Sortie médiatique de Kagame: Le professeur Ndaywel donne un aperçu historique des faits
Réagissant à la sortie médiatique du président Rwandais Paul Kagame, le professeur Ndaywel a donné l’aperçu historique des frontières de la République démocratique du Congo.
« Pendant des années, le Congo essaye d’expliquer qu’il existe des prétentions hégémoniques sur la RDC, mais la communauté internationale n’en croit pas. Voilà aujourd’hui une déclaration qui explique que si le Rwanda nous fait la guerre depuis 25 ans, c’est parce qu’il veut récupérer ses soit disant terres. S’il s’agissait des telles prétentions, il faudrait saisir les instances internationales telles que les Nations Unies, la Cour internationale de justice ou l’Union africaine au lieu de massacrer des milliers et des milliers de personnes. Le président qui a fait une telle déclaration a été, il n’y a pas longtemps, président de l’Union africaine. Il aurait pu dire, par exemple, revenons sur la décision du deuxième sommet de l’OUA ténu au Chœur en 1964 qui avait décidé de l’intangibilité des frontières et dans ce cas, on devait revoir les frontières de tous les pays africains », a déclaré Isidore Ndaywel, historien congolais.
Ce digne fils du pays demande aux Congolais de prendre conscience par rapport à cette affaire de l’Est de notre pays qui est maintenant une question existentielle « car nous sommes en présence d’une revendication territoriale ».
S’agissant des faits historiques, le professeur Ndaywel en appelle aux historiens Belges, voire au Ministère belge des Affaires étrangères. Depuis 1885, soutient-il, lors des premiers tracés frontaliers et de la notification de Léopold II à tous les états et à toutes les puissances de l’époque sur la carte de la région et de l’état indépendant du Congo, la partie occidentale du Rwanda, du Burundi et le sud l’Ouganda revenaient à l’état indépendant du Congo.
En 1910, à la conférence de Berlin, précise-t-il, on avait décidé de revoir les frontières sur la revendication Allemande. Et lors de la conférence de Goma en 2012, les Baende et les Bashi ont encore revendiqué une partie de leur territoire qui se trouve au Rwanda. Il faut signaler, dit-il, que ces populations qui occupent ce territoire ne parlaient pas le Kinyarwanda jusqu’en 1930 mais cette langue leur a été imposée. Le royaume du Rwanda fait partie des territoires sous mandat de protectorat Allemand.
L’historien Isidore Ndaywel soutient que c’est la RDC qui a des terres à réclamer au Rwanda et non le contraire mais nous nous en tenons aux dispositions de la conférence de Bruxelles et de l’OUA. En ce qui concerne la situation de la frontière Rwando-congolaise, la situation ne souffre d’aucune ambigüité.
Une expédition allemande sur la découverte du lac Kivu en 1884, explique l’historien congolais, permit la réouverture des négociations qui aboutirent à la signature de la convention du 11 Aout 1910 avec l’Allemagne fixant la frontière actuelle avec le Rwanda et le Burundi. Par cette convention qui adopta le nouveau tracé allant du Mont Sabinio au Tanganyika, le Congo a perdu une partie de ses terres au profit du Rwanda et du Burundi.
Isidore Ndaywel explique que l’instrumentalisation de l’histoire de conquête Rwandaise au 19eme siècle est également une accumulation des malentendus et même d’erreurs avec l’allusion faite au règne de Kigeri IV, un roi qui régna entre 1867 et 1895. Avec ses huit armées, ce roi aurait organisé 13 campagnes militaires à la base de l’extension et de la centralisation du royaume du Rwanda.
Mais certaines de ses campagnes furent des simples expéditions de radias pour s’emparer de l’ivoire comme c’est le cas dans les forêts du pays du Dembo sans être suivi d’une annexion effective. De même, toutes ses campagnes ne furent pas toujours couronnées de succès comme dans le sud contre le Burundi ou encore contre les Bushi et le pays de Bashi et c’est d’ailleurs au cours de la dernière de ses campagnes contre les Bashi que ce roi tomba malade et il trouva la mort dans la barque qui le ramenait au Rwanda en cours de route, sans avoir jamais étendu son pouvoir sur le Kivu.
Nous la RDC, a dit cet historien congolais, nous ne revendiquons rien, celui qui revendique n’en qu’à présenter ses éléments de preuves aux instances compétentes et nous irons discuter et nous défendre. Dans tout ceci, admet-il, il n’y a pas matière à faire la guerre et massacrer des paisibles citoyens en créant le RCD, le CNDP et le M23 comme si nous étions au 19e siècle à l’époque de Kigeri qui faisait la guerre aux Bushi pour être chassé par après.
« Je trouve extrêmement dommage que le Rwanda qui est un pays frère puisse arriver à faire des déclarations de telle nature qui ne font que mettre en difficulté nos rapports. Je tiens à vous dire que pendant toute la période coloniale, le Congo Belge était très proche du Rwanda. Et l’ancien président Rwandais, Habyarimana fut un ancien étudiant de l’Université de Lovanium à Kinshasa ; n’ayant pas réussi ses études en médecine, il retourna au Rwanda. Jusqu’en 1987, notre pays le Congo a accueilli beaucoup de Tutsi ; et toute l’élite Tutsi était ici en RDC. Je ne sais pas qui a inventé cette histoire selon laquelle les Congolais n’aiment pas les Tutsi. C’est parce qu’il y a eu des événements d’Avril 1994 que nous avons reçu les Hutu et nous avons appliqué le même devoir d’hospitalité comme c’était le cas avec les Tutsi, qu’on trouve ce prétexte. La RDC doit prendre des précautions et faire attention à l’hypocrisie du Rwanda », a affirmé Isidore Ndaywel.
Alexis Kagame, explique l’historien congolais, fut un grand historien Rwandais qui même reçu par le professeur Ndaywel lorsqu’il fut au département d’histoire à Lubumbashi. Kagame, poursuit-il est nom prestigieux d’un homme de science qui a écrit un livre sur la philosophie Bantu.
Mais ce que Paul Kagame fait, il besoin d’être éclairé sur la culture et l’histoire du Rwanda et de la RDC pour ne plus jeter l’opprobre sue ce nom.
Serge Musene/stagiaire