Tunisie : actes de haine et de discriminations à Sfax contre les Subsahariens
Dans la nuit de lundi à mardi, des affrontements violents entre migrants Subsahariens et populations locales se sont intensifiées à Sfax en Tunisie. Un Tunisien a été tué dans des heurts avec des migrants africains à Sfax dans le centre-est du pays, et ville portuaire et pôle économique majeur du pays. La seconde ville de Tunisie au Centre-est est où la tension et à son comble est également le point de départ d’un grand nombre de traversées illégales vers l’Italie.
Dans la soirée de lundi, une maison louée à des Subsahariens a été incendiée au quartier Bahri à Sfax. Des accrochages dans le quartier “Al-Rabadh“ de la ville de Sfax, entre des migrants et habitants de la région, ont fait de nombreux blessés et des dommages matériels et un certain nombre de voitures ont été brûlées et détruites, des maisons incendiées.
Des individus masqués avec des barres de fer, jets de pierre, bref toute la panoplie d’une révolte urbaine manifeste ont caractérisé la nuit de lundi à mardi à Sfax et témoignent de la violence entre Tunisiens et Subsahariens. Il a fallu l’intervention de la police et les gaz lacrymogènes pour ramener un calme précaire.
L’homme, né en 1981, a été mortellement poignardé lors d’affrontements entre des habitants d’un quartier de Sfax et des migrants originaires d’Afrique subsaharienne, a indiqué le porte-parole du Parquet de Sfax, « Trois subsahariens soupçonnés d’implication dans ce meurtre et qui seraient de nationalité camerounaise, selon les informations préliminaires, ont été arrêtés », a-t-il ajouté.
Des affrontements à coups de jets de pierres avaient déjà opposé dimanche soir des Subsahariens à des habitants de Sfax, lors desquels des véhicules et des logements ont été endommagés. La police avait fait usage de gaz lacrymogène pour mettre fin aux heurts. Les habitants de Sfax protestent régulièrement contre la présence de subsahariensen situation irrégulière et réclament leur départ. Dans les quartiers populaires de la ville où habitent les migrants, des violences verbales et physiques éclatent souvent entre les deux parties.
Ces violences s’étaient multipliées après le discours pour le moins teinté de racisme, en février dernier du président Kais Saied qui avait pourfendu l’immigration clandestine et l’avait présenté comme une menace démographique pour son pays. Plusieurs ONG locales et internationales se sont alors soulevées pour dénoncer et condamner « le discours de haine et de discrimination et d’intimidation à l’encontre les migrants (d’Afrique subsaharienne). Le président tunisien avait attribué aux « migrants clandestins » un prétendu complot « pour changer la composition du paysage démographique en Tunisie ».
C’était un feu vert donné à la population pour s’adonner à des actes de violence, chasse aux migrants légaux ou illégaux subsahariens, dont nombre de ces derniers (21 000) furent expulsés manu-militari de leurs logements. Fin mai, un migrant béninois de 30 ans trouvait la mort, poignardé en cela lors d’une attaque menée par un groupe de jeunes Tunisiens dans un quartier populaire à Sfax justement.
Cela avait été l’étincelle qui avait accru le racisme dans la ville. Les Sfaxiens dans une énième manifestation devant le siège du gouvernorat réclamaient l’intervention des autorités pour mettre fin au phénomène migratoire et expulser les Subsahariens du pays. La situation avait dégénéré en chasse aux migrants de leurs domiciles, les assaillants profitant du laxisme des autorités tunisiennes usaient de force et de violence en toute impunité.
La plupart des migrants d’Afrique subsaharienne viennent en Tunisie pour tenter ensuite de rejoindre l’Europe par la mer, en débarquant clandestinement sur les côtes italiennes. Sfax est depuis longtemps connue comme un lieu de départ pour les embarcations de migrants tentant de traverser illégalement vers l’île italienne de Lampedusa, située à environ 150 kilomètres des côtes tunisiennes. En 2023, plus de 30 000 personnes ont déjà rejoint l’île italienne depuis les côtes de Sfax.