Alors que Kagame proposait le retrait de M23/RDF à la date ‘énigmatique’ du 1er janvier 2024, à 5 jours des élections générales en République démocratique du Congo, le vendredi 15 décembre 2023, depuis Nairobi au Kenya, l’ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), Corneille Nangaa, lance un nouveau mouvement politico-militaire dénommé « Alliance Fleuve Congo ». A ces côtés, il y a l’un des Présidents du Mouvement de 23 mars (M23), Bertrand Bisimwa.
Ce mouvement politico- militaire qui venait de naitre revendique l’adhésion en son sein de plus de 10 groupes armés, 17 partis politiques, 2 regroupements politiques et plus de 267 personnalités politiques. Une annonce qui a soulevé un tôlée de désapprobation à travers le monde, condamnant le fait qu’en remplaçant le M23/RDF par l’AFC tout en ternissant l’image de la CENI, l’ancien patron de la Centrale électorale opte pour la perpétuation des atrocités dans la RDC.
Toutefois, le ministère des Affaires étrangères et de la Diaspora de la République du Kenya a affirmé que «le Kenya est un État ouvert et démocratique où la liberté de la presse est garantie. En tant que tel, les ressortissants nationaux et étrangers peuvent s’exprimer auprès des médias kenyans sans référence au gouvernement », a déclaré Musalia Mudavadi, Premier Secrétaire du Cabinet et Secrétaire du Cabinet des Affaires étrangères et de la Diaspora. Et d’ajouter : « Le Kenya se dissocie fermement de toute déclaration ou activité susceptible de nuire à la paix et à la sécurité de la Nation amicale de la RDC et a lancé une enquête pour déterminer l’identité des auteurs de la déclaration et dans quelle mesure leurs déclarations échappent à la protection constitutionnelle de la liberté d’expression ».
Tout en se positionnant contre le pouvoir en place, Corneille Nangaa affirme avoir l’ambition de “sauver” la RDC et garantir un retour à la paix. Ce que la création d’une nouvelle rébellion ne peut confirmer.
Le Président honoraire de la CENI affirme ainsi recourir à l’article 64 de la Constitution pour libérer le pays de Lumumba. Ce qui ne fait pas l’unanimité car, des voix s’élèvent pour condamner sa démarche fustigeant que si « la criminalité et les violences ont été légitimées comme seul moyen d’accès au pouvoir depuis 1960, par les hommes politiques Congolais sous-direction de leur maîtres du Conseil de Sécurité des Nations Unies », il est temps que le peuple congolais s’habitue au changement démocratique et pacifique de pouvoir comme fut le cas en 2019 entre Joseph Kabila Kabange et Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo.
Après s’être exilé en mi-2023, estimant ne plus être en sécurité après avoir critiqué la gouvernance de Tshisekedi qu’il n’a eu de cesse de qualifier de « chaotique » sur fond de « dérives dictatoriales », ce vendredi 15 décembre 2023 à Nairobi au Kenya, lors d’une conférence de presse, l’ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) 2018, Corneille Nangaa, avait annoncé la création d’une coalition baptisée “Alliance fleuve Congo”. Une plateforme composite qui, affirme-t-on, réunirait des représentants politiques de la société civile et des groupes armés comme le M23 ainsi que les Pareco au Nord-Kivu, les Twiraneho au Sud-Kivu ou encore les FRPI et les Zaïre dans l’Ituri, tous soutenus par le maffioso des affairistes politico-militaires du Tutsipower, qui sèment désolation et terreur en RDC depuis octobre 1996 avec la guerre de l’AFDL!
Enigmatique AFC, des propos qui évoquent la proposition de Kagame de retirer le M23/RDF le 1er Janvier !
Par des propos flous, ladite coalition affirme se baser sur l’article 64 de la Constitution congolaise qui indique que “tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution”.
Selon les membres de cette coalition, à partir du 20 décembre prochain, Félix Tshisekedi ne sera plus le président de la Rdc et comme la publication des résultats interviendra le 31 décembre, il est donc clair, selon leur logique, qu’en date du 1er Janvier 2024, contestant les résultats des élections, que “Alliance fleuve Congo” entre en action pour « sauver » le pays à la manière des ‘libérateurs’ de l’AFDL qui se sont mutés en RCD, CNDP, M23 et se mute en AFC actuellement engrangeant plus de 12 000 000 de vies, un « fleuve Congo de sang ».
