Surchauffe sur le marché de change: Voici les mesures prises par le Gouvernement
« Stratégie d’inclusion financière et situation du Franc Congolais sur le marché de change», c’est le thème principal qui a été abordé au cours du Briefing hebdomadaire de ce lundi 17 juillet 2023. Cette fois-ci, le ministre de la Communication et Médias, Porte-parole du Gouvernement, Patrick Muyaya Katembwe a invité son collègue des Finances, Nicolas Kazadi Kadima Nzuji.
Dans ses propos luminaires, le ministre des Finances a expliqué que c’est pour la 2e fois qu’on assiste à une surchauffe sur le marché des changes qui a une implication sur l’inflation. C’est pour cela que le président de la République a tenu une réunion de crise pour faire le point de la situation. Nicolas Kazadi constate qu’Il y a surchauffe au moment où le pays connaît une situation des réserves de change inédites. La RDC connaît des réserves de plus de 4 milliards. « Ce qui se passe, en même temps que les réserves des changes se sont accrues, en même temps on a eu cette année une forme de raréfaction des devises sur le marché de change. Cette rareté a plusieurs sources », indique le patron des Finances.
D’abord, la hausse de la demande de la devise est expliquée par plusieurs phénomènes : la tendance économique, l’accroissement des liquidités en France congolais. On a une situation où, lorsqu’on fait des paiements en franc congolais, il y a une demande supplémentaire sur le marché des changes. Les finances publiques ne sont pas une situation de dérapage. Nos dépenses sont couvertes par les recettes, les obligations du trésor et des appuis budgétaires. Toutes les dépenses effectuées ont une couverte saine.
« Il n’y a pas de planche a billet et il n’y a en aura pas », martèle-t-il, avant d’affirmer qu’étant donné que le taux a tendance à déraper, nous vérifions sur tout ce qui se passe sur le marché. Sur le marché parallèle, il y a raréfaction de la devise, et les dépôts en devises ne sont pas au même moment que les recettes d’exportation. Lorsque nous faisons des paiements en franc congolais, les gens déplacent le portefeuille de France congolais en devises.
Quelles mesures
C’est au regard de cette situation que le Gouvernement de la République a adopté une batterie de mesures :
*La Banque centrale du Congo (BCC) qui a des réserves internationales des changes importantes, a commencé à intervenir sur le marché des changes. Il est constaté un début de retournement de situation et ceci pour stopper l’hémorragie.
*Pour accroître l’utilité du franc congolais, le Gouvernement va privilégier le paiement des impôts en francs congolais. Lorsque vous voulez payer, vous apporter vos devises et vous les vendez aux banques commerciales.
*Le Gouvernement va travailler avec la BCC pour surveiller la qualité de nos dépenses publiques. Nous allons renforcer le suivi du plan de trésorerie. Nous le ferons avec la BCC et nous allons renforcer cette collaboration.
*Le Gouvernement et la Banque centrale vont veiller pour que les dépenses en cache soient limitées. Quand les gens prennent le cache, ils vont sur le marché de change. Ceci créé un doute et ça pousse les gens à se protéger en devises. Nous allons être beaucoup plus strictes, prévient-il, avant de rappeler que la BCC est soumise à la limitation de 10.000 dollars pour le paiement en espèces.
Nicolas Kazadi a souligné que ces mesures sont de nature à réduire la demande de devises et à accentuer le paiement en Francs Congolais. Comme la Rdc est une économie dollarisée, le ministre des Finances promet que nous allons continuer à utiliser les deux monnaies.
