Intégrité territoriale : Condition sine qua non pour une élection crédible et inclusive
Dans sa livraison N°3121 de février 2023, Jeune Afrique a mis le Président Kagame en relief sur la page de couverture. Une photo énigmatique avec ses propos en légende « je n’accepte pas que le Rwanda soit le bouc émissaire des dirigeants congolais ».
Et pour qu’il n’existe aucun doute sur la volonté réelle du Président rwandais, Jeune Afrique a mis en exergue la déclaration suivante du Président Kagame « La menace que représentent les FDLR peut nous amener à intervenir au Congo sans excuse ni préavis ».
Il n’est pas dans mon intention de répliquer aux propos belliqueux du Président Paul Kagame du Rwanda. Cependant, l’écart entre la réalité des faits et la justification de sa présence au Congo m’amène à fournir à l’opinion quelques éléments d’appréciation à partir de certaines évidences.
1. Aucune action d’agression ou de déstabilisation n’est partie du territoire de la République Démocratique du Congo ou reconnue comme telle ;
2. L’armée rwandaise et les FARDC ont eu à mener des opérations conjointes sur le sol congolais dans le but de mettre fin à la soi-disant menace que représentent les FDLR ;
3. Aucun fait n’a établi de façon certaine l’implication du Pouvoir Tshisekedi dans une quelconque action contre Kagame et le régime rwandais ;
4. La présence des troupes rwandaises sur le sol congolais est établie selon plusieurs rapports indépendants (experts de l’ONU, Human Reight Watch…) ;
5. La connivence entre l’armée rwandaise et le M23 sur le terrain et le territoire congolais est formellement établie et dénoncée par la communauté internationale ;
6. Il n’est organisé aucune chasse aux rwandais ni une rafle contre les paisibles rwandais qui ont choisi d’habiter sur notre terre.
Tous ces faits et évidences éclairent les propos arrogants du Président Kagame de façon particulière et inquiétante. Une déclaration de guerre en somme pour justifier à postériori la présence de ses troupes au Congo, aux côtés du M23.
Si la simple menace putative que représenteraient les FDLR peut amener le Président Kagame à intervenir au Congo sans aucune forme de procès, que dire alors de la légitimité des actions des FARDC contre l’armée rwandaise et ses supplétifs du M23 avec droit de poursuite.
D’où la nécessité et l’urgence d’organiser une conférence des amis du Congo dans le but de contribuer à l’effort de guerre et d’acquérir les armes performantes en vue de bouter hors du territoire national les troupes terroristes M23 et leurs complices de l’armée rwandaise. Qui veut réellement mettre fin à l’agression rwandaise est tenu moralement de mettre la main à la poche.
À cet effet, la République Démocratique du Congo devrait mobiliser certains partenaires particuliers et stratégiques dont le Nigeria que Mobutu a soutenu par son aviation durant le règne de Yakubu Gowen dans la guerre contre le Biafra en vue de préserver son unité ; le Tchad où des soldats zaïrois sont intervenus dans la bande d’Aozou contre les troupes de Kadafi avec des armements de pointe comme les avions mirage ; Le Sénégal dont Mobutu a eu à supporter pendant au moins 2 ans le paiement de ses fonctionnaires pour soulager ce pays ; ou encore la Turquie, la Belgique et les USA réputés alliés stratégiques du Président Tshisekedi et qui reconnaissent la réalité de l’agression rwandaise. Sans bien sûr oublier le Maroc que la République Démocratique du Congo de n’a cessé de soutenir dans son combat contre le front Polisario depuis Mobutu.
Participer activement à cette rencontre est une obligation morale de tous les États qui croient en la démocratie comme facteur de développement et d’intégration régionale.
Car au-delà de la lutte pour l’intégrité du territoire, cette guerre est une guerre pour les valeurs démocratiques qui structurent et gouvernent tout État moderne, à savoir le non recours à la force soit pour accéder au pouvoir soit pour revendiquer un droit et le respect de la légalité.
En âme et conscience, le Président Kagame ne peut donc évoquer une raison plausible pour légitimer et officialiser la présence de ses troupes en République Démocratique du Congo. Au contraire, sur la base du principe « légitime défense contre légitime défense ne vaut », c ’est le Congo qui a légitimement le droit d’intervenir contre le Rwanda sans excuses ni préavis avec droit de poursuite.
Grands acteurs de la vie politique internationale de l’Antiquité, les romains, ne disaient-ils pas « SI VIS PACEM PARA BELLUM » si tu veux la paix prépare la guerre. La seule différence est que la République Démocratique du Congo n’est plus au stade de préparer la guerre, mais de faire résolument la guerre pour avoir la paix sur son territoire en créant une zone tampon au Rwanda pour sécuriser sa frontière.
Mais d’où le Président Kagame tire-t-il son assurance et cette arrogance qui lui garantiraient l’invulnérabilité vis-à-vis de toutes les initiatives congolaises ?
Est-ce l’indéfectible attachement de ses complices de la communauté internationale ? Est-ce la conscience de la supériorité de ses armements ou la prétention de l’incapacité des congolais à atteindre ou à inquiéter le Rwanda ?
La réponse à ces questions et à tant d’autres semblables sur les raisons de l’imperturbabilité du Président Kagame malgré les victoires diplomatiques du Président Tshisekedi devrait être la première assignation qui pourrait permettre au Congo en un premier temps de neutraliser l’énigmatique résident des mille collines avant de passer à une offensive victorieuse, gage d’une paix durable et d’une accalmie structurelle dans la sous-région.
Sans trop creuser, n’est-il pas raisonnable de penser que sa sérénité dans la tourmente actuelle pourrait provenir de sa supériorité dans la guerre de l’ombre.
La République Démocratique du Congo aurait tout intérêt à se livrer corps et âme dans la guerre de l’ombre pour espérer inquiéter durablement le trouble-fête des mille collines et faire bouger les lignes.
Seule cette guerre d’intelligence pourrait consolider le leadership national du Chef de l’État dans la conduite de la guerre et des actions diplomatique sur fonds de cohésion nationale pour une victoire certaine et rassurante.
Dans les circonstances actuelles, les élections constituent-elles une priorité absolue et un gage de paix ?
Ne vaut-il pas mieux garantir l’existence de la République Démocratique du Congo en éloignant, de façon décisive, le spectre de la balkanisation que les élections pourraient alors légitimer ?
Les philosophes n’ont-ils pas raison de proclamer haut et fort « PRIMUM VIVERE DEINDE PHILOSOPHARI ». Assurer d’abord l’existence de la République Démocratique du Congo avant de s’adonner à des calculs politiciens sur les élections ! Organiser les élections dans les circonstances actuelles ne serait-ce pas cautionner la balkanisation en cours et en progression au Kivu et dans l’Ituri ?
Le vrai débat de conscience pour la République Démocratique du Congo et la vraie question aujourd’hui n’est pas à quand les élections mais bien « TOBE or not to be ». C’est-à-dire la nécessité absolue d’assurer l’intégrité et la sécurité du territoire national avant toutes spéculations et supputations politiciennes.
Bref, seule force de frappe dissuasive de nos armées pourraient amener et garantir une paix durable à nos frontières et tempérer l’ardeur et la convoitise de certains voisins. La prise de LUBAYA ne se situe-t-elle pas dans cette logique ?
Qui vivra verra !
Ambassadeur André-Alain ATUNDU LIONGO