Rdc : la lourde tâche de Kamerhe pour la deuxième victoire de Tshisekedi à la présidentielle !
A juste titre, on le reconnaît et le surnomme « coach » -à l’exemple de l’ancien sélectionneur des Léopards, Florent Ibenge, auteur des prouesses avec le Onze national entre les années 2014 et 2019 – par le parti au pouvoir, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).
Cette reconnaissance a collé à la peau de Vital Kamerhe dès le lendemain de la victoire du ticket « Fatshivit », qu’il a personnellement composé avec Félix Tshisekedi, à la présidentielle de décembre 2018.
En cette année-là, des acteurs majeurs de l’Opposition congolaise avait rendez-vous à Genève, en Suisse, pour désigner un candidat commun avec comme objectif: renverser le régime Kabila.
La grand-messe s’est vite muée en messe basse contre certains leaders dont Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe. Les deux avaient alors résolu de se retirer de l’accord de Genève pour signer, à un mois de la présidentielle, un nouvel accord à Nairobi, donnant naissance au mémorable « Cap pour le changement (CACH) ».
Au nom de cet accord, Vital Kamerhe s’était non seulement effacé de la course à la présidentielle au profit de Félix Tshisekedi, mais a aussi implémenté des stratégies soigneusement pensées pour garantir la victoire de son partenaire face au dauphin de l’ancien président. Il est alors l’unique à croire en la victoire de Félix Tshisekedi, ragaillardi par la noblesse de la lutte de l’UDPS durant plus de 30 ans dans l’Opposition et l’expérience de gestion des affaires d’État de Vital Kamerhe.
Assuré d’être Premier ministre de Félix Tshisekedi, conformément à l’accord de Nairobi, le leader de l’UNC n’avait pu mieux obtenir qu’un siège de directeur de cabinet du Président élu, Félix Tshisekedi, faute pour ce dernier de remporter la majorité parlementaire.
En toute humilité, VK, réputé pour son sens de s’oublier pour l’intérêt général de la nation, s’est employé à servir le désormais Chef de l’État, pas qu’un simple partenaire.
Il a été stoppé dans son élan d’organiser le bureau du président quand en avril 2020, au fort de la crise de Covid-19, Kamerhe est arrêté, emprisonné puis condamné à 20 ans de prison, accusé d’avoir détourné des fonds publics destinés à la construction des maisons des militaires. Des accusations « montées de toute pièce et rejetées en bloc » par sa défense.
Deux ans après, Kamerhe est acquitté après que la justice a reconnu des erreurs dans ses enquêtes, tentant ainsi d’effacer les humiliations subies par Kamerhe et sa famille tant biologique que politique.
Après sa condamnation, Vital Kamerhe, selon des observateurs, était attendu à bras ouverts dans l’Opposition, tant Félix Tshisekedi avait été présenté comme l’instigateur de cette affaire politico-judiciaire.
Kamerhe a déjoué le pronostic. Il est resté égal à lui-même et surtout loyal envers le Président de la République, en lui renouvelant la confiance lors du mini congrès de l’UNC, tenu à Kinshasa en 2023.
En ce moment, chaque camp politique s’apprête à affronter les joutes électorales du 20 décembre dernier. Vital Kamerhe, également reconnu faiseur des rois pour son sens aiguisé de conduire les campagnes présidentielles, est curieusement absent de l’équipe de campagne du candidat Félix Tshisekedi, qui brigue alors un second mandat.
Loin d’être un motif de découragement, Kamerhe s’est offert un nouveau rôle, hautement stratégique, qui lui a valu le surnom : « Monsieur équipe d’avance ».
Alors que le périple électoral du candidat de l’Union sacrée est à l’étape de Grand Équateur, des failles, décelées par VK, l’ont contraint de précéder l’équipe officielle dans différents coins du pays, balisant, à l’instar de Jean-Baptiste, la voie du Messi congolais, Félix Tshisekedi.
En « Mushi » prévoyant et avisé, Kamerhe, quoi que son fief naturel se trouve dans le Sud-Kivu, a mobilisé dans le Grand Bandundu, limitrophe de la capitale, Kinshasa, à Kisangani, dans le Kivu, etc. Par son action, estiment des observateurs, Kamerhe a évité des surprises désagréables au Président Tshisekedi en mettant en mal la stratégie de ses adversaires politiques. Il a réussi le pari de ranger la population derrière le candidat de l’Union Sacrée de la Nation par sa conquête des coins et recoins du pays, garantissant à Félix Tshisekedi une large victoire, confirmée depuis le vendredi 31 décembre par la CENI. Une victoire qui ne souffre d’aucune contestation après que la mission d’observation électorale des églises catholique et protestante a, dans son rapport sur les élections, reconnu qu’un candidat (dont le nom n’a pas été dévoilé mais qui renvoie à n’en point douter à Félix Tshisekedi) a remporté plus de la moitié des suffrages exprimés, créant une importante distance avec son premier poursuivant.
En un temps record, l’animal politique Vital a parcouru deux provinces (Kwango et Kwilu), plus de 35 villages, trois grandes villes (Kenge, Kikwit, Bandundu ville), de nombreux territoires et groupements.
La consolidation des acquis, thème de campagne du candidat n°20, a été associé, au cours du safari de Kamerhe, à la volonté politique de l’«humain» Tshisekedi de voir un Congo uni, prospère et développé.
L’Est de la RDC au cœur des enjeux électoraux !
La guerre qui persiste dans l’Est, avec l’occupation de certains territoires congolais par des rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, a occulté certaines grandes réalisations de Félix Tshisekedi lors de son premier quinquennat.
