Situation actuelle à la Réserve de Faune à Okapis: Un appel à la préservation lancé

Le village Epulu est l’un des joyaux dispersés au cœur de la Réserve de Faune à Okapis (RFO). C’est dans ce village que l’Américain Patrick Putnam, hôtelier de profession, s’était consacré à capturer et à étudier la faune exceptionnelle de la région, incluant l’Okapi et d’autres espèces rares telles que le chimpanzé et divers singes. Depuis lors, Epulu est devenu un symbole de la riche biodiversité de la région et de la fascinante interaction entre l’homme et la nature.

La RFO, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO pour ses trésors biologiques incomparables, est surtout renommée pour l’Okapi, une créature énigmatique et emblématique.

Créée par arrêté ministériel n°045/CM/ECN/92 le 2 mai 1992, cette réserve couvre une étendue impressionnante de 1 372 625 hectares, s’étirant sur les provinces de l’Ituri et du Haut-Uélé, et traversant les territoires de Mambasa, Watsa et Wamba. Autrefois, cette terre était un sanctuaire où des voyageurs du monde entier se pressaient pour admirer les Okapis en captivité, convaincus que cette réserve incarnait l’un des plus beaux sites touristiques d’Afrique. Hélas, le 24 juin 2012, ce havre de paix fut brisé par l’attaque sanglante d’un groupe armé, mené par le tristement célèbre Morgan, qui massacra les quatorze Okapis présents dans le zoo d’Epulu, plongeant le monde de la conservation dans une stupeur tragique.

Si la RFO demeure une terre de vie et de diversité, elle recèle aussi des richesses minérales telles que l’or, le diamant, et le coltan. Elle se trouve au cœur d’une forêt tropicale dense, un écosystème vital qui contribue à la lutte contre le réchauffement climatique.

Mais, ironie du sort, l’abondance de ces ressources est devenue une malédiction pour la réserve. Malgré la loi n°014/003 du 11 février 2014, qui interdit toute activité autre que la conservation et la recherche scientifique, les communautés locales exercent une pression continue sur la réserve, revendiquant un accès aux ressources qu’elle abrite.

 

Spoliation des terres

Ce désir insatiable a attisé des tensions récurrentes et des conflits, exacerbés par la spoliation des terres pour l’exploitation minière, avec la complicité de certaines autorités politico-militaires et la présence de compagnies étrangères, notamment chinoises, qui ont installé des dragues et entrepris des activités dévastatrices pour extraire ces trésors.

La récente crise, initiée par le licenciement d’un directeur de site de WCS, partenaire de l’ICCN, a ravivé ces tensions.

Dans un effort de médiation, le directeur général adjoint de l’ICCN, Théophile Ngombo Difuma, est arrivé sur place, à la tête d’une délégation comprenant des hauts responsables de la protection des parcs et des réserves, ainsi que le directeur national de WCS. Initialement venus pour clôturer la formation des nouveaux membres du Corps pour la Protection des Parcs Nationaux (CORPPN), ils ont décidé de retarder cette cérémonie afin de rencontrer les communautés locales, d’écouter leurs doléances et de chercher des solutions durables.

Les représentants communautaires, incluant chefs coutumiers, jeunes, mères, pasteurs, autorités politico-administratives et leaders d’opinion, se sont exprimés sans détour. Ils reprochaient à WCS de ne pas assez investir dans le développement local et exigeaient le retour de l’agent licencié, symbolisant selon eux un lien vital avec la communauté. Après des échanges passionnés, des compromis ont été trouvés, accompagnés de recommandations destinées à favoriser un dialogue constant et constructif entre les parties.

Lorsque le calme a enfin été restauré, la cérémonie de clôture de la formation des membres du CORPPN a pu se dérouler le lendemain, marquant ainsi un moment de réconciliation et de renouvellement. Ce travail de titan fait sous la conduite du Directeur Général Adjoint de l’ICCN, Ngombo Difuma Théophile a permis la réouverture des bureaux de WCS pour permettre à son personnel de reprendre le travail.

Ce dénouement, bien que fragile, représente un triomphe pour la cause de la conservation, car à travers chaque voix, chaque échange, transparaissait un désir profond de préserver la Réserve de Faune à Okapis, ce trésor partagé. C’est la nature elle-même qui, en silence, semble appeler à notre respect et à notre vigilance pour qu’un tel sanctuaire continue de prospérer, en harmonie avec ceux qui y vivent et ceux qui l

’admirent.

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