Nomination d’une Marocaine à l’UA: la réponse cinglante de l’UMA à la diplomatie algérienne
Dans un communiqué au vitriol rendu public ce mardi 18 avril 2023, le secrétariat général de l’Union du Maghreb arabe répond point par point aux attaques hystériques de la diplomatie algérienne contre la nomination, actée jeudi dernier, de la Marocaine Amina Selmane en tant que représentante permanente de l’organisation auprès de l’Union africaine. Et de rappeler ses vérités à un riche régime algérien qui ne s’acquitte même plus de ses engagements financiers envers l’organisation régionale. Voici ses arguments, et c’est du béton.
La réaction, sous forme de communiqué, a eu lieu ce mardi 18 avril 2023, soit cinq jours après la réception accordée par le président de la Commission de l’Union africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, au siège de l’organisation panafricaine à Addis-Abeba à la Marocaine Amina Selmane, venue lui présenter ses lettres de créance en tant que représentante permanente de l’Union du Maghreb arabe (UMA) auprès de l’UA. Elle intervient également deux jours après un communiqué à travers lequel la diplomatie algérienne réagissait avec violence à cette nomination, s’attaquant en des termes très peu diplomatiques tant au secrétaire général en exercice de l’UMA, le Tunisien Taïeb Baccouche, qu’au même Moussa Faki Mahamat.
Pour le pouvoir algérien, la nationalité de la nouvelle représentante permanente de l’UMA à l’UA ne passe pas et tous les moyens, et invectives, sont bons pour laisser éclater une inextinguible rage. La vérité est cependant ailleurs et c’est le communiqué du secrétariat général de l’UMA qui est venu la rétablir. Et c’est une véritable leçon tant de finesse diplomatique que de précision.
Une décision qui remonte à 2018
Dans sa missive, le secrétariat général de l’UMA commence d’abord par se féliciter de l’ouverture de sa représentation au sein de l’UA. Une décision «qui a fait l’objet d’un accord avec le président de la Commission de l’UA Moussa Faki Mahamat en janvier 2018», rappelle le communiqué. Cet accord a fait l’objet d’une large information «sans que nul n’y oppose de réserve». Son exécution a néanmoins été suspendue suite à la pandémie du Covid-19. Ce n’était que partie remise et «nous avons enfin pu nommer la directrice des affaires économiques au secrétariat général de l’UMA, dans un contexte où les Communautés Economiques Régionales (CER) sont considérées par l’Union Africaine comme ses piliers essentiels dans la mise en œuvre de l’Agenda 2063 de l’Union Africaine, notamment en matière d’intégration économique continentale, dont le préalable est l’intégration régionale», souligne le communiqué.
Contrairement aux assertions de la junte, voulant que le mandat de Taïeb Baccouche à la tête de l’UMA ait pris fin le 1er août 2022 (et qu’il n’a donc plus qualité à procéder à une telle nomination), le communiqué indique que cette décision a coïncidé avec le prolongement dudit mandat, «Taïeb Baccouche ayant à maintes reprises demandé à ce qu’un successeur soit désigné», lit-on. La dernière occasion en date a d’ailleurs été la tenue à Alger, les 1er et 2 novembre 2022, du Sommet de la Ligue arabe. En guise de réponse, «la partie organisatrice (l’Algérie, NDLR) a omis de l’y convier pour ce faire, même si (Baccouche) a reçu une invitation officielle de la part du secrétaire général de la Ligue arabe pour y assister».
Des engagements financiers non honorés depuis 2016
Répondant au prétendu «attachement» exprimé dans le communiqué de la diplomatie algérienne à l’UMA, le secrétariat général de cette organisation rappelle que des cinq pays composant le Maghreb arabe, seule l’Algérie manque à l’appel de ses engagements. Si le Maroc, la Tunisie, la Mauritanie et la Libye sont à jour de leurs contributions financières jusqu’en 2022, l’Algérie elle n’a pas honoré les siennes depuis 2016. Mieux, Alger «a retiré tous ses diplomates accrédités à l’UMA, dont le dernier a quitté ses fonctions en juillet 2022. Tous ont joui de leurs droits et solde en puisant dans les contributions des autres Etats membres», indique le document. «Nous espérons que l’attachement témoigné par l’Algérie se concrétise par le règlement du restant dû et par le retour des diplomates rappelés», souhaite, non sans cynisme, le secrétariat général de l’UMA.
Mensonges et calomnies
Le communiqué insiste sur l’absence de toute réserve algérienne quant à toutes les initiatives prises par le secrétaire général de l’UMA jusqu’ici, et ce, en dehors de la récente nomination. Il déplore également le fait que la diplomatie algérienne ait qualifié ce dernier d’«ancien secrétaire général», en sachant que les plus grands hommes d’Etat algériens se sont toujours, bien après le 1er août 2022 et dans des messages écrits, adressés à lui en son nom et sa fonction (de secrétaire général en exercice). Le communiqué compte au moins neuf messages, dont un du ministre algérien des Affaires étrangères, un autre du Premier ministre et encore un autre du président de la République algérienne.
Dans son communiqué, le secrétariat général de l’UMA regrette également l’attaque algérienne contre Moussa Faki Mahamat, qualifié, entre autres, d’«irresponsable» par la diplomatie algérienne alors que son seul tort est d’avoir appliqué l’article 20 de l’accord entre l’UA et les huit organisations régionales du continent. Amina Selmane, de par ses fonctions passées en tant que directrice des affaires économiques au secrétariat général de l’UMA sur lesquelles elle a prêté serment, relève, elle, de la diplomatie maghrébine et elle travaille désormais à l’échelle du continent et sous les auspices du président de l’UA, souligne le communiqué. Sa nationalité marocaine est tout simplement un non-sujet. Même si la junte et ses relais ne l’entendent pas de cette oreille.
Par Tarik Qattab