Par Dr Prof Antoine Roger LOKONGO
Nom Chinois : 龙刚 (Long Gang) ou « Dragon Congolais »
Professeur Associé à l’Université Président Joseph Kasa-Vubu (UKV) à Boma; Attaché Supérieur de Recherche au Centre de Recherche pour les Echanges entre les Peuples, Université de Pékin; Chercheur Invité à l’Institut pour la Coopération Mondiale et la Compréhension Mutuelle entre les Peuples, Université de Pékin.
Résumé:
Cet article souligne que «l’Initiative Une Ceinture, Une Route», lancée par la Chine en 2013, est effectivement au centre du mécanisme de coopération entre les pays BRICS, servant d’agenda collectif ou de position commune, voire même d’une force motrice car elle stimule déjà le développement dans les pays du Sud.
Mots-clés: Pays BRICS, «l’Initiative Une Ceinture, Une Route», pays du Sud.
Introduction:
Le thème du Sommet des Pays BRICS 2023 qui vient de se tenir à Johannesburg, en Afrique du Sud, du 22 au 24 août, « Les BRICS et l’Afrique : Partenariat pour une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif », fait exactement écho à la raison d’être de « l’Initiative Une ceinture, une Route», lancée par la Chine en 2013: Une coopération stratégique gagnant-gagnant dans le domaine de la construction d’infrastructures entre la Chine et les pays du Sud en général et les pays africains en particulier ; fondée précisément sur une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif.
Cette nouvelle Route de la soie fait référence à l’ancienne route de la Chine à la Méditerranée il y a 2000 ans ((Paul Nantulya, 2019). C’est pourquoi, parfois, «l’Initiative Une Ceinture, Une Route» ou « l’initiative la Ceinture et la Route » est tout simplement appelée «Route de la Soie ».
L’option a été levée lors du sommet des BRICS. Dès le début de l’année prochaine, l’Iran, l’Arabie Saoudite, l’Égypte, l’Argentine, les Émirats Arabes Unis et l’Éthiopie rejoindront les cinq membres actuels – le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud.
C’est ainsi que les pays BRICS – dont l’expansion est susceptible de contrecarrer la domination occidentale en général et celle des États-Unis en particulier dans les affaires mondiales – sont déjà en train de recalibrer ou de rééquilibrer la gouvernance économique mondiale, selon les données et analyses fournies par l’agence de presse mondiale russe Sputnik le 24 août 2023:
Après leur expansion, les BRICS sont désormais quatre fois plus peuplés que le G7 (avec une population totale d’environ 3,6 milliards, soit 45 % de la population mondiale) et deux fois plus grands en superficie. Leur PIB total à parité de pouvoir d’achat s’élève à 37 %, contre 29,9 % pour le Groupe de Sept. Lorsque l’Argentine, l’Égypte, l’Iran, l’Arabie Saoudite, l’Éthiopie et les Émirats Arabes Unis rejoindront officiellement les BRICS en janvier 2024, le bloc représentera 48,5 millions de kilomètres carrés, soit 36 % de la superficie mondiale. En comparaison, cela représente plus de deux fois la taille du G7 (États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Italie, Canada, France, Japon).
Selon le Président Brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, le PIB total des BRICS représentera 37 % par rapport à celui du PIB mondial en parité de pouvoir d’achat. Alors que le PIB des BRICS avant l’élargissement s’élevait à 32,1 % en 2023, l’entrée de nouveaux membres leur rapportera 5 % du PIB mondial (données du Fonds Monétaire International (FMI).
Les BRICS représenteront également 44,35 % des réserves mondiales de pétrole ainsi que près de la moitié de la production alimentaire mondiale – en 2021, la récolte de blé dans ces 11 pays représentait 49 % de la récolte mondiale (dans le G7 c’était – 19,1 %) et la récolte de riz représentait 55 % de la récolte mondiale (dans les pays du G7 c’était – 2,6 %).
Les BRICS ont également un avantage en termes de part de la production mondiale de métaux importants pour la haute technologie : ils représentent 79 % de la production mondiale d’aluminium (celle de G7 c’est – 1,3 %) et 77 % de la production de palladium (6,9 %). De plus, après leur expansion, les BRICS représenteront 38,3% de toute la production industrielle mondiale (celle de G7 c’est – 30,5%), l’avantage en termes de part d’exportation restera au Groupe de Sept soit 28,8% contre 23,4% pour les pays BRICS (Sputnik Africa, 24 août 2023). Par conséquent, les BRICS détiennent désormais plus d’influence économique qu’auparavant.
