Alors que le Maroc n’a émis aucune réaction officielle jusqu’ici, et visiblement dans l’impasse, le régime d’Alger, via son ministère des Affaires étrangères, a publié un communiqué officiel parlant d’un changement tout aussi officiel de la position de la France quant à l’affaire du Sahara. Ainsi, Paris apporte «un soutien sans équivoque et sans nuance au plan d’autonomie sur le Sahara Occidental dans le cadre de la souveraineté marocaine». Une décision «communiquée officiellement aux autorités algériennes par les autorités françaises ces derniers jours» et à laquelle Alger réagit bien timidement cette fois.
Panique à bord. C’est à l’évidence ce qui ressort de l’état d’esprit qui règne au sein du régime d’Alger ce jeudi 25 juillet. En cause, un communiqué du ministère des Affaires étrangères du voisin, publié ce jour et relayé par l’agence officielle du régime comme par ses médias. On y apprend que la France a officiellement changé de position à l’égard du dossier du Sahara et qu’elle apporte un soutien désormais «sans équivoque et sans nuance au plan d’autonomie sur le Sahara Occidental dans le cadre de la souveraineté marocaine». Une décision «communiquée officiellement aux autorités algériennes par les autorités françaises ces derniers jours». Ceci, alors que la France n’a pour l’heure pas encore fait de déclaration publique sur le sujet et que le Maroc n’a pas encore réagi.
De la tirade voulant qu’Alger accueille la nouvelle, «avec un grand regret et une profonde désapprobation», qualifiant la décision comme «inattendue, inopportune et contre-productive», on retiendra le caractère bien tiède de la réaction. Des phrases comme «les puissances coloniales, anciennes et nouvelles, savent se reconnaître, se comprendre et se rendre des mains secourables», ou une décision «d’autant plus malvenue qu’elle émane d’un membre permanent du Conseil de Sécurité» sont tout juste bonnes à s’autoconsoler.
Comme les menaces proférées en fin de communiqué, voulant que le «gouvernement algérien tire toutes les conséquences qui découlent de cette décision française et dont le Gouvernement français assume seul la pleine et entière responsabilité» sont quelque peu indignes d’un régime habitué aux réactions intempestives et brutales. C’est à se demander si la canicule qui frappe à Alger n’a pas adouci les mœurs de la gérontocratie au pouvoir.
De quoi jurer, on s’en souvient, avec la réaction algérienne quant au même soutien à la marocanité du Sahara, apporté par l’Espagne. Le pouvoir algérien était littéralement en furie contre Madrid, le voisin ibérique ayant opéré, un certain 14 mars 2022 (déjà!), un revirement radical dans sa position sur le différend du Sahara, à l’avantage du Maroc. Le 19 mars de la même année, Alger a rappelé son ambassadeur Saïd Moussi, curieusement celui-là même qui officie actuellement à Paris, en guise de protestation. Dans la foulée, en juin 2022, le régime algérien a décidé la suspension «immédiate» du Traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération conclu le 8 octobre 2002 avec le Royaume d’Espagne. Forcée de maintenir son approvisionnement en gaz de l’Espagne, Alger n’en a pas moins joué. Y compris sur la facture.
À l’arrivée, 19 mois d’une crise aigüe, de chantages et d’une fastidieuse quête d’un changement espéré de la position espagnole sur son appui irréversible au Maroc, s’agissant de son Sahara occidental. Le tout s’est achevé dans un cul-de-sac et c’est la mort dans l’âme qu’Alger a annoncé en novembre dernier un nouvel ambassadeur à Madrid.
Cette fois, l’attitude du régime d’Alger et sa réaction anticipée trahissent surtout son affolement. La timidité de la riposte rappelle, même de loin, le silence total du régime d’Alger quand un certain Donald Trump a annoncé le 10 décembre 2020 que les États-Unis reconnaissent désormais la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. «Aujourd’hui, j’ai signé une proclamation reconnaissant la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. La proposition d’autonomie sérieuse, crédible et réaliste du Maroc est la SEULE base d’une solution juste et durable pour une paix et une prospérité durables!», avait-il tweeté à l’époque.
Une position qui n’a pas changé d’un iota depuis, malgré les espoirs déçus d’Alger de voir l’administration Biden revenir en arrière. Il n’en sera rien, a récemment rappelé l’ambassadrice américaine à Alger, Elizabeth Moore Aubin, qui a clairement signifié qu’il n’y aura aucun retour sur le soutien de Washington à la marocanité du Sahara et au plan d’autonomie. La proclamation de reconnaissance favorable au Royaume de l’ancien président Donald Trump est «un fait historique», a-t-elle expliqué dans un entretien à La Patrie News, un des principaux porte-voix du régime. Ce sera tout, merci. Là encore, la junte a comme avalé sa langue. On l’aura compris, au pays du monde à l’envers, les réactions se font non pas en fonction d’un soi-disant principe, mais de qui est en face. Devant l’Espagne, on sort l’artillerie lourde avant de vite se calmer. Quand ce sont les États-Unis, on se tait. Face à la France, on fait dans la dentelle. Même si tout est de savoir si le régime d’Alger va se contenter de ce communiqué mou.
Reste que la riposte anticipée est un fait inhabituel dans les us et coutumes diplomatiques, nous explique un diplomate. «Cela ne se fait pas de réagir avant une déclaration officielle. Le but apparent me semble une tentative d’édulcorer l’impact de ce pas historique, d’en brouiller la portée», affirme-t-il. Il n’en sera évidemment rien et la junte n’est pas à une goujaterie près. D’ailleurs, il n’est pas exclu que l’objectif de la manœuvre soit de griller la politesse aux deux chefs d’État, le roi Mohammed VI et le président Emmanuel Macron. Folklore mis de côté, il est une vérité face à laquelle le régime d’Alger ne peut plus rien: les reconnaissances se multiplient et il ne peut pas rester dans une logique hystérique et s’isoler de la communauté internationale. Les discours, et leurs différents niveaux de soumission ou de violence, n’y changeront rien.
Par Tarik Qattab