La grande tragédie du MAE algérien : entre hypocrisie et paranoïa  

L’Algérie, ce pays au cœur lourd de ses gloires passées, se débat aujourd’hui dans une valse diplomatique pathétique. Le dernier acte en date ? Une condamnation vigoureuse et théâtrale de la décision française de soutenir le projet d’autonomie du Sahara occidental. Un communiqué indigeste et pompeux, publié par le ministère des Affaires étrangères algérien, qui se noie dans une rhétorique de victimisation et de complotisme digne des meilleures heures de la Guerre froide.

Pour bien comprendre la réaction outrancière d’Alger, il faut se rappeler que les relations algéro-françaises sont marquées par un mélange toxique d’amour-haine. Chaque geste diplomatique, chaque mot prononcé par Paris est disséqué avec la précision d’un chirurgien paranoïaque. Cette fois-ci, la France a eu l’outrecuidance de soutenir une résolution qui déplait aux généraux d’Alger, déclenchant une tempête de protestations indignées.

Le gouvernement algérien, fidèle à sa tradition d’exagération, qualifie ce soutien de « décision imprévue, inappropriée et injustifiée », comme si la France avait soudainement décidé de revivre ses heures coloniales. Le communiqué algérien dénonce une « continuité des politiques coloniales », et là, on touche au sublime. Alger, coincée dans une boucle temporelle, voit des colons et des impérialistes partout, oubliant peut-être que nous sommes en 2024, pas en 1962.

Spectacle de la victimisation, véritable crainte d’Alger

La posture victimaire est devenue une spécialité algérienne. Le régime aime se poser en défenseur ultime des droits des peuples à l’autodétermination, tout en fermant les yeux sur ses propres contradictions. Il n’est pas nécessaire de rappeler l’histoire de la Kabylie ou des contestations internes écrasées sous la botte militaire. Mais, pourquoi s’embarrasser de cohérence quand on peut crier à l’injustice internationale ?

Ce qui terrifie réellement Alger, ce n’est pas tant le soutien français à la marocanité du Sahara, mais la perte de son monopole narratif dans la région. Le rapprochement entre le Maroc et la France met en lumière l’isolement diplomatique croissant de l’Algérie. À force de voir des complots partout, le régime s’est aliéné des alliés potentiels, préférant se complaire dans une posture de résistance solitaire.

Ironie tragique

En fin de compte, le véritable drame algérien réside dans son incapacité à évoluer. Les généraux, accrochés à leur pouvoir, orchestrent une symphonie de lamentations et de revendications obsolètes. La France continuera à tracer sa propre voie diplomatique, le Maroc à renforcer ses alliances, et l’Algérie à se noyer dans ses propres illusions. Ce communiqué, ultime expression de sa dérive paranoïaque, ne changera rien à l’affaire. Le monde avance, mais l’Algérie reste tragiquement figée dans le passé.

Hespress Français a sollicité Mohamed Talib, membre du Conseil royal consultatif pour les affaires sahariennes (CORCAS), pour une lecture de cet évènement pour le moins abracadabrant. C’est à bâtons rompus qu’il nous éclaire sur cette situation invraisemblable.

Mohamed Talib : Pour ma part, cet évènement est une faillite diplomatique d’un État dont le système de gouvernance est en train de mourir à petit feu. C’est bête et malheureux, d’autant plus que ce pays siège au Conseil de sécurité de l’ONU en tant que membre non permanent. Aussi, s’adonner à des petites guéguerres qui ne veulent rien dire est indigne. Cela dit, ce n’est là que la version algérienne, la France n’a encore rien dit.

Si l’on s’en tient à ce chiffon d’insultes du communiqué, loin de toute langue et touche diplomatique et qui “ô surprise” a été retiré du site, ce seraient là des pourparlers en interne entre deux pays. Mais, le ministère des Affaires étrangères algérien, pour, je ne sais quelle raison, a vendu la mèche et rédigé un communiqué tout d’insultes.

D’autant plus que cette position française sur le Sahara marocain, déplorée par le régime algérien, c’est celle de la France depuis 2007. Cette dernière a toujours soutenu et considéré que la proposition marocaine d’autonomie est une proposition crédible et sérieuse et que c’est une base solide pour clore ce différend régional. Ce sont d’ailleurs les recommandations du Conseil de sécurité des Nations unies.

Pour sa part, les attentes du Maroc envers la France ne sont ni plus ni moins qu’une sortie de cette zone grise dans laquelle elle se trouve actuellement à trop vouloir ménager le chou et la chèvre. Sa Majesté le Roi Mohammed VI, dans son discours historique, avait indiqué que le Maroc ne voyait ses relations internationales ou bilatérales avec les pays qu’avec des lunettes de l’intégralité territoriale du Royaume et de ses droits historiques sur ses terres.

De la France donc, on ne s’attend pas à une reformulation de son soutien au plan de l’Autonomie, car c’est un plan qui est crédible, sérieux, qui a l’appui du Conseil de sécurité des Nations unies et qui souligne l’importance de cette proposition considérée comme une solution viable pour clore ce différend régional sur l’intégralité et le développement de notre pays.

On s’attend de la France, à plus que ça, à travers une déclaration courageuse, à savoir la reconnaissance de la marocanité du Sahara sans équivoque. La France est le pays qui connaît bien les rouages de l’histoire dans cette région en tant que pays ex-colonisateur en Afrique du Nord. Elle a en sa possession les archives, les cartes, elle a tout. La République française est appelée à un acte courageux et il lui est tout simplement demandé de rester fidèle à ses grands principes et à ses engagements moraux, politiques…

Personnellement, je ne comprends toujours pas cette attitude algérienne avec ce fameux communiqué, retiré, au demeurant un laps de temps plus tard, après avoir été diffusé, du site du ministère des Affaires étrangères. C’est à se demander qui gouverne qui et quoi dans ce pays voisin. On a l’impression que c’est un navire voguant sans gouvernail vers le chaos. À Alger, c’est toujours la fuite en avant. Mais, le contexte actuel en Algérie prête à toute interprétation. Les élections approchent et les militaires se font plus pressants.

Mohamed Talib conclura ses dires d’une note autant pathétique que bouffonne : Avec le dernier décret présidentiel ouvrant aux militaires des postes civils dans les Institutions publiques, on peut aisément imaginer que ce communiqué a été écrit par un caporal algérien et non pas un diplomate, au regard de la langue vulgaire et musclée utilisée. On peut y voir le premier acte de la nouvelle stratégie du décret, à travers un caporal nommé aux MAE rédigeant son premier communiqué.

Mohamed Jaouad EL KANABI