<< C’est une règle générale : l’homme qui réussit le mieux dans la vie est celui qui détient la meilleure information ». Benjamin Disraeli.
Chères lectrices, chers lecteurs ;
1. Le Professeur Mulumba Lukoji est un artisan majeur oublié de la matérialisation de la démocratie congolaise.
2. Décédé le 03 mars 1997, la commémoration du 26ème anniversaire du voyage sans retour de Mulumba Lukoji a coïncidé avec la visite du Président français, Emmanuel Macron, en République démocratique du Congo. Ce dernier est arrivé au Congo Kinshasa le 03 mars 2023 autour de 22h 45 minutes.
3. Par cette lettre sociale, je rends hommage au Professeur Mulumba Lukoji, qui s’endort bientôt 26 ans, parce qu’il a produit des écrits documentaires notamment les arrêtés n° PM/002/91 et n° PM/004/91 créant la commission chargée de l’organisation matérielle et technique de la conférence nationale souveraine qu’il a ouverte le 07 août 1991. La conférence nationale souveraine a été le moment pour réparer le passé et préparer l’avenir.
4. L’organisation de la conférence nationale fut une étape déterminante dans le processus de la démocratisation du pays. Cette conférence avait fait renaitre, chez la plupart des congolais alors zaïrois, l’espoir d’un pays où les congolais alors zaïrois pouvaient vivre en dignité et en honneur sur le sol de leurs aïeux.
5. Cet espoir renaissait parce que le pays avait connu une dégradation générale. Dans son discours d’ouverture de ladite conférence, le Premier Ministre Mulumba Lukoji avait attribué cette dégradation aux politiciens. En scientifique et technocrate très avisé, devant trois mille délégués de la conférence nationale souveraine réunis dans la grande salle au palais du peuple, le 07 août 1991, à Kinshasa, Mulumba Lukoji dit : « Chaque homme politique zaïrois a sa part de responsabilité dans la dégradation générale du pays ».
6. J’ai exhumé cet extrait du discours du Premier Ministre Mulumba pour montrer que les propos du Président français en visite au Congo Kinshasa : « Depuis 1994, vous n’avez jamais été capable de restaurer la souveraineté ni militaire, ni sécuritaire ni administrative. C’est une réalité. Il ne faut pas chercher des coupables à l’extérieur » tenus le 04 mars 2023, ne constituent pas une nouveauté. Car, l’absence de souveraine militaire, sécuritaire et administrative est incluse dans la dégradation générale évoquée par Mulumba Lukoji.
7. Commentant cet extrait du discours du Premier Ministre Mulumba Lukoji, le quotidien français le monde, dans un titre « Le zaïre à son tour » du 09 aout 1991, écrit : « Mulumba Lukoji a réussi le tour de force dans son discours, de critiquer son « maitre » sans le nommer ».
8. Disons que cette critique visait à faire prendre conscience aux conférenciers du rôle que devrait jouer chacun d’eux dans la restauration du nouvel ordre socio économico politique au Congo Kinshasa.
9. Hélas, cette prise de conscience des politiques et politiciens congolais se fait encore attendre jusqu’à ce jour. Alors que Gauthier DE VILLERS (1998 :148) montre que l’essentiel de la Conférence Nationale Souveraine était : « faire la relecture critique de l’histoire de notre pays et l’énonciation des perspectives d’avenir en levant des options majeures sur les structures adaptées pour un pays qui était à refaire, et le profil des hommes capables d’animer ces structures ». Il s’agit là d’une tâche que les congolais alors zaïrois devraient se donner avec le sentiment du devoir.
10. Ce sentiment du devoir est à découvrir à travers la production intellectuelle de la conférence nationale souveraine qui constitue jusqu’à présent la pierre angulaire de la démocratie congolaise. Cette production intellectuelle demeure une boussole pour la gouvernance du pays et de ses structures.
11. La lecture de la production intellectuelle de la CNS montre que cette dernière a été pensée et matérialisée dans le souci de trouver des solutions aux problèmes de vie des congolais alors zaïrois.
12. Cette préoccupation majeure de trouver des solutions aux problèmes des congolais est aussi présentée dans le discours d’installation officielle du bureau définitif de la conférence nationale souveraine. DE VILLERS ci-haut cité nous présente un extrait du discours de Laurent Monsengwo, Président du Bureau, qui revient sur la préoccupation des solutions aux problèmes des congolais. Dans son discours, le Président de ce bureau dit : « Nous sommes venus en ce lieu pour oeuvrer à l’amélioration des conditions de vie de nos populations. Quiconque poursuivrait ici un objectif autre que le mieux-être intégral de nos populations, ferait mieux de quitter le palais du Peuple. Car, il n’a pas sa place ici ».