Dix ans après son lancement, « l’Initiative Une Ceinture, Une Route» est effectivement au centre du mécanisme de coopération entre les pays BRICS, servant d’agenda collectif ou de position commune, voire même d’une force motrice car elle stimule déjà le développement dans les pays du Sud. Le Docteur Somen Banerjee, chercheur principal au Centre de Recherche Maritime en Inde soutient même que le bloc BRICS a besoin d’un thème unificateur comme « l’Initiative la Ceinture et la Route » (Somen Banerjee, South China Morning Post, 10 août 2023).
2. L’impact de « l’initiative Une ceinture, une Route » dans les pays BRICS:
2.1. En Amérique du Sud:
2.1.1. Argentine:
En ce qui concerne les six nouveaux membres du bloc BRICS, l’Argentine était le 20eme des 33 pays d’Amérique Latine et des Caraïbes à adhérer à « l’Initiative Une Ceinture, Une Route »; ce qui a permis à Buenos Aires d’obtenir plus facilement des financements de la Banque Asiatique d’Investissement dans les Infrastructures (AIIB) dirigée par la Chine et de la nouvelle Banque de Développement des BRICS (Scott Foster, 15 février 2022).
2.1.2. Brésil:
Au cours de la dernière décennie, le Brésil a reçu 47 % des investissements chinois en Amérique du Sud. Depuis 2009, la Chine est le principal partenaire commercial du Brésil, succédant à la position occupée par les États-Unis depuis 1929. En 2022, les exportations du Brésil vers la Chine ont atteint un montant record de 89 milliards de dollars et sa balance commerciale avec la Chine affiche un excédent important.
Lors de la récente visite de Lula en Chine, les deux dirigeants Brésilien et Chinois ont signé 15 nouveaux accords gouvernementaux bilatéraux et 20 autres contrats commerciaux entre entreprises et agences publiques des deux pays. Le Brésil est le seul membre fondateur latino-américain de la Banque Asiatique d’investissement dans les Infrastructures (AIIB) et construit également conjointement avec la Chine les BRICS et la nouvelle Banque de Développement (dont l’ancienne présidente brésilienne Dilma Rousseff est récemment devenue présidente).
Cependant, même si plus de 20 pays d’Amérique Latine et des Caraïbes ont officiellement rejoint « l’Initiative la Ceinture et la Route », le Brésil (l’un des principaux partenaires politiques et commerciaux de la Chine dans la région) ne l’a pas fait. L’adhésion du Brésil à « l’Initiative la Ceinture et la Route », l’un des principaux projets de coopération lancés par la Chine, doit encore se concrétiser.
L’une des principales raisons réside dans la prudence du Brésil face aux réactions américaines. Elle est également influencée par les perceptions erronées de certaines élites brésiliennes sur la nature des relations du Brésil avec la Chine. Cependant, les infrastructures constituent précisément l’un des principaux goulots d’étranglement économiques du Brésil, qui investit chaque année environ 2 % de son PIB dans les infrastructures.
Il est clair et raisonnable qu’il est temps pour le Brésil de rejoindre de manière décisive « l’Initiative la Ceinture et la Route », et de réitérer son alignement historique sur les principes de défense d’un monde multipolaire marqué par la primauté de la paix, du développement économique et de la justice sociale; pour ainsi renforcer l’option bénigne de construire une communauté de destin pour l’humanité (Tiago Nogara, China Focus, 7 juin 2023).
2.2. Au Moyen-Orient:
Sarah Hsu, professeure agrégée d’économie à l’Université d’État de New York à New Paltz, explique que le programme chinois « l’Initiative la Ceinture et la Route », a été bien accueilli au Moyen-Orient. Les routes de la soie terrestres et maritimes «, deux volets de « l’Initiative la Ceinture et la Route », traversent la région. La route terrestre traverse Istanbul et Téhéran, ainsi que Gwadar, tandis que la route maritime traverse la Méditerranée et la mer Rouge jusqu’au golfe d’Aden (Sarah Hsu, 2018).
2.2.1. Arabie Saoudite:
L’initiative chinoise «La Ceinture et la Route» est considérée comme un élément important de la Vision 2030 de l’Arabie Saoudite. Le plan de l’Arabie Saoudite consiste à diversifier son économie en s’éloignant du pétrole (Sara Hsu, 2018). En fait, en matière de coopération énergétique, la Chine, deuxième économie mondiale, a cimenté ses liens avec le plus grand exportateur mondial de pétrole dans le cadre de «l’Initiative la Ceinture et la Route» chinoise.
