
Les consultations politiques lancées en vue de la formation d’un futur gouvernement d’union nationale en République Démocratique du Congo se poursuivent. Le conseiller spécial du président de la République en charge de la sécurité, Eberande Kolongele a déjà reçu quelques figures emblématiques de la majorité présidentielle, notamment les présidents de deux chambres du Parlement ; la première ministre Judith Suminwa ; ainsi que des chefs de regroupements et partis politiques.
Si l’Union sacrée de la nation, famille politique de Félix Tshisekedi, initiateur de ces consultations, s’empresse à être reçu par Eberande, malgré des conflits internes, à l’opposition, plusieurs acteurs restent dubitatifs.
C’est le cas du Front Commun pour la Nation (FCC), qui, dans un communiqué officiel publié lundi 24 mars 2025, et signé par son président de la cellule de crise, Raymond Tshibanda, trois principales raisons sont avancées pour justifier cette décision.
Le FCC de Joseph Kabila dit toujours considérer les institutions établies à la suite des dernières élections comme « illégitimes » au regard de l’organisation de ce scrutin au moment où les consultations lancées ce jour insistent « sur le respect d’un certain nombre de principes, dont le respect des institutions dûment établies », se référant au communiqué officiel lançant ces assises.
Bernetel Makambo
Ci-dessous, le communiqué du FCC
COMMUNIQUE OFFICIEL DU FCC
Le FCC ne se sent pas concerné par les Consultations annoncées par le Président de la République et qui sont censées commencer aujourd’hui et ce, pour au moins trois raisons:
Premièrement, parce que dans la note signée par le Conseil Spécial en matière de Sécurité et rendue publique lors du point de presse de 22 mars dernier, il est précisé que “les consultations seront fondées sur le respect d’un certain nombre de principes, dont le respect des institutions dûment établies” (voir tiret 5). Or la position constante du FCC a été et demeure que toutes les institutions et tous les animateurs d’institutions issus des élections de décembre 2023, organisées en violation des lois pertinentes et marquées par une fraude d’ampleur inédite, sont illégitimes et que cette illégitimité est une des principales causes de la crise actuelle. Cette illégitimité ne peut donc être ignorée ou exclue des débats, si le véritable objectif des consultations est de régler la crise.
Deuxièmement, tel qu’expliqué par le Président de la République lui-même, ces consultations ont pour finalité la constitution d’un Gouvernement d’union nationale qui, à son avis, serait la réponse idoine à une crise qui, pour lui, ne serait que de nature sécuritaire. Le FCC ne partage pas cette analyse tronquée et intéressée, comme en témoignent ses communiqués et déclarations des trois dernières années. Pour le FCC, la crise est multiforme et elle a, comme cause-mère, la mauvaise gouvernance du pays par un pouvoir dictatorial et a-social qui a détruit la cohésion nationale, rendant le pays plus que jamais vulnérable. Telle que conçue et présentée par leur initiateur, ces consultations ne sont donc rien de plus, qu’une offre générale d’emplois qui ne peut intéresser que ceux pour qui l’accès aux hautes fonctions de l’Etat sont avant tout un moyen rapide d’enrichissement personnel, plutôt qu’une opportunité pour servir la Nation. Fidèle à son serment de ne jamais trahir le Congo, le FCC n’en fait pas partie.
Troisièmement, ces consultations sont une énième initiative pour prétendument essayer de résoudre la crise. Le FCC se demande pourquoi cette nouvelle initiative, alors qu’il y en a déjà plusieurs en cours? Quelle est la valeur ajoutée de cette initiative, lancée par une des parties à la crise, sinon le cristallisateur de la crise lui-même, par rapport à celles des personnes où organisations moins partisanes et plus crédibles, telles que:
– le Pacte pour la paix et le bien-vivre ensemble porté par la CENCO et l’ECC;
– les processus de Nairobi et de Luanda soutenus par les Nations Unies, l’Union Africaine, la SADC et l’EAC;
Tout bien considéré, cette nouvelle initiative paraît être une fuite en avant du pouvoir, une stratégie pour court-circuiter toutes les autres ci-haut citées qui, contrairement à la volonté des tenants du pouvoir, en appellent à une véritable inclusivité de toutes les parties prenantes à la crise et à l’examen des causes profondes de cette dernière. Le FCC refuse donc de prendre part à une messe qui, à l’évidence, cherche plus à légitimer et défendre un pouvoir, plutôt que de servir la cause d’une paix durable et l’intérêt supérieur du Congo et des congolais dans leur diversité.
Le 24 mars 2025,
Raymond Tshibanda Ntungamulongo
Président de la Cellule de Crise