13. Pour trouver des solutions aux problèmes des congolais, la Conférence Nationale souveraine devrait, outre la production intellectuelle notamment le projet de la loi fondamentale de la 3ème République, élire un Premier Ministre qui devrait former un gouvernement pour exécuter les résolutions de cette Conférence.
14. C’était à ce titre qu’Etienne Tshisekedi fut élu Premier Ministre, le 14 aout 1992, à la Conférence Nationale Souveraine. Cependant, peu avant son élection, le candidat Premier Ministre s’était adressé à ses électeurs, les conférenciers par une allocution publiée par la revue Zaïre Afrique n°267. « Nous voici enfin sur le point de poser notre premier acte de démocratie et de liberté. Idéaux pour lesquels des compatriotes d’infortune et moi-même avons lutté et consacré toute notre vie durant ces douze dernières années » tel est l’extrait de cette allocution qui montre que la conférence nationale souveraine a été un cadre pour matérialiser la démocratie. Je pense qu’Etienne Tshisekedi fait allusion à la lettre ouverte du 1er novembre 1980 adressée au Président de la République du Zaïre. Lettre qui a déclenché la lutte pour la démocratie
15. Ainsi donc, l’élection d’Etienne Tshisekedi comme premier ministre a non seulement confirmé son leadership politique, mais aussi certifié la confiance et la légitimité sociologique qu’il a bénéficiées des zaïrois. Son élection comme premier ministre était la satisfaction d’un de besoin de réalisation au regard de la pyramide des besoins du psychologue américain Abraham Maslow.
16. Comme tout leader digne de ce concept, la fierté d’Etienne Tshisekedi d’être élu premier ministre à la Conférence Nationale Souveraine, résidait dans la confirmation de sa grandeur et sa constance par les conférenciers. Ces conférenciers étaient en majorité d’une bonne qualité technique, intellectuelle et morale.
17. C’est alors que rendre hommage à Mulumba Lukoji trouve tout son sens dans la mesure où n’eut été sa volonté prométhéenne, les zaïrois ne pouvaient pas trouver le cadre légal pour légitimer le leadership, la grandeur et la constance d’Etienne Tshisekedi. C’était à la conférence qu’Etienne Tshisekedi a satisfait au test de sa grandeur et de sa popularité au Zaïre par voie des urnes.
18. Je ne doute pas que des congolais qui ne savent pas encore apprécier, reconnaitre et valoriser les efforts de nos concitoyens disent que c’était un vent démocratique que personne ne pouvait empêcher l’avènement.
19. A eux, j’oppose la phrase très célèbre du Premier Ministre Nguz qui avait dit : « je ferme avec force la Conférence Nationale Souveraine ». C’était durant ce même vent démocratique que ce premier ministre, qui n’avait pas de volonté du changement, avait fermé la conférence nationale souveraine.
20. Je rends hommage à Mulumba Lukoji Crispin qui a su faire l’essentiel en peu de temps. Nommé Premier Ministre le 1er avril 1991, il a produit les écrits documentaires nécessaires pour l’organisation technique et matérielle de la conférence nationale souveraine. Le 07 août 1991, il a ouvert la Conférence nationale souveraine et le 29 septembre 1991 il a été limogé de son poste de premier ministre. Le 03 mars 1997 Mulumba Lukoji s’est endormis pour toujours.
21. Mulumba Lukoji est parti, mais la lecture de ses écrits documentaires donne une leçon aux politiques et politiciens congolais : pour faire l’essentiel dans un pays qui est à refaire comme la RDC on utilise le temps qu’on a, on n’a pas besoin d’accumuler plusieurs années.
22. Une autre leçon que Mulumba Lukoji donne aux politiques et politiciens congolais est qu’il ne faut pas perdre de lucidité à cause de l’exercice du pouvoir, des rites du pouvoir, des lieux du pouvoir, des privilèges du pouvoir.
23. Rendre hommage mérité au Professeur Mulumba Lukoji Crispin avec les lunettes d’un anthropobibliologue est une analyse anthropobibliologique des hommes exceptionnels qui ont fait des évènements d’exception au Congo Kinshasa. Ces évènements sont des traces indélébiles qui ont fait le quotidien à un moment donné de l’histoire de notre pays sur la finalité de la démocratie congolaise. C’est aussi montrer aux politiques et politiciens congolais le modèle politique purement congolais à suivre pour un Congo meilleur.
24. Mulumba Lukoji a fait sa part, j’ai fait aussi ma part. Si vous êtes intéressés par cette lettre sociale congolaise, rejoignez la coupe pleine au numéro + 243 994 994 872 pour appel normal, WhatsApp ou twiter et à l’e-mail jsphngandu@gmail.com pour la suite.
Fait à Kinshasa, le 03 mars 2023
Jean Joseph NGANDU NKONGOLO, Anthropobibliologue, Expert en Anthropobibliologie du Travail, Formateur Psycho SocioProfessionnel et Chercheur à l’Observatoire Congolais du Travail.