Par exemple, la «China North Industries Group Corp » a signé un accord-cadre avec Saudi Aramco pour gérer une raffinerie et un complexe pétrochimique dans le nord-est de la Chine, ce qui constitue l’un des accords très médiatisés signés lors du Forum Chinois de la Ceinture et de la Route en 2017. Le Royaume d’Arabie Saoudite, une plaque tournante centrale reliant l’Asie, l’Afrique et l’Europe, constitue un élément important de « l’Initiative la Ceinture et la Route » chinoise.
Par ailleurs, l’Arabie Saoudite est l’un des premiers pays à avoir répondu positivement à «l’Initiative la Ceinture et la Route» qui rapproche beaucoup la Chine de l’Arabie Saoudite. «L’Initiative la Ceinture et la Route» offre de grandes opportunités potentielles à l’Arabie Saoudite, en tant que pilier de la dite Initiative au Moyen-Orient; en termes de construction d’infrastructures, de coopération énergétique, de technologie et de finance, d’échange culturel, de sécurité et de défense pour le Royaume Wahhabite (Khaled Mohammed Alqahtan, 2020).
2.2.2. Émirats Arabes Unis (EAU):
Quant aux Émirats Arabes Unis (EAU), une fédération de sept Émirats situés au sud-est de la péninsule arabique, limitrophe d’Oman et de l’Arabie Saoudite, depuis qu’ils ont rejoint «l’Initiative la Ceinture et de la Route » proposée par la Chine, les deux pays ont vu leur partenariat s’étendre à de nombreux domaines, allant du commerce et des services financiers à l’éducation et à la culture; et maintenant à la coopération spatiale. Ces dernières années, les Émirats Arabes Unis ont lancé une série d’initiatives susceptibles de renforcer leur position de partenaire global et leur statut de pôle économique attractif et influent. Parmi celles-ci se trouve le «Nous, les Émirats Arabes Unis 2031», un plan national qui guidera la voie de développement des Émirats Arabes Unis au cours de la prochaine décennie, en se concentrant sur les aspects sociaux, économiques, d’investissement et de développement. Certains des indicateurs clés de cette vision incluent le doublement du PIB du pays de 1,49 mille milliards de dirhams à 3 000 mille milliards de dirhams (816 milliards de dollars), la génération de 217 milliards de dollars d’exportations non pétrolières et l’augmentation de la valeur du commerce extérieur des Émirats Arabes Unis à 1.8 mille milliards de dollars.
Le plan s’inscrit dans la vision du « Centenaire des Émirats Arabes Unis 2071 » lancée par le Cabinet des Émirats Arabes Unis en 2017 pour faire progresser l’éducation, l’économie, le développement du gouvernement et la cohésion communautaire du pays, et «inculquer un système de valeurs morales émiraties aux générations futures», selon le gouvernement. Un pilier clé de « Nous, les Émirats Arabes Unis 2031 » est son écosystème avancé qui améliorerait les performances du gouvernement ainsi que les infrastructures et le développement des Émirats Arabes Unis, y compris le développement de l’infrastructure numérique.
Le partenariat majeur entre la Chine et les Émirats Arabes Unis vise à développer la zone de démonstration de coopération en matière de capacité industrielle Chine-EAU («China-UAE Industrial Capacity Cooperation Demonstration Zone », or ICCDZ), qui vise à développer la base des industries chinoises aux Émirats Arabes Unis. La zone abrite cinq secteurs industriels: les métaux et la fabrication de pointe, les équipements pétroliers et les services techniques, les matériaux de construction et l’ameublement, les énergies renouvelables et les technologies environnementales, ainsi que les véhicules électriques et les machines lourdes (China Daily, 31 juillet 2023).
2.2.3. Iran:
La situation stratégique de l’Iran en fait un élément essentiel dans le cadre mondial de «l’Initiative la Ceinture et de la Route », car il est situé dans la partie centrale du Moyen-Orient, en tant que pont entre la Chine et l’Europe. En effet, l’Iran est situé dans un endroit qui peut relier les couloirs nord et sud, ainsi que les couloirs ouest et est. Il existe déjà un train de marchandises direct entre la Chine et l’Iran. La route ferroviaire, également connue sous le nom de « Nouvelle Route de la Soie », s’étend sur 2 300 kilomètres d’Urumqi, dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang, dans l’ouest de la Chine, à Téhéran, reliant le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan et le Turkménistan en cours de route, réduisant le transport à 14 à 15 jours, contre 45 jours à 50 jours par mer.