L’énigmatique question de la guerre d’agression rwandaise à travers leurs supplétifs du M23, doublée d’interminables promesses sans résultats palpables sur le terrain, semblait décourager et rendre le Kivu hostile à la candidature de Félix Tshisekedi pour un second mandat.
Aussitôt blanchi par la justice et pendant que d’aucuns envoyaient Kamerhe dans une opposition radicale contre Félix Tshisekedi, le leader de l’UNC avait mené, en septembre 2022, une tournée, baptisée « Amani -la paix- », dans l’Est pour entre autres jauger de sa popularité.
Il parcourt tout l’Est en se rendant jusque dans des coins sensibles. A une année des élections, la mission s’est révélé stratégique pendant la campagne électorale quand il est retourné vers la même population, sollicitant qu’elle vote pour Félix Tshisekedi.
Lors de sa tournée de septembre 2022, Kamerhe avait réussi à convaincre la population de la détermination de Félix Tshisekedi à pacifier l’Est, non sans manifester sa compassion face à la crise économique qui frappait plusieurs zones du Nord-Kivu dès les premières attaques des terroristes du M23.
«Plusieurs zones du Nord-Kivu devraient être déclarées zones sinistres pour alléger la souffrance de la population, c’est-à-dire suppression des taxes et impôts que le gouvernement fait payer aux opérateurs économiques », avait-il plaidé.
La théorie de l’œil du cyclone a servi d’option politique comme remède à la guerre.
Kamerhe n’a rien improvisé
Quelques mois après la tournée Amani, les Forces de l’EAC (Communauté de l’Afrique de l’Est) ont été déployées à l’Est de la RDC pour traquer et neutraliser les M23.
Ces forces, formées par les armées de tous les pays de l’EAC excepté le Rwanda, ont montré leurs limites pour avoir opéré en désaccord avec la vision des autorités congolaises.
De quoi donner aux opposants des sujets de contre campagne et faire le lit des critiques les plus acerbes. L’Est, dans ce contexte, a été la destination privilégiée des opposants, notamment Moïse Katumbi, alors présenté comme principal challenger de Félix Tshisekedi à la présidentielle 2023. Que faire devant ce dessin de l’échec cuisant ?
Sous sa casquette de ressortissant de Kivu, Kamerhe a mesuré toutes les sensibilités liées à cette question de guerre d’agression avant de s’offrir en « holocauste ». Bien que déstabilisé par le discours des opposants pour sa gestion de cette question sensible, Tshisekedi a su remonter dans le sondage, déjà à l’étape de Kisangani, fin novembre, où Vital Kamerhe, en première ligne, a démontré son talent de harangueur des foules.
A Kisangani, la population a bravé la nuit tombante pour réserver un accueil plus que chaleureux à Vital Kamerhe.
Sa présence à Kisangani (Tshopo) a permis de tirer un trait sur un conflit intercommunautaire qui a sévi depuis plusieurs mois et opposé les Lengola et Mbole.
Après Kisangani, Kamerhe a soumis Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, devenu le symbole de la résistance contre les guerres d’agression. Il a fait mieux que Moïse Katumbi dont le passage à Goma a été un flop, selon des observations concordantes.
VK, par la suite, a conquis Beni, Oïcha, Butembo, Lubero, toujours au Nord-Kivu, avec la même détermination de garantir la réélection du président Félix Tshisekedi.
La stratégie de VK a inspiré d’autres leaders de l’Union Sacrée qui, à leur manière, ont aussi mené des actions de terrain en faveur de la victoire de Félix Tshisekedi à la présidentielle.
Telle la pluie du matin, cela a réjoui Kamerhe mais ne l’a pas arrêté dans sa démarche de conquête de l’électorat au profit de son partenaire de CACH.
Il est allé ensuite à l’assaut du Sud-Kivu, parcourant tous les six territoires : de Fizi à Idjwi, en passant par Kabare, Kalehe, Mwenga et Shabunda. A cela s’ajoutent les deux villes sud-kivutiennes, à savoir Bukavu et Uvira.
Kamerhe, ayant compris que son candidat président ne pouvait pas arriver jusqu’aux recoins du Sud-Kivu, s’est donné la peine de porter le message de Tshisekedi aux populations des coins les plus reculés de cette province. Dans chaque territoire, il a visité plus d’une localité, enchaînant des meetings sans se lasser.
Dans le territoire de Kabare par exemple, VK a été à la rencontre des Congolais de Mudaka, de Bugorhe, de Miti, de Luhihi. A Mudusa, Lugendo, Mumosho, Ishungu, Kavumu jusqu’à Kalengera, porte d’entrée de Bukavu, VK s’y était rendu pour appeler à voter Félix Tshisekedi.
La province de l’Ituri, ciblée par l’actuel VPM à l’Economie, s’est aussi retrouvée dans l’escarcelle de Kamerhe. Cette province, déchirée par l’activisme des groupes rebelles et terroristes, notamment les ADF-Nalu, a été consolée par Kamerhe qui a démontré comment la mesure d’Etat de siège a tenté de priver ces organisations criminelles de certains de leurs revenus. Une stratégie pour les affaiblir au profit d’un retour progressif de la paix.
Voilà comment Kamerhe, à l’image d’un cordon bleu, a fait une recette ayant dégagé la voie pour l’avènement de la victoire de Félix Tshisekedi, confirmée provisoirement par la CENI depuis le 31 janvier dernier et savourée par les populations congolaises de tous les coins dès son annonce. Le Congo a gagné !
Par Edmond Izuba