Sur le plan de la politique monétaire, Nicolas Kazadi promet la régulation des flux en Franc congolais à travers le plan directeur de la BCC, qui va davantage utiliser les bons BCC, opérer des changements sur sa politique des réserves pour réguler les flux des paiements en Franc congolais. Tout ceci aura comme impact de stopper l’hémorragie et d’inverser la situation de taux de change. « Nous devons aimer le Franc congolais, ouvrir des comptes en FC, parce qu’ils sont bien rémunérés. Il faut changer des habitudes et de culture par rapport à l’utilisation de notre monnaie. Il y aura d’autres réformes sur le système de paiement, l’économie locale, …nous sommes dans l’urgence et voilà les mesures structurelles », dit-il.
A partir de demain, indique-t-il, les banques vont jouer le jeu pour assurer plus de transparence, plus de respect de la réglementation pour éviter la fuite des capitaux.
Quid de la protection du panier de la ménagère
Au regard de cette préoccupation, Nicolas Kazadi a précisé que nous gérons le court terme qui intéresse les congolais et le panier de la ménagère n’est pas oublié. D’ailleurs, c’est pour ça que nous avons tenu cette réunion. A l’en croire, la meilleure façon de protéger le pouvoir d’achat est de juguler l’inflation. « Déjà qu’on l’appelle M. le blocage, cette fois-ci ça sera un peu plus », dit-il, avant d’avouer que la solution n’est pas que monétaire.
Cette fois-ci, l’inflation n’a pas rejoint la dépréciation du taux de change, ce qui nous permet de penser qu’on est en face d’un système de spéculation. « Nous avons préparé un Décret pour les principaux produits de grande consommation. Nous voulons instaurer un droit unique à l’entrée que vont se partager toutes les services. Ce texte permettra d’apporter plus de transparence dans nos rapports avec la douane », explique-t-il.
Et d’ajouter que la Dgda va prélever ce droit et le partager à tous les services, pour protéger ces produits de toute spéculation. Pour Nicolas Kazadi, ces mesures devraient donner lieu à une stabilisation. Ainsi, la meilleure façon, c’est de produire, consommer et vendre en Francs congolais. Le ministre n’a pas manqué de souligner qu’il y a un programme de transformation agricole, en vue de la substitution des importations par une production à travers les Zones économiques spéciales. « Que chaque congolais se trouve responsable. Sinon, nous dépendront des autres. Pour cela, il faut un engagement des hommes d’affaires et un accompagnement de l’Etat », dit-il.
Il a fustigé le fait qu’1 Km de payage coûte 1 dollar en RDC, alors qu’en Zambie, c’est 1 dollar pour 10 Km. « Nous venons d’appuyer un investissement de 20 millions de dollars dans le Haut Katanga pour accroître la production du maïs. Nous travaillons et il y a des choses qui se font », souligne Nicolas Kazadi, qui pense qu’en termes de pouvoir d’achat, nous avons multiplié l’enveloppe de rémunération par 3, alors que l’inflation n’a pas été multipliée par trois. Globalement, il y a un gain du pouvoir d’achat que nous voulons préserver.
La BCC vendra aussi la liquidité aux bureaux de change
Le ministre des Finances a informé que la BCC vend de la liquidité depuis un certain temps et c’est la raison pour laquelle il y a une certaine accalmie sur le marché, même s’il conseille de demeurer prudent. « Si on ne touche pas aux causes structurelles, on peut brûler les réserves sans atteindre les résultats. Il faut identifier les causes structurelles. Si on le fait aveuglément, on le fera pendant un temps et les réserves risqueront de s’épuiser. C’est la raison pour laquelle nous tenons des réunions tous les jours », indique-t-il.
Pour ce qui est des cambistes, Nicolas Kazadi reconnait que le marché parallèle est déjà difficile, parce que non maîtrisable. Le contrôle des bureaux de change est problématique. Ces bureaux des changes ne sont pas soumis à la limitation dans l’utilisation des devises. Ça devient une aubaine pour les spéculateurs. Il a souligné que la BCC viendra avec d’autres propositions pour mieux contrôler les bureaux des changes. Aussi, la BCC va intervenir non seulement avec les banques, mais aussi les bureaux de change.
Jean-Marie Nkambua