Pour l’AFC, le fait de lancer un appel aux partis politiques, à la société civile, aux forces de résistance et d’autodéfense populaires, à l’armée congolaise, ainsi qu’aux leaders communautaires et à la diaspora, les intentions de cette nouvelle coalition restent peu claires. Dans son propos, Corneille Nangaa fait planer à la fois le spectre de coup d’Etat, coup de bluff et de ballon d’essai à quelques jours du scrutin présidentiel. Parfois, c’est l’impression d’annoncer une “possible transition” qui permettra d’organiser de meilleures élections, comme l’a expliqué Corneille Nangaa au cours de cette conférence de presse.
« Si pour y parvenir, il faut prendre le pouvoir à Kinshasa, nous le prendrons”, a-t-il indiqué lors de sa conférence de presse suivie en direct sur internet, a insisté l’ancien patron de la CENI.
Se voulant de la même veine que l’AFDL (Alliance des forces démocratiques de libération) qui, en 1997, avait renversé le Maréchal Mobutu Sese Seko, les membres de cette alliance considèrent que le gouvernement congolais actuel est, « incapable de restaurer l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du territoire national ».
Des propos démagogiques pour débaucher les FARDC et la population pour saboter les élections
Dans son mot du jour, l’initiateur de l’AFC fait des yeux doux aux FARDC et à la population qui s’apprête à aller voter, par des discours populistes et démagogiques. Corneille Nangaa a affirmé que « vu que le régime de Kinshasa a fait le choix délibéré de sous-traiter la Sécurité nationale en utilisant la guerre comme un fonds de commerce, sacrifiant les Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) au profit des mercenaires étrangers et des Forces négatives qui écument l’Est du pays y semant mort et désolation », faisant ainsi échos au discours de Kagame qui accuse Kinshasa de recourir aux mercenaires. Un discours populiste qui n’oublie pas la masse affirmant « Etant donné que le gouvernement de la RDC viole délibérément la Constitution, les lois de la République et tous les traités internationaux conclus par notre pays », l’Alliance fleuve Congo dit vouloir, “œuvrer pour le bien-être des Congolais” et précise dans sa communication que le salut et le bien-être du Congo ne dépendent que des Congolais eux-mêmes. Et de poursuivre en jetant le discrédit sur le processus électoral, il affirme « Etant tous témoins de la confiscation du processus électoral en cours par le même régime à tous les niveaux et sa décision d’opérer un coup d’état électoral ».
La Rdc rappelle ses ambassadeurs au Kenya et auprès de l’EAC
Comme il fallait s’y attendre, la Rdc a rappelé ses ambassadeurs auprès du Kenya et de la communauté des États d’Afrique de l’Est (EAC) après l’annonce par l’ancien président de la Commission électorale.
Après que le Vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur, Peter Kazadi ait convoqué l’ambassadeur du Kenya pour des “explications”, le Vice-Premier ministre, ministre des Affaires étrangères a décidé de rappeler les ambassadeurs John Nyakeru (Kenya) et Jean-Pierre Masala, ambassadeur de la RDC auprès de l’EAC avec résidence à Dar es-Salaam”, a déclaré à l’agence Anadolu, Alain Tshibanda, porte-parole du ministre des Affaires étrangères de la Rdc.
Dans la soirée de ce même vendredi, le porte-parole du gouvernement congolais, Patrick Muyaya a déclaré à l’agence Anadolu qu’on “ne peut pas comprendre qu’un pays comme le Kenya, avec qui nous travaillons de manière étroite pour le retour de la paix dans l’Est de la RDC, puisse abriter des activités subversives de cette nature. Ils nous doivent des explications”.
Entre temps, Kinshasa et Kigali s’engagent dans un nouveau cessez-le-feu dans les zones sous occupation du M23 en République démocratique du Congo (RDC), selon une annonce des autorités américaines. Cette trêve, en vigueur du 14 au 28 décembre, succède à un précédent cessez-le-feu de 72 heures que les États-Unis considèrent comme un succès.
Dans un communiqué publié vendredi, la Maison-Blanche indique que le gouvernement rwandais coordonnera avec les partenaires régionaux pour obtenir l’engagement du M23 à cesser ses opérations offensives. Les autorités américaines ont également obtenu des engagements des gouvernements congolais et rwandais pour sécuriser le retour des civils dans leurs communautés.
Est-ce le passage de témoins entre le M23 et l’Alliance fleuve Congo de Nangaa ?
Willy Makumi Motosia