Conseil de sécurité des Nations Unies: Thérèse Kayikwamba exige des sanctions ciblées contre les rwandais impliqués dans le soutien au M23 

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Mme Thérèse Kayikwamba Wagner, ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, Coopération international et Francophonie, était devant le Conseil de sécurité des Nations Unies lors de la séance d’information sur la Région des Grands Lacs et la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération en Rdc et dans la Région.

Dans son intervention, elle a justifié sa présence qui est un rappel de l’obligation sacrée de ce Conseil : celle de préserver la paix et la sécurité internationales. La République Démocratique du Congo, comme tout État membre de cette organisation, doit bénéficier de la même considération.

Or, la crise qui persiste à l’Est de mon pays, orchestrée et alimentée par des forces extérieures, met en péril cette paix, non seulement pour nous, Congolaises et Congolais, mais pour l’ensemble de la région et, par ricochet, pour la stabilité mondiale.

Elle explique que le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de l’Accord-Cadre pour la Paix, la Sécurité et la Coopération pour la République Démocratique du Congo et la Région des Grands Lacs est sans appel. Il met en lumière une situation sécuritaire qui se détériore, des tensions croissantes entre la RDC et le Rwanda, et une crise humanitaire tragique. Ce rapport appelle à une mobilisation urgente, et un sursaut diplomatique pour restaurer la paix, et répondre aux souffrances des populations.

Après douze années, force est de constater, que les réunions et les rapports n’ont pas produit de progrès concret. Cette crise n’est pas un simple accident de l’histoire.

Depuis près de trois décennies, le peuple congolais endure des souffrances indicibles, et les mécanismes mis en place pour restaurer la paix, tels que l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba, échouent face à la mauvaise foi de certains.

Bien que cet accord ait été déséquilibré dès le départ, la République Démocratique du Congo l’a signé dans l’espoir de ramener la paix à son peuple.

« Nous avons respecté nos engagements avec sérieux, mais nous attendons toujours que d’autres signataires, notamment ceux qui les enfreignent sans conséquence, soient enfin tenus responsables par ce Conseil avec la fermeté et la clarté nécessaires », a-t-elle indiqué, avant d’ajouter que nous saluons l’adoption, le 21 juin 2024, du projet de plan d’action pour la revitalisation de l’Accord-Cadre, tel que mentionné dans le paragraphe 14 du rapport sous examen.

Ce document sera examiné lors du 12ème Sommet de haut niveau du Mécanisme régional de suivi par les Chefs d’État avant sa validation, comme précisé dans le rapport S/2024/700. Une fois encore, notre attente porte sur des actions réelles, et non sur des promesses restées vaines.

Une situation alarmante

Mme Thérèse Kayikwamba Wagner a révélé que la situation sur le terrain est alarmante, et les chiffres du désastre humanitaire dans l’Est de mon pays sont accablants. Près de sept millions de Congolais sont actuellement déplacés, vivant dans des conditions de dénuement total, faisant de la RDC le pays avec la plus grande population de déplacés internes au monde. Le rapport de votre Groupe d’experts confirme la présence de plus de 4’000 soldats des forces de défense rwandaises sur le sol congolais, dépassant les effectifs du M23. Ainsi, le Rwanda, contributeur de troupes aux Nations Unies, s’ingère impunément dans les affaires de ses voisins, en violation flagrante du droit international.

Cette ingérence s’accompagne d’une série de manœuvres illégitimes, visant à restructurer l’administration locale dans les zones occupées, notamment à travers des nominations d’autorités coutumières imposées par le M23 et soutenues par le Rwanda.

Ces groupes cherchent à modifier les équilibres démographiques et culturels, notamment dans le territoire de Rutshuru. Ces actes sapent l’autorité de l’État congolais et instaurent une administration parallèle, divisant les communautés.

Par ailleurs, des transferts de populations sont signalés sous couvert de mouvements de réfugiés, que nous rejetons fermement. Le retour des déplacés et des réfugiés doit et sera uniquement encadré par l’État congolais, avec l’appui du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, pour garantir des retours volontaires et dignes.

Les limites du processus de Luanda

La ministre poursuit en disant que le Processus de Luanda, quant à lui, initié en 2022 pour répondre à cette crise, expose les limites de l’Accord-Cadre à garantir la pleine responsabilité des signataires.

« Nous avons délibérément évité de divulguer dans l’espace public et les médias les détails du Processus de Luanda, par respect pour le médiateur et les vies humaines en jeu, afin de garantir la sérénité des négociations », mentionne-t-elle.

Cependant, il est désormais évident que, face à l’urgence de la situation, il est de notre devoir de clarifier devant ce Conseil les véritables obstacles qui freinent ce processus et l’adoption du projet d’accord de paix, proposé par la médiation angolaise.

Premièrement, le plan harmonisé pour la neutralisation des FDLR et le désengagement des forces.

