Les dirigeants des puissances du monde, spécialement ceux qui s’arrogent le droit de régenter sans limite ni mandat toute l’humanité, nous surprennent quelques fois par leur manque de cohérence et de considération pour les autres peuples.
Quelques jours avant la commémoration des 30 années du génocide rwandais, Emmanuel Macron a cru nécessaire de confesser publiquement une des fautes les plus graves de la diplomatie contemporaine de son pays à l’égard de l’Afrique et de l’humanité toute entière : La non intervention de la France pour empêcher le génocide rwandais de 1994.
Le Président français a communiqué, à cette occasion, selon les mots de Nicolaz Beverez publiés récemment dans le quotidien « Le figaro » : La France avait les moyens de savoir et d’agir. Elle aurait pu arrêter le génocide et n’en a pas eu la volonté.
Cette déclaration surprenante inspire deux questions importantes.
Primo, celui qui a connu, vu et, parfois, documenté des crimes aussi graves et qui avait, selon ses propres dires, les moyens d’intervenir mais n’a rien fait, est-il parfaitement quitte à l’égard de la conscience humaine et vis-à-vis de l’histoire, dès lors qu’il aura avoué ou confessé sa « distraction » que nous considérons comme une indifférence coupable ?
Secundo, celui qui, accablé par de la lourde, triste et déplorable expérience de 1994, peut-il raisonnablement et surtout éthiquement faire preuve de détachement et se montrer indifférent, voire insensible à l’égard d’autres crimes qui, devant la conscience humaine, devraient susciter la même compassion ?
En d’autres termes et pour expliciter davantage mon propos, je déplore ici, le fait que, d’une part, on dénonce, condamne et se culpabilise à juste titre pour les crimes de 1994 et, d’autre part, l’on se montre absolument sourd et aveugle face à ce qui se déroule actuellement au Kivu, en RDC. Descartes, le français, n’aurait-il pas décelé ici une incohérence ? Une irrationalité ?
Dans le cas qui nous concerne ici, l’on ne devrait d’ailleurs pas parler de détachement, mais de participation indirecte par le biais des avantages que l’on accorde sciemment à l’auteur des crimes en cours. Oui, les assassinats, les viols, les milliers de déplacements de femmes, de vieillards et d’enfants du Kivu s’opèrent par les armes et munitions que vous envoyez directement ou indirectement à Kigali. Les résultats des avantages que vous octroyez à Kigali, comme l’achat de l’or, du coltan que le Rwanda ne produit pas ou des produits agricoles tels que le thé, le café ou le cacao que vos amis pillent allègrement à la suite de leurs incursions chez nous, sont des témoignages accablants de votre complicité. Celle-ci s’est illustrée d’avantage dans; l’accord que l’Union Européenne a signé avec cet agresseur, voilà quelques mois.
Les grattes ciel qui apparaissent à Kigali et que vous admirez sont le fruit de ce pillage systémique. N’attendez donc pas trente ans pour venir faire semblant de pleurer à Kinshasa. Nous savons comment fonctionne votre diplomatie et nos enfants s’en souviendront.
La France a les moyens, avec ses partenaires européens et son allié américain, de mettre un terme aux violentes souffrances des femmes du Kivu. L’octroi du prix Nobel à un de nos compatriotes ne suffit pas. Puisque vous savez…alors agissez différemment, avec moins de cynisme et plus d’humanité ; pas comme en 1994. Cette fois, ayez la volonté d’agir et montrer la.
À ce jour, c’est encore vos diplomates qui tiennent la plume lorsqu’il s’agit de rédiger les résolutions du Conseil de Sécurité des N.U, à New York, concernant la RDC. Le peuple congolais veut vous voir prendre des initiatives courageuses et agir selon les valeurs que vous ne cessez de proclamer et mettre en avant.
Jean-Pierre Kambila Kankwende