devra être conclue fin mars et à partir des constats et des conclusions de ces évaluations, eh bien les prochaines étapes du désengagement seront déterminées, sachant que nous sommes déterminés à respecter ce plan de désengagement et à aller de l’avant en ce sens. Mais sachant également que tout ça doit être fait encore une fois, comme le souhaite de manière appuyée les plus hautes autorités de l’État congolais, mais également nous-mêmes, que tout ça se fasse de manière raisonnable, ordonnée, digne et de manière à faire en sorte que les conséquences sur la situation en général, et bien sûr en particulier la protection des civils soit le plus possible minimisées.

Beaucoup reste à faire

Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux Opérations de paix a expliqué qu’il y a beaucoup à faire naturellement dans un contexte qui est difficile. Mais un point mérite aussi d’être souligné, c’est le fait que, au-delà du désengagement de la MONUSCO, les Nations Unies resteront. Il ne s’agit pas d’un départ des Nations Unies du Congo. Nos agences, fonds et programmes, ceux qui travaillent dans le domaine humanitaire, dans le domaine du soutien au développement, dans le domaine de la promotion des femmes, des jeunes, des droits de l’homme poursuivront leurs activités et elles se préparent avec nous à une situation d’activités Post-MONUSCO.

Elles auront besoin bien sûr de soutien et notamment de soutien financier, et nous nous sommes engagés à faire le plaidoyer pour que les ressources nécessaires à ces activités soient au rendez-vous. Ce qui n’est pas facile parce que, comme vous le savez, les crises humanitaires, malheureusement, se sont multipliées dans le monde et ça exerce une forte contrainte sur les capacités des donateurs. Mais nous avons la responsabilité en tout cas de préparer cette transition au mieux. Transition qui n’est pas de la MONUSCO aux agences des Nations Unies, transition qui est de la MONUSCO aux autorités congolaises, parce que notre objectif numéro un, c’est de soutenir le renforcement et le redéploiement de la présence de l’État. Mais les agences des Nations Unies continueront leur travail, auront donc besoin de bien préparer cette transition et d’avoir des ressources adéquates. Voilà, je m’arrête là et je vous remercie à l’avance de vos questions.

JMNK