Partis politiques : dites d’abord la vérité au ‘Peuple’ sur Berlin 1885 et les Usa avant de l’envoyer dans la rue !
Autant dans la Constitution (article 6) que dans la Loi n°04/002 du 15 mars 2004 régissant les partis politiques (article 2), le législateur confie aux partis politiques la charge de la formation civique de leurs membres. On ne connaît pas au pays un seul parti à avoir un programme de formation civique basée sur l’Histoire. Déjà, on doit se mettre d’accord sur le fait qu’avant de connaître ses droits et ses devoirs, il faut appartenir à une entité appelée Etat. Et l’Etat, on ne le défend mieux que lorsqu’on en connaît l’Histoire. Tout au moins les grandes lignes. Mettre alors dans la bouche des militants, en prévision des manifestations publiques, des noms des personnages puissants comme Kimpa Vita, Kimbangu, Ngongo Lutete et autres Lumumba sans cependant les édifier sur leurs rôles respectifs dans l’Histoire du pays n’est ni plus, ni moins que de la démagogie…
Rdc, pays appartenant aussi aux USA ? aïe !
L’Histoire du Congo n’est rien d’autre que celle d’une compilation des traités de protectorat conclus entre, d’un côté, les émissaires du roi des Belges Léopold II et, de l’autre, les empereurs, rois et chefs qui ne se connaissaient pas, tout au moins dans leur majorité. Parmi les plus célèbres des émissaires : le britannique naturalisé américain Henry Morton Stanley et le britannique David Livingstone.
Aucun des émissaires ne disait aux souverains noirs qu’en signant les traités, ils perdaient illico leurs pouvoirs sur leurs entités au profit d’abord de l’AIA en 1876, ensuite de l’EIC en 1885, enfin du Congo-Belge en 1908 et de la République du Congo en 1960.
Certes, dès l’instant où l’existence de l’Etat Indépendant du Congo avait obtenu l’acte juridique
de son existence, il est facile de décréter l’abrogation des traités de protectorat. Mais, l’Histoire, elle, est faite aussi des liens mystiques auxquels on ne renonce que par réparation avec la descendance bien identifiée.
Dans cette logique, les États-Unis – qui sont une création de l’Europe – ont posé des actes de réparation.
En est-il le cas pour le Congo ? On peut en douter.
L’Histoire du Congo doit être correctement enseignée par les formations politiques pour permettre aux militants de savoir à quoi s’en tenir lorsqu’ils sont mobilisés pour une cause pouvant être juste, parfois non ! Cas des manifestations publiques en organisation devant les ambassades des États-Unis et de la Grande Bretagne RDC, pays que certains Américains considèrent comme appartenant aussi aux USA !
Aïe ! Que venons-nous de dire ?
Apport de Washington à Kinshasa
La vérité à dire aux Congolais est que les États-Unis sont pour beaucoup dans la formalisation de l’existence de l’Etat congolais.
En 2019, la Fondation Roi Léopold II a rappelé le fait qu’à chaque moment solennel de son histoire, «*la République Démocratique du Congo a toujours pu compter sur le puissant et loyal concours des États-Unis d’Amérique».
Elle a révélé que la RDC «avait trouvé aux États-Unis d’Amérique des collaborateurs de premier ordre pour occuper et rassembler en un seul bloc tous les territoires d’Afrique qui contiennent des ressources naturelles, qui sont utilisées aujourd’hui pour les besoins des inventions scientifiques…», mettant en exergue l’apport de Washington à Kinshasa au travers de «son exploration, son occupation, sa fondation, son développement économique et son progrès social».
1869, dit-on ? C’est-à-dire bien avant la Conférence de Berlin de 1885 ?
La Fondation va ajouter au chapitre « PIONNIERS AMÉRICAINS » deux faits édifiants.
Premier fait : «Le Général Américain Henry Shelton Sanford, ancien Ministre Plénipotentiaire des États-Unis d’Amérique au Royaume de la Belgique, avait apporté un puissant secours au Royaume de la Belgique pour organiser, envoyer des expéditions d’occupations scientifiques en République Démocratique du Congo, et pour constituer l’Association Internationale du Congo. Le 20 Janvier 1879, un groupe des Américains recommandés par le Lieutenant Américain Stanley avait pris du service au Comité d’Étude du Haut Congo».
Second fait : «Le 22 août 1879, le pionnier Américain Auguste Sparhawk avait été chargé par le Lieutenant Américain Stanley de poser la première pierre de construction de la République Démocratique du Congo. Toute l’équipe se mit à l’œuvre pour construire la route des caravanes tout le long des cataractes du fleuve Congo, construire les postes d’occupations hospitalier et implanter les stations scientifiques. C’était un vrai travail de titans, beaucoup des pionniers Américains succombèrent à la tâche sur les territoires de la République Démocratique du Congo. Dès Mars 1880, la maladie et la mort avaient fait des coups sombres parmi les pionniers Américains. Mais le 22 Avril 1880, la construction de la première station scientifique et du premier tronçon de la route des caravanes de VIVI-MAKAYA-MAKULA, avaient pris fin ».
