Communicateurs « renseignants » potentiels pour Chérubin Okende : faites gaffe !
Quelle qu’en soit la raison, l’assassinat du député national Chérubin Okende est tout ce qu’il y a de crapuleux, d’ignoble.
Qu’on soit en démocratie, en démocrature (néologisme en intégration dans la terminologie politique) ou en dictature, il ne se justifie pas.
Toutes les agitations et réactions en observation depuis la découverte du corps criblé de balles dans son véhicule se comprennent cependant dans la mesure où l’homme n’était pas n’importe qui. Il faisait partie de la génération marquant l’histoire de ce pays au cours de ce dernier quart de siècle, aux côtés, notamment, de Vital Kamerhe, Delly Sessanga et Christophe Lutundula. Des tribuns qu’on a toujours aimé entendre débattre.
« Tombeur » de la majorité parlementaire issue des législatives de 2018, il aura été en quelque sorte l’homme-clé de l’avènement de l’Union sacrée de la nation.
Ministre des Transports et Communications dans le Gouvernement Sama Lukonde 1 investi le 26 avril 2021, Chérubin Okende a rendu le tablier le 28 décembre 2022 pour rester fidèle à sa famille politique, dès lors que son leader, Moïse Katumbi, a décidé lui aussi de rendre le sien à l’Usn le 19 décembre de la même année.
Il est redevenu député national sur base de l’alinéa 4 de l’article 110 de la Constitution.
Dans un contexte politique de plus en plus suspicieux, car doublement miné par les questions sécuritaire à l’Est et électorale sur l’ensemble du territoire national, tous les acteurs institutionnels, principalement ceux de la Majorité, sont comme appelés à apprendre à marcher sur des œufs en ce qu’une initiative normale en termes de droit peut se révéler anormale du simple fait de la coïncidence.
Petit rappel : qui ne se souvient pas, ici à Kinshasa, que la démarche pourtant ordinaire d’un contrôle d’impôts sur l’hôtel Faden House avait été vite transformée en persécutions politiques sur la personne de Martin Fayulu ?
Conséquence : la démarche ordinaire d’un contrôle sur la déclaration du patrimoine de Chérubin Okende est devenu prétexte à l’enlèvement ayant abouti sur un assassinat ! On comprend pourquoi la Cour constitutionnelle s’emploie à démontrer qu’elle n’est impliquée ni de près, ni de loin dans le drame survenu. Il en va de son fonctionnement même dans la mesure où le désormais précédent Chérubin Okende va plomber certaines de ses missions.
Pendant que l’émotion bat son plein et certains esprits créatifs mettent en relief la similitude des faits avec l’assassinat de Floribert Chebeya, un geste fort a été posé par le Président Félix Tshisekedi : d’abord un message de condoléances aussitôt l’annonce du crime crapuleux confirmée et l’observation d’une minute de silence en ouverture du Conseil des ministres du vendredi 14 juillet 2023. Le Gouvernement a fait de même, tout comme le Bureau de l’Assemblée nationale. Ils ont communiqué.
Quelle attitude tenir alors quand on est du camp du Chef de l’Etat, c’est-à-dire du Gouvernement, c’est-à-dire de l’Union sacrée de la nation, c’est-à-dire de l’Udps ?
L’expérience prouve qu’à l’annonce de l’assassinat de Floribert Chebeya, le camp de Joseph Kabila s’en était défendu bec et ongles pendant que l’opposition lui imputait la responsabilité de la commission du crime d’État. C’est tout à fait normal qu’à l’annonce de celui de Chérubin Okende, le camp de Félix Tshisekedi réagisse de la même façon et l’opposition actuelle lui rende la monnaie de sa pièce.
Seulement voilà : en 2010, on avait certes Internet, mais pas les réseaux sociaux pour lesquels Umberto va déclarer «_Les réseaux sociaux ont donné le droit à la parole à des légions d’imbéciles qui avant ne parlaient qu’au bar et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite. Aujourd’hui ils ont le même droit qu’un Prix Nobel_».
En 2023, on a justement ces réseaux à la base d’énormes dégâts dans la présentation et l’interprétation des faits. Chacun voulant paraître et apparaître comme ayant l’exclusivité de la vraie information, tout le monde doit apprendre à ses dépens qu’il s’institue personnellement un « renseignant » potentiel pour les enquêtes judiciaires, terme à prendre dans le sens d’«_une personne physique qu’une des parties fait citer à comparaître devant le juge pour qu’elle certifie sous serment l’existence d’un fait dont elle a une connaissance personnelle_ ».
Lorsqu’il sera procédé au lancement des avis de recherche à l’endroit des internautes concernés, il ne faudrait pas qu’on vienne parler de harcèlements, d’intimidations, de tracasseries et chercher à s’abriter dans les installations de la Monusco ou dans les ambassades, avec l’espoir d’une exfiltration garantissant un exil souvent en Amérique du Nord et en ex-Europe de l’Ouest. Chacun va devoir assumer.
En toute logique, dès l’instant où le Chef de l’Etat s’est exprimé et a officiellement chargé le Gouvernement de faire sa part dans les enquêtes à ouvrir, les forces politiques et sociales qui se reconnaissent de lui doivent s’en remettre à la Justice et cesser de diffuser des audios et des vidéos pouvant devenir des pièces à conviction.
Convenons-en pour l’heure : ce qui se balance dans les réseaux sociaux a quelque chose de déroutant et de terrifiant…
Omer Nsongo