Déterminée d’en faire un volet important de la « Nouvelle Route de la Soie mondiale», la Chine construit également un chemin de fer de 926 km reliant Téhéran à la ville orientale de Mashhad, le principal lieu de pèlerinage d’Iran qui attire des dizaines de millions de visiteurs chaque année. La construction du chemin de fer électrifié par la « China National Machinery Import and Export Corporation », également une entreprise d’État, devrait prendre jusqu’à quatre ans. Une fois terminé, il réduira le trajet de 12 heures à 6 heures et augmentera la capacité de transport à 25 millions de passagers et 10 millions de tonnes de marchandises par an.
Pour l’Iran, le projet d’électrification Téhéran-Mashhad fait partie d’un plan plus large de développement ferroviaire visant à électrifier toutes les voies ferrées d’ici 2025. Le gouvernement a placé l’expansion du réseau ferroviaire du pays en tête de son agenda. Dans son sixième plan de développement quinquennal (2017-22), l’Iran s’est engagé à augmenter la part du rail dans le transport de marchandises et de passagers à au moins 30 % et 20 % respectivement. L’ambitieux programme iranien de construction et de modernisation du réseau ferroviaire a attiré de nombreuses entreprises chinoises, en particulier les grandes entreprises publiques. La société publique « China Railway Engineering Corp » a construit une ligne ferroviaire à grande vitesse de 415 km entre Téhéran et Ispahan via Qom. En janvier 2018, une filiale de la «China Railway Construction Corp » a remporté un contrat de 3,53 milliards de yuans (513 millions de dollars) pour la construction d’une voie ferrée de 263 km dans l’ouest de l’Iran, entre Kermanshah et Khosravi. En mars 2018, la China National Machinery Industry Corp a signé un contrat pour la construction d’un chemin de fer de 845 millions de dollars reliant les villes iraniennes de Téhéran, Hamedan et Sanandaj (Li Tianyang, China Daily, 25 janvier 2019).
2.3. Inde:
La participation de l’Inde à la Banque Asiatique d’Investissement dans les Infrastructures (AIIB), à l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS) et aux BRICS a eu relativement peu d’impact sur la perception qu’a New Delhi de « l’Initiative Une Ceinture, une Route » (Gulshan Sachdeva et Jean Monnet, 2019), l’enjeu géopolitique entre l’Inde et le Pakistan oblige. C’est parce qu’une partie clé de « l’initiative Une Ceinture, une Route » appelée « Corridor Economique Chine-Pakistan » (« China Pakistan Economic Corridor » ou CPEC), visant à promouvoir la coopération économique et la connectivité, traverse ce que l’Inde considère comme le « Cachemire occupé par le Pakistan (la « Pakistan Occupied Kashmir » ou PoK). La PoK est à l’origine du conflit entre l’Inde et le Pakistan depuis 1947. Cependant, comme l’a dit Luo Zhaohui, alors ambassadeur de Chine en Inde en 2017, la Chine n’a pas l’intention de s’impliquer dans les conflits de souveraineté et territoriaux entre l’Inde et le Pakistan. Il a reconnu les préoccupations de l’Inde en matière de souveraineté et a ajouté que la Chine est apparemment ouverte à renommer le corridor économique Chine-Pakistan pour en faire une initiative multilatérale. En outre, la Chine soutient la solution des différends par le biais de négociations bilatérales (Ananth Krishnan, India Today, 8 mai 2017).
2.4. Afrique
2.4.1. Ethiopie:
La coopération économique Chine-Ethiopie au cours de la période 2000-2020 a été marquée par la convergence entre la politique industrielle de l’Éthiopie, les orientations du Forum sur la Coopération Chine-Afrique (« Forum on China-Africa Cooperation » ou FOCAC) et la stratégie de développement des infrastructures qui constitue la pierre angulaire de « l’Initiative Une Ceinture, Une Route » chinoise.