À prendre en compte dans toute analyse des relations Rdc-Usa
Il y a lieu, en plus, de souligner le fait que la Conférence de Berlin en 1885 est la première réunion internationale à laquelle les États-Unis avaient pris part depuis leur création en 1776, conférence ayant donné lieu à l’Accord général ouvrant le Bassin du Congo au commerce international.
Autre fait à noter : pour n’avoir pas entériné Berlin 1885 consacrant pourtant le partage de l’Afrique entre puissances coloniales, Washington n’a jamais reconnu la colonisation de l’Afrique. D’où cette déclaration surprenante et provocatrice faite à Dakar, dans la foulée de la Perestroïka en 1989, selon laquelle le tour des Américains était venu de gérer l’Afrique, rapporte Honoré Nbganda dans son ouvrage «Ainsi sonne le glas ! Les derniers jours du maréchal Mobutu ».
Mais, 45 ans plus tôt, après avoir utilisé l’uranium de Shinkolobwe pour mettre fin à la Seconde guerre au détriment du Japon (Hiroshima et Nagasaki), les Américains vont peser de tout leur poids pour accélérer l’indépendance du Congo Belge. Ils vont tellement y veiller qu’ils s’opposeront à toutes les guerres imposées au pays (sécessions katangaise et kasaïenne en 1960, rébellion lumumbiste en 1961, mutinerie des mercenaires à Bukavu en 1967-1968, guerres du Shaba 1 et du Shaba 2 en 1977 et 1978, avant, curieusement, de soutenir la guerre de l’Afdl en 1997 et d’être soupçonnés de connivence dans toutes les autres guerres (Rcd en 1998, Cndp en 2008, M23 en 2013, encore M23 en 2022).
Pourtant, le 5 novembre 1997, intervenant devant le congrès américain, l’ambassadeur Bill Richardson (décédé le 1er septembre 2023) avait fait la déclaration suivante, extraite de l’ouvrage de Patrick Mbeko « Stratégie du chaos » : «*La République Démocratique du Congo revêt une très grande importance pour les intérêts des Etats-Unis en Afrique. (…) La RDC est essentielle pour ce qui est des intérêts américains, parce qu’elle est appelée à devenir le moteur de la croissance en Afrique centrale, en raison de sa situation stratégique. La RDC constitue un pont entre les pays en développement de l’Afrique australe et orientale, et des pays pauvres d’Afrique centrale. (…) La RDC offre des possibilités immenses pour ce qui est de son développement économique et des investissements américains : elle possède 13 % des réserves hydroélectriques du monde, 20 % des réserves de cobalt au monde, 18 % des réserves de diamant à usage industriel au monde, 6% des réserves de cuivre du monde, des sols fertiles pour l’agriculture…et enfin la moitié des forêts tropicales d’Afrique».
Ce sont-là des faits indéniables à prendre en compte dans toute analyse des relations entre Kinshasa et Washington.
D’où l’impératif de se doter d’une diplomatie calibrée
A partir de cet instant, la question tenant du rationnel est de savoir comment un pays qui, à la fois, présente et représente un intérêt stratégique pour les États-Unis peut-il être traité pour moins que rien, comme cela est visiblement le cas.
Car, au cours de ces 40 dernières décennies, l’Histoire de la RDC est celle d’un pays en désinvestissement continu planifié par les Occidentaux, pays à souveraineté contrôlée, pays empêché de bénéficier même d’investissements chinois, russes, iraniens etc.
Certes, l’Etat a multiplié des bavures depuis 1960. Notamment avec des initiatives politiques, économiques et socioculturelles l’ayant éloigné des normes établies. Des initiatives au départ nobles mais qui, à la longue, se sont révélées catastrophiques.
Est-ce cependant une raison valable pour le condamner au point, pour certains « décideurs », de repasser sur lui une nouvelle latte après Berlin I réclamée par… le Rwanda de Kagame ?
Devant tant d’incohérences, c’est à la RDC de savoir, tout compte fait, capitaliser ses atouts en ce que, malgré les infortunes, elle garde des ressources humaines laborieuses et n’en continue pas moins de posséder des réserves hydroélectriques, des réserves de cobalt, des réserves de diamant à usage industriel, des réserves de cuivre, des sols fertiles pour l’agriculture…et enfin de la moitié des forêts tropicales d’Afrique qui en font le rendez-vous incontournable en Afrique. Déjà, la télédétection lui permet d’être réellement « Pays-solution ». D’où l’impératif de se doter d’une diplomatie calibrée.
Que faut-il entendre par là ?
Au cours de ces six dernières décennies, la RDC a réalisé l’exploit de se doter d’un capital humain constitué de compatriotes capables de concevoir et de définir cette diplomatie.
Il y a lieu de les mobiliser. Leur recrutement doit obéir à l’unique exigence de l’expertise d’autant plus qu’il n’y a pas que les Occidentaux à convaincre du bien-fondé des revendications de la RDC.
Il y a aussi les Orientaux qui, eux, ont besoin d’être rassurés pour que l’Histoire des années 1880 commencée autour de Berlin ne se répète pas au détriment des Congolais en 2080.
Moralité : revendiquer ses droits nécessite plus des chuchotements autour d’une table ronde que des cris d’orfraie dans la rue…
“La rue ne gouverne pas”, dixit ATM.
Omer Nsongo die Lema