Le Souverain pontife a adressé un message aux participants du VIe forum de Paris pour la paix, réunissant vendredi 10 novembre une vingtaine de chefs d’États et de gouvernements, des ministres, dirigeants d’institutions internationales, experts et diplomates, dans la capitale française. La rencontre annuelle a été fondée par l’historien et diplomate français Justin Vaïsse en 2018, voulue cent ans après l’armistice de la Première guerre mondiale.
Dans la missive signée par le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège, et lue à Paris par le nonce apostolique en France, Mgr Celestino Migliore, devant le président français, Emmanuel Macron, le Pape a souhaité que ce forum centré sur le multilatéralisme soit signe d’espérance au milieu d’un contexte mondial «extrêmement douloureux», où il déplore l’impuissance face à la multiplication des conflits armés, «avec leur cortège de souffrances, d’injustices et de dommages –parfois irréversibles».
Le Successeur de Pierre espère que les engagements qui y seront pris soient de nature «à favoriser le dialogue sincère, basé sur l’écoute des cris de tous ceux qui souffrent à cause du terrorisme, de la violence généralisée et des guerres», autant de fléaux «qui ne profitent qu’à certains groupes en nourrissant des intérêts particuliers, hélas souvent déguisés par de nobles intentions».
La paix est le premier des droits
Répétant inlassablement depuis le 7 octobre combien la guerre est «toujours une défaite», le Pape François a rappelé aux participants que la construction de la paix est «un travail lent et patient», exigeant courage et engagement. Selon lui, une paix durable se bâtit au jour le jour, à travers la reconnaissance, le respect et la promotion de la dignité de la personne humaine et de ses droits fondamentaux, parmi lesquels le Saint-Siège reconnaît particulièrement le droit humain à la paix, condition sine qua non pour l’exercice de tous les autres droits de l’homme.
Plaidant pour le développement intégral, le Pape a regretté l’écart persistant entre les engagements solennels pris le 10 décembre 1948 et la réalité en cette année des 75 ans de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
«Combien de personnes, y compris des enfants, sont privées du droit fondamental et primaire à la vie et à l’intégrité physique et mentale, en conséquence des hostilités entre différents groupes ou différents pays? Combien de personnes sont, à cause des conflits, privées des droits les plus élémentaires, tels que le droit à l’eau potable et à une alimentation saine, mais aussi le droit à la liberté de religion, à la santé, à un logement correct, à une éducation de qualité, à un travail digne? Combien d’enfants sont contraints de participer directement ou indirectement aux combats et en portent les cicatrices physiques, psychologiques et spirituelles pendant toute leur vie?», interpelle le Souverain pontife argentin.
«Aucune guerre ne vaut la perte ne serait-ce que d’une seule personne»
Tout en réaffirmant «le droit inaliénable à la légitime défense, ainsi que la responsabilité de protéger ceux dont l’existence est menacée», «nous nous devons d’admettre que la guerre est toujours» une «défaite de l’humanité», soutient-il encore, attristé: «Aucune guerre ne vaut les larmes d’une mère ayant vu son enfant mutilé ou mort; aucune guerre ne vaut la perte de la vie ne serait-ce que d’une seule personne humaine, être sacré, créé à l’image et à la ressemblance du créateur; aucune guerre ne vaut l’empoisonnement de notre maison commune; et aucune guerre ne vaut le désespoir de ceux qui sont forcés à quitter leur patrie et sont privés, d’un moment à l’autre, de leur maison et de tous les liens familiaux, amicaux, sociaux et culturels qui ont été construits, parfois pendant des générations.»
L’évêque de Rome réaffirme que la paix ne se construit pas avec les armes mais bien «à travers l’écoute patiente, le dialogue et la coopération», et réitère l’appel incessant du Saint-Siège «à ce que l’on fasse taire les armes, à ce que l’on repense la production et le commerce de ces instruments de mort et de destruction et à ce que l’on emprunte résolument la voie du désarmement progressif mais intégral, afin que l’on puisse enfin faire ressentir haut et fort les raisons de la paix!»
La conférence épiscopale française s’est aussi adressée aux membres du forum. Dans un message vidéo, son président, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, a exhorté à agir pour le respect du droit international: «Avec ses faiblesses, il est une expression concrète de la fraternité humaine. Il permet des négociations dans la vérité et la justice», a assuré l’archevêque de Reims.
Outre la guerre au Proche-Orient, le financement de la lutte contre la pauvreté et le réchauffement climatique figurent également à l’agenda des discussions du Forum de Paris ce vendredi. Parmi les participants se trouvent le président du Conseil européen, Charles Michel, le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, celle de la Barbade, de Géorgie, de Belgique, du Kosovo ou les présidents du Ghana, de Suisse, et différents grands patrons des secteurs bancaires, financiers ou technologiques, entre autres personnalités.
Delphine Allaire – Cité du Vatican