Finances publiques : Samba Bathily, Solektra et le scandale des lampadaires à 5.200 $/pièce
Solektra, un projet (et non une société) d’éclairage des zones rurales lancé avec le concours du chanteur américain Akon, s’est tapé Usd 13 millions sans aucun appel d’offre, soi-disant pour l’éclairage public à Kinshasa dans un montage digne d’une prédation financière qui laisse des traces d’officiels depuis le ministère des finances. Entre-temps à l’hôtel de ville de Kinshasa, présenté comme porteur du marché, personne ne se souvient d’avoir été intéressé à ce projet qui sent une arnaque à plein tube.
C’est un véritable scandale que ce pot-aux-roses dévoilé par une enquête de l’Inspection Générale des Finances sur le marché de fourniture de 2.500 lampadaires sur un coût total de 13 millions Usd. Jusque-là les bonnes consciences s’offusquent juste du fait qu’à ce jour, seulement 100 de ces 2.500 pièces ont été installées.
Avec cette consolation, tout de même, que l’IGF a réussi, grâce à son enquête, à bloquer le porteur du marché – un suet malien du nom de … – jusqu’à l’installation du dernier lampadaire.
Personne, cependant, ne se donne la peine de disséquer ce marché dans ses chiffres pour y retrouver le vrai scandale qui est caché dans le coût. En effet, 13 millions Usd pour 2.500 lampadaires reviennent à 5.200$ la pièce. Au bout de quelques clics sur le net, l’on peut aisément se rendre compte que ce coût est largement et scandaleusement exorbitant, et que, dans un pays normal, toute la chaîne financière de ce dossier, à commencer par la ville de Kinshasa porteuse de la commande et le Ministre des finances qui a approuvé la facture, devrait avoir déjà été entendu par un officier du ministère public. Ne fut-ce que cela !
Seulement entre 30 et 400$ par lampadaire
Une brève recherche sur internet a permis à Congo Guardian d’établir une estimation plus ou moins exhaustive de ce que devrait coûter un lampadaire clé en main, c’est-à-dire tous les frais compris dont celui de la location de la nacelle et de l’installation. Le coût du lampadaire lui-même varie, selon la qualité, entre 30 et 400 $. Mais en ajoutant d’autres accessoires i=ainsi que la location des véhicules d’installation et les frais d’installation proprement dite, on arrive à plus ou moins 1.000$.
C’est du mois le coût proposé par la société chinoise ZGSM qui est le fournisseur et installateur dans plus de 100 pays à travers le monde.
On peut alors se demander d’où viendrait ce coût de Usd 5.200 alors que le promoteur malien Samba Bathily, qui exige un allègement douanier, parle déjà d’un coût qui serait monté jusqu’à 15.000$. Bref, un chantage stratégique, estime les connaisseurs de ce genre d’arnaque.
Certainement pris au cou après les révélations de l’IGF, Samba Bathily et ses soutiens congolais auraient cherché se dérober de l’attention des services compétents. Mais grâce à la vigilance de l’IGF, la DGM est parvenue à saisir le passeport du malien pour le contraindre à terminer son marché pour lequel il a touché tous les fonds demandés, soit 13 millions Usd.
Solektra, une nébuleuse à cerner
Au-delà du marché proprement dit, les services compétents devront s’intéresser à la société porteuse, Solektra, pour connaître le fin mot de ses compétences dans ce domaine qui vient de lui rapporter, depuis une année, un pactole inespéré de Usd 13 millions. Les recherches de Congo Guardian ont permis d’identifier cette société comme étant un simple projet parmi ceux du groupe ADS du malien Samba Bathily.
Selon des indications sur Wikipedia, ADS (Africa Development Solutions) a été lancée en 2004 par Samba Bathily et serait active, notamment, dans les secteurs du financement de projet et du conseil, des nouvelles technologies, des télécommunications, et des médias, du développement industriel, des énergies renouvelables et de l’accès à l’eau.
Parmi les projets du groupe ADS figure notamment Solektra International, qui a lancé l’initiative Akon Lighting Africa en partenariat avec le chanteur américain Akon. Ce projet vise à promouvoir l’utilisation l’énergie solaire auprès des communautés africaines vivant en zones rurales, afin de leur permettre d’accéder à une énergie propre et durable.
Une frappe financière sur le dos de la ville de Kinshasa
L’autre scandale du projet c’est le montage qui, selon nos sources, aurait été réalisé dans l’entourage du Ministre des finances, Nicolas Kazadi, au nom de la ville de Kinshasa dont les autorités n’ont jamais été consultées. Du moins selon les sources de Congo Guardian.
Sans aucun appel d’offre comme l’exige la loi par rapport à la hauteur du montant, Usd 13 millions ont été mouvementés vers des comptes sans aucun rapport avec la ville de Kinshasa pour exécuter ce marché dont les auteurs réclament curieusement en plus, notamment des exonérations douanières. Pendant ce temps, à part Samba Bathily qui est interdit de sortie jusqu’à la finalisation du projet, aucun officiel congolais n’a encore fait l’objet de la moindre interpellation des services compétents.
Pendant ce temps, les fonctionnaires continuent de broyer du noir et les fronts militaires de souffrir de l’exiguïté des financements. Impensable !
Le dossier est désormais ouvert.
DMK