Le Monde tacle la “Nouvelle Algérie” de Tebboune tombée dans la dictature absolue

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Le quotidien français Le Monde s’est penché sur le cas de l’Algérie en lui consacrant les deux premières pages de son édition du Weekend. Le « retour » de la répression y est mentionné, mais aussi la dictature militaire, et l’incapacité du régime à fédérer qui l’a conduit à serrer la vis contre toute forme de critique pour se donner une légitimité forcée.
Dans son édition à paraitre ce samedi, Le Monde s’est employé à critiquer vertement le régime algérien en lui consacrant 3 sujets, qui retracent le début de la dictature dans le pays avec l’arrivée au pouvoir d’Abdelmadjid Tebboune et la fuite des intellectuels.
Après l’épisode de l’exfiltration de l’opposante Amira Bouraoui par les autorités françaises en Tunisie, les relations franco-algériennes sont non seulement sur un retour à la case départ, la détérioration va encore plus loin avec la presse française qui réplique avec force à la colère d’Alger.
« L’Algérie bascule dans une nouvelle ère de répression », a titré le quotidien français, qui a fait fi de la continuité de cette même répression qui s’est abattue sur les citoyens algériens depuis 2019 avec l’arrivée au pouvoir du controversé Abdelmadjid Tebboune, qui cherche l’appui de Paris pour un second mandat en 2024 à travers une visite d’Etat programmée en mars 2023.
Entre Paris et Alger qui se sont aussitôt rabibochées aussitôt séparées, la presse française s’est soudain réveillée pour parler de la situation dramatique des droits de l’Homme en Algérie, de la liberté d’expression et l’Etat algérien qui sévit contre toute forme d’opposition forçant des milliers de leaders d’opinion, bloggeurs, journalistes et opposants à quitter le pays pour aller en France, au Canada, en Grande-Bretagne…
« Près de quatre ans après la grande vague de manifestations pacifistes du Hirak, le climat s’est durci, au point de provoquer un exode de représentants des médias et de la société civile », a écrit le quotidien français.
Et de citer Amira Bouraoui, à l’origine de la brouille entre Paris et Alger: « Je n’ai jamais souhaité quitter l’Algérie. C’est mon pays, ma terre. Là où je me suis battue. Ce sont les circonstances qui me l’ont imposé. La pression devenait insupportable ».
« Pour l’opposante algérienne Amira Bouraoui, l’équation était simple : la prison ou l’exil », raconte Le Monde après sa rencontre avec l’opposante le 7 février.
Les opposants en Algérie « fuient à grande échelle » parce que l’atmosphère y est devenue « irrespirable ». Un pays « en pleine dérive autoritaire où l’arrestation guette à tout instant », indique la publication en s’attardant sur le cas des membres du Hirak, le mouvement né en 2019 avec des manifestations contre le cinquième mandat de l’ex-président Abdelaziz Bouteflika, qui s’est plus tard transformé en revendication de démocratie et des appels au changement de régime.
La répression policière et juridique, la prison, les violences et les souffrances physiques et médicales, le déchirement des familles, sont devenus le quotidien de ceux qui ont voulu poursuivre le mouvement de contestation (qui s’est essoufflé à cause de la pandémie du covid) au péril de leur vie et leur nombre, leurs noms sont connus.
Le Monde cite le cas d’opposants qui n’ont pas eu la chance de s’exiler dans un pays occidental et qui ont subi la traitrise de la Tunisie, devenue une autre « wilaya » algérienne depuis le renforcement de l’autorité d’Alger sur Tunis sur fonds de crise institutionnelle et économiques.
Slimane Bouhafs, sympathisant du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK) a été enlevé en août 2021 au cœur de Tunis par des inconnus qui l’ont rapatrié de force en Algérie, rappelle le journal.
« Alger tente d’endiguer cette vague de départs de peur que ces opposants, une fois à l’étranger, diffusent largement les informations sur la répression », souligne Le Monde, en citant un intellectuel algérien sous couvert d’anonymat: « Le régime n’apprécie guère que la communauté internationale mette son nez dans les droits de l’homme en Algérie », ce qui explique les interdictions de sortie du territoire national prononcées par les tribunaux.
Quant à la presse algérienne, « dont la vitalité détonnait en Afrique du Nord, n’est plus que l’ombre d’elle­-même », indique le Monde citant le cas de plusieurs titres disparus de force depuis l’accession au pouvoir d’Abdelmadjid Tebboune et le renforcement du rôle de l’armée.
Cette « Algérie nouvelle » dont le président Abdelmadjid Tebboune a fait son slogan, consacre en fait un grand saut en arrière politique, tance le média français. « On était bien plus libre sous l’ère de Bouteflika », déplore un journaliste.
Le quotidien raconte le mouvement Hirak qui a réclamé un « Etat civil et non militaire », un mouvement qui a ébranlé la société algérienne malgré les souvenirs traumatisants de la décennie noire des années 1990 qui « n’avaient nullement dissuadé les familles d’arpenter rues et avenues, patriotisme en sautoir, rêvant d’une +nouvelle indépendance + ».
« Ces masses joviales, pacifiques et disciplinées, soulevées par une fierté collective retrouvée, avaient bluffé le monde. Tous les espoirs semblaient permis. D’où la douleur du désenchantement quand le régime, aidé par le Covid­19 au printemps 2020, a progressivement repris l’avantage, et resserré écrou par écrou l’étau sécuritaire autour d’un mouvement devenu impuissant, handicapé par son refus de s’organiser », note le média en racontant comment le régime algérien a verrouillé tout espace de liberté depuis 2019.
« C’est un régime nettement plus autoritaire qu’avant. Il était autoritaire, mais avec des marges de manœuvre pour les libertés. Aujourd’hui, nous sommes entrés dans une phase dictatoriale », a déclaré le professeur de droit public à l’université de Picardie­ Jules­ Verne, l’Algérien Mouloud Boumghar.
L’universitaire a rappelé la criminalisation par la régime algérien de la revendication même du Hirak qui voulait un changement radical de système politique avec la révision l’été 2021 du code pénal sur le sujet du terrorisme par le président Tebboune.
« L’arme de l’accusation de terrorisme a un effet tellement dissuasif qu’il n’y a pas besoin d’y recourir massivement, puisque l’objectif est de terroriser les gens », a-t-il expliqué, ajoutant que cela est intervenu après le classement du mouvement Rachad et du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK) comme terroristes par le Haut Conseil de sécurité « sans aucune base légale ».
Le but du régime algérien « est de terroriser tous ceux qui voudraient garder à l’esprit cette idée de changement de gouvernance politique et de faire croire que le Hirak est dirigé par Rachad », a-t-il affirmé.
En outre, le chercheur a noté que le régime algérien « est de plus en plus ouvertement militarisé. La tradition voulait que l’armée soit un roi qui ne gouverne pas mais à qui le dernier mot revient sur les affaires importantes », mais face à l’incapacité du régime à « reconstituer sa clientèle et sa base sociale, l’armée s’est mise en avant ».
Et de conclure qu’il ne reste à ceux qui tiennent les rênes du pays « que la coercition, l’exacerbation du chauvinisme et un projet conservateur (…) On flatte une forme d’identité fantasmée, présentée comme assiégée ».

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