La Chine, le plus grand investisseur étranger en Éthiopie au cours de cette période, a joué un rôle majeur en termes d’investissement et de financement dans le secteur de l’énergie et des infrastructures de transport : Aéroport d’Addis-Abeba, routes, chemins de fer, terminal portuaire et gazoduc. Le projet phare – le chemin de fer Addis-Abeba-Djibouti – reliant Addis-Abeba à la ville de Djibouti et au terminal à conteneurs Doraleh de Djibouti, inauguré en 2018, a fourni à l’Éthiopie enclavée une bonne connexion entre l’arrière-pays et le port maritime: le corridor économique représente plus de 95 % du commerce extérieur de l’Éthiopie. Le développement des parcs industriels éthiopiens sur le modèle des zones économiques spéciales (ZES) chinoises était le deuxième pilier de la stratégie de développement d’un secteur manufacturier orienté vers l’exportation. Les entreprises chinoises opérant dans les parcs industriels éthiopiens dans les secteurs du textile et du cuir ont été pionnières dans cette activité, contribuant ainsi à la participation de l’Éthiopie aux chaînes de valeur mondiales (CVM).
Le gouvernement éthiopien prévoit également le développement des parcs agro-industriels spécialisés dans les produits agricoles à valeur ajoutée comme le café ou les fleurs coupées exportées vers l’Europe via l’Aéroport d’Addis-Abeba et Ethiopian Airlines Cargo. L’Éthiopie est considérée comme le pays « modèle » de « l’Initiative Une Ceinture, Une Route » chinoise en Afrique. Les investissements chinois sont devenus encore plus importants en Éthiopie avec « l’Initiative Une Ceinture, Une Route » et ni la COVID-19 ni la guerre civile en Éthiopie n’ont inversé cette tendance (Jean-Paul Larçon et Corinne Vadcar, 2021).
2.2.4. Egypte:
Le Professeur Mordechai Chaziza confirme que « l’Initiative Chinoise de la Route Maritime de la Soie » (« China’s Maritime Silk Road Initiative » ou MSRI) – c’est l’aspect maritime de l’Initiative – se manifeste en Égypte dans des projets portuaires, des trains à grande vitesse et d’autres initiatives de transport, des projets de production et de transmission d’électricité, l’immense Zone Economique du Canal de Suez (« Suez Canal Economic Zone » ou SCEZ), et les investissements manufacturiers à l’intérieur et à l’extérieur de la Zone Economique du Canal de Suez ainsi que les programmes de financement de tels projets. Les besoins économiques et politiques du côté égyptien, tels que la nécessité d’obtenir des capitaux supplémentaires, de développer les infrastructures et de diversifier les partenaires politiques, favorisent le progrès de « l’Initiative Chinoise de la Route Maritime de la Soie » en Égypte (Mordechai Chaziza, 2021).
2.4.2. Afrique du Sud:
La base de données de l’agence de presse chinoise Xinhua sur la Route de la Soie atteste que l’Afrique du Sud a participé activement à l’exécution ou à la construction de « l’Initiative Une Ceinture, Une Route » et a été l’un des premiers pays africains à signer des documents de coopération relatifs à cette Initiative avec la Chine (Service d’information sur la Route de la Soie de Xinhua, pays de la Ceinture et de la Route — Afrique du Sud, 16 janvier 2020).
A l’occasion du Sommet des BRICS qui vient de se tenir à Johannesburg, la Chine et l’Afrique du Sud ont signé ou approuvé 25 documents de coopération au total. Ces documents couvrent des domaines tels que « l’Initiative Une Ceinture, Une Route », les nouvelles énergies et l’électricité, les produits agricoles, les zones économiques spéciales et les parcs industriels, l’économie maritime, l’innovation scientifique et technologique et l’enseignement supérieur. Les signataires de ces documents vont des ministères gouvernementaux des deux pays aux entreprises publiques du secteur de l’énergie, en passant par les médias, les banques et les universités… (Agence de presse Xinhua, 24 août 2023).
2.5. Quid de la République Démocratique du Congo ?
A la même occasion du Sommet des BRICS qui vient de se tenir à Johannesburg, la République Démocratique du Congo (RDC), notre pays, a été invitée à y assister. Cependant, le Président Congolais Félix Tshisekedi, un voyageur passionné qui ne raterait généralement pas de telles occasions, ne s’est pas présenté. Il s’est laissé représenter par Sama Lukonde, son Premier Ministre. Ce dernier a affirmé que la RDC, « un pays solution » pour la planète compte tenu de son immense forêt tropicale qui est un lieu d’expérimentation pour lutter contre le changement climatique ainsi que pour la transition globale vers une énergie propre grâce à ses minerais stratégiques comme le cobalt et le lithium, nécessaires à la fabrication de batteries et de véhicules électriques, est en passe de s’industrialiser. Pour ce faire, la RDC place ses espoirs dans l’obtention des fonds ou des investissements des pays BRICS.