Ce plan repose sur deux volets : l’un pour la neutralisation des FDLR et l’autre pour le retrait des forces rwandaises. Dès avril 2024, la République Démocratique du Congo a élaboré son plan de neutralisation des FDLR avec précision et incluant une évaluation complète de la menace, des opérations militaires et un suivi rigoureux des résultats. En revanche, la contribution du Rwanda, sur le retrait des forces, se résume à une simple promesse de retrait, sans garanties ni détails concrets, créant un déséquilibre qui compromet l’application cohérente du plan.

Pire encore, le Rwanda conditionne son retrait à la neutralisation des FDLR, un chantage qui viole les principes fondamentaux du droit international. Pour que ce processus ait du sens, il est impératif que les deux volets soient mis en œuvre de manière concomitante. Seule cette simultanéité peut assurer la crédibilité et l’efficacité d’un plan qui aspire à restaurer la paix dans la région.

Deuxièmement, le Rwanda rejette toute clause de responsabilité dans un éventuel accord de paix, ce qui soulève de graves interrogations sur la sincérité de son engagement envers la paix.

En République Démocratique du Congo, nous acceptons pleinement d’être tenus responsables de nos actes. Car le principe de responsabilité est le socle de toute résolution de conflit ; il impose à chaque partie de respecter scrupuleusement ses engagements, avec rigueur et sincérité.

Lorsqu’un accord est violé, le principe commande des conséquences claires et sans équivoque, qu’il s’agisse de sanctions ou de poursuites judiciaires, pour que justice et droit international ne soient pas de simples mots, mais des réalités. Sans responsabilité, il ne peut y avoir ni confiance, ni paix durable.

Enfin, troisièmement, la République Démocratique du Congo réaffirme la nécessité impérative d’un mécanisme de justice régional, pour répondre aux violations flagrantes du droit international commises depuis la résurgence du M23 en 2022.

Le Rwanda refuse catégoriquement l’inclusion de toute disposition visant à intégrer ce mécanisme dans l’accord de paix actuellement en discussion. Ce refus obstiné dévoile, sans ambiguïté, l’intention du Rwanda d’échapper à la lumière de la Justice.

Pour des sanctions sévères

« En ce qui concerne l’exploitation illégale des ressources naturelles de mon pays, mon gouvernement demande instamment l’imposition de sanctions sévères contre tous les acteurs de cette chaîne de pillage, du producteur à l’exportateur », souligne la ministre, qui appelle également à la mise en place d’un mécanisme similaire au Processus de Kimberley pour gérer l’or provenant des zones de conflit, afin de mettre un terme à cette économie parallèle qui alimente la violence.

« Mon Gouvernement, qui souscrit aux recommandations de l’atelier de Khartoum du 2 septembre 2021, sur les ressources naturelles dans la région des Grands Lacs, est prêt à participer activement aux discussions pour la mise en place d’un tel processus afin d’éradiquer ce fléau », note le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, Coopération international et Francophonie.

Elle a terminé par saluer l’initiative de la réunion du 1er octobre 2024 aux Nations Unies, visant à accélérer l’opérationnalisation du Programme de Désarmement, Démobilisation, Relèvement Communautaire et Stabilisation (PDDR-CS) pour la réinsertion des éléments des groupes armés.

Elle a réitéré son appel à un soutien substantiel pour ce programme, face aux défis posés par les groupes armés étrangers.

Il est essentiel que chaque pays de la région prenne ses responsabilités, comme le fait la République Démocratique du Congo, en mettant en place des mécanismes nationaux pour gérer les groupes armés sur leur propre territoire, afin qu’ils retournent dans leur pays d’origine et libèrent ainsi la République Démocratique du Congo et en particulier sa population civile, d’un fardeau porté trop longtemps.

« Nous demandons également que ce Conseil charge l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Région des Grands Lacs, de fournir un rapport circonstancié sur cette question précise », pense-t-elle, et poursuit que la République Démocratique du Congo est une nation éprise de paix. Nous avons fait le choix du dialogue, le choix du multilatéralisme et le choix du respect du droit international.

Mais nous ne pouvons accepter que notre souveraineté et notre intégrité territoriale soient sacrifiées sur l’autel de l’inaction et de l’impunité.

Elle appelle ce Conseil à prendre des mesures fermes, en imposant des sanctions ciblées contre les individus rwandais au sommet de la chaîne de commandement, impliqués dans le soutien au M23.

Les rapports, que nous avons tous sous les yeux, mettent en lumière leur rôle direct dans les attaques contre le territoire congolais, y compris sur des camps de déplacés internes, et leur coordination avec des groupes armés.

C’est ainsi qu’elle demande donc que ces sanctions incluent des interdictions de voyage, des gels d’avoir et des mesures économiques, afin de mettre un terme à cette ingérence déstabilisatrice qui menace la paix et la sécurité régionales.

Le Conseil de Sécurité doit réaffirmer, avec force, les principes fondamentaux qui constituent le socle de notre patrimoine du multilatéralisme : la justice, la redevabilité, et la paix.

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