C’était difficile pour l’opinion congolaise à avaler ça. Si la RDC possède un potentiel aussi immense, pourquoi ne pas tout simplement rejoindre les BRICS ? Quant est ce que les BRICS vont-ils devenir les BRICCS, un « C » de plus pour représenter la RDC ? Il est également aberrant que l’accord de partenariat Chine-RDC sur «l’Initiative Une Ceinture, Une Route » n’ait jamais franchi le seuil du protocole d’accord («Memorandum of understanding» or MOU) signé en 2021, mais en même temps le gouvernement congolais a accepté que l’Ouganda et la Tanzanie qui ont modernisé leurs infrastructures grâce à la même «Initiative Une Ceinture, Une Route » chinoise viennent construire des routes en RDC. Le gouvernement congolais ne peut-il pas traiter directement avec la Chine pour faire le ménage dans sa propre demeure?
3. Conclusion:
L’expansion des BRICS a inauguré une nouvelle ère d’un véritable multilatéralisme menée par les pays du Sud sous l’égide du leadership non hégémonique de la Chine, deuxième superpuissance mondiale. Ce multilatéralisme s’appuie sur l’initiative multilatérale et à grande échelle lancée par la Chine et dénommée « l’Initiative Une ceinture, une Route» ou la « Nouvelle Route de la Soie ». Cette initiative est susceptible de désenclaver les pays africains y compris à l’intérieur de leurs territoires respectifs, d’assurer la connectivité et ainsi faire sauter le goulot d’étranglement infrastructurel qui freine leur développement sur tous les plans, y compris le développement de leurs industries de transformation – c’est un rappel à la réalité pour la République Démocratique du Congo en particulier.
Au lieu de donner des nuits blanches à ceux qui continuent d’afficher la mentalité de la guerre froide ou le jeu à somme nulle dans les relations internationales, « l’Initiative la Ceinture et la Route » devrait plutôt être accueillie comme un pilier d’une coopération gagnant-gagnant susceptible de faciliter le développement commun mondial de l’humanité, sur lequel dépendent la paix mondiale et une communauté de destin commun pour l’humanité. Le résultat sera une prospérité commune, une sécurité ou une stabilité commune, un bonheur partagé et un progrès pour l’humanité fondé sur la solidarité et la coopération gagnant-gagnant.
Les problèmes mondiaux tels que le changement climatique et la santé mondiale récemment menacée par le COVID-19 nous rappellent que nous devons nous efforcer de travailler ensemble, en tenant compte des particularités de chaque pays en termes de voie de développement politique et économique choisie, de culture et de civilisation. Nous tombons ou nous nous relevons tous ensemble.
La Chine soutient sincèrement et positivement les pays du Sud en général et les pays africains en particulier ; et à travers des initiatives comme la « Nouvelle Route de la Soie » contribue à réduire l’écart entre les pays avancés et les pays en développement. C’est pourquoi la majorité des Africains sont convaincus que la Chine n’est pas là pour les exploiter ou pour recoloniser leur pays comme la rhétorique occidentale veut nous le faire croire. Comme nous l’avons souligné plus haut, le thème du Sommet des BRICS qui vient de se tenir en Afrique du Sud, « BRICS et Afrique : Partenariat pour une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif » [à travers « l’Initiative Une ceinture, une Route», faut-il ajouter] en témoigne.
4. References:
Ananth Krishnan, Beijing open to renaming China-Pakistan Economic Corridor, says envoy heeding India’s concerns, India Today, 8 May 2017. https://www.indiatoday.in/world/story/china-open-to-renaming-china-pakistan-economic-corridor-975779-2017-05-08. Date de consultation: 7 septembre 2023.
Chaziza, M. (2021). Egypt in China’s Maritime Silk Road Initiative: Relations Cannot Surmount Realities. In: Blanchard, JM.F. (eds) China’s Maritime Silk Road Initiative, Africa, and the Middle East. Palgrave Studies in Asia-Pacific Political Economy. Palgrave Macmillan, Singapore. https://doi.org/10.1007/978-981-33-4013-8_9).
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