Je suis très heureux de vous accueillir à la séance plénière 2024 des conseils des gouverneurs du Fonds monétaire international et du Groupe de la Banque mondiale.
Je souhaite la bienvenue à la Directrice générale du FMI, Mme Kristalina Georgieva et au Président du Groupe de la Banque mondiale, M. Ajay Banga. Mme Georgieva, je vous adresse toutes mes félicitations pour le début de votre second mandat.
L’année 2024 revêt une importance particulière. En effet, nous célébrons cette année le 80e anniversaire de la création des institutions de Bretton Woods, qui a été un tournant majeur dans l’histoire de la gouvernance économique mondiale. J’aimerais revenir sur les propos du premier Président des conseils des gouverneurs des assemblées annuelles, le secrétaire au Trésor américain, John W. Snyder : « En adhérant au FMI et à la Banque mondiale, nos États respectifs ont non seulement investi d’importantes sommes d’argent, ils ont aussi, dans une large mesure, misé leur destin économique sur le succès de ces institutions. Nous avons une responsabilité envers nos États et, surtout, envers les citoyens que nous représentons et l’espoir qui les anime ».
Ces mots, prononcés il y a 80 ans, résonnent toujours avec pertinence aujourd’hui. Ces 80 dernières années, le FMI et la Banque mondiale ont été une source d’espoir, maintenant le cap dans les crises mondiales, les guerres ou les pandémies. Même dans les moments difficiles, nous faisons preuve de résilience. Le fait qu’un représentant d’un petit État comme le mien préside le conseil des gouverneurs lors de cette réunion historique témoigne de la nature inclusive de ces institutions.
En dépit du durcissement des conditions financières et de la montée des tensions géopolitiques, l’économie mondiale continue de montrer une vigueur remarquable. Un atterrissage en douceur est possible. L’inflation diminue. Nous ne pouvons cependant pas nous reposer sur nos lauriers. L’incertitude demeure élevée. Les conflits et bouleversements actuels dans de nombreuses régions du monde ternissent nos progrès. Toute escalade aurait des conséquences particulièrement graves pour les pays vulnérables, notamment en raison de la hausse des prix des produits de base.
Oui, il reste des défis majeurs à relever, et je voudrais en souligner trois.
Tout d’abord, le changement climatique. Les petits pays, comme les Maldives, sont en première ligne face au changement climatique. Les Maldives ont pour objectif de produire 33 % de leur électricité à partir de sources renouvelables d’ici à 2028. Cette transition renforcera la résilience au changement climatique et permettra de réaliser d’importantes économies budgétaires et d’épargner des devises. Pour atteindre cet objectif, le pays a besoin de 1,3 milliard de dollars pour moderniser son infrastructure électrique. À ce jour, seulement 13 % de ce montant ont été engagés par les donateurs. Les petits États insulaires en développement (PEID) comme les Maldives appellent les institutions financières internationales à faciliter l’accès à un financement plus abordable pour améliorer l’adaptation au changement climatique et atténuer ses effets, selon les principes d’une transition énergétique juste. Il nous faut saluer la mise en place de la facilité pour la résilience et la durabilité du FMI, ainsi que le financement record de 42,6 milliards de dollars alloué par la Banque mondiale pour l’action climatique au cours de l’exercice 2024, mais il faut aller plus loin, en particulier pour les PEID vulnérables au changement climatique. Nous devons aussi faire preuve d’innovation et d’appliquer des stratégies visant à mobiliser les investissements du secteur privé.
Deuxièmement, la viabilité de la dette. Plus des deux tiers des pays émergents et pays en développement sont exposés à un risque élevé de surendettement. La table ronde mondiale sur la dette souveraine a certes favorisé la collaboration, mais des mesures supplémentaires sont nécessaires. L’analyse de viabilité de la dette doit davantage prendre en compte le contexte national, et la révision en cours du cadre de viabilité de la dette pour les pays à faible revenu devrait intégrer les besoins spécifiques des PEID. Le FMI, la Banque mondiale et les banques multilatérales de développement devraient prendre des mesures audacieuses pour soutenir les pays en situation de surendettement. Les banques multilatérales de développement peuvent aussi mettre en place des dispositifs tels que les échanges de dettes contre des investissements en faveur de l’adaptation au changement climatique.
En dernier lieu, les réformes structurelles. Pour les pays émergents et pays en développement, nous devons renforcer les capacités de production et les capacités de l’État. Les institutions de Bretton Woods devraient se consacrer davantage à la création d’emplois, à l’égalité des chances, à la diversification économique et à l’impact des flux de réfugiés. Les réformes structurelles doivent aussi être socialement acceptables, de manière à garantir un large partage des avantages.
Au cours de l’année écoulée, le FMI et la Banque mondiale ont pris des initiatives importantes pour soutenir nos pays membres. L’achèvement de la 16e révision générale des quotes-parts, la reconstitution des ressources de l’IDA (IDA-21), la tenue du débat sur le réalignement des quotes-parts et l’augmentation du financement du Groupe de la Banque mondiale sont autant de mesures qui permettront à ces institutions de continuer à disposer de ressources suffisantes. Pour autant, nous ne devons pas perdre de vue l’importance d’assurer, d’une part, un accès et une représentation adéquats aux pays qui ont le plus besoin de l’aide des banques multilatérales de développement, et d’autre part, un traitement équitable pour tous les États membres.
La revue du fonds fiduciaire du FMI pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance, celle de sa politique en matière de commissions et de commissions additionnelles, ainsi que la reconstitution des ressources de l’IDA (IDA-21) par la Banque mondiale témoignent du soutien à nos nations les plus vulnérables.
Les discussions que j’ai eues au cours de ces assemblées annuelles ont mis en lumière un thème majeur : la nécessité absolue d’une coopération multilatérale. Mes amis, l’action collective est l’antidote à un monde de plus en plus fragmenté. Ce 80e anniversaire des institutions de Bretton Woods nous offre l’occasion de faire le point sur les résultats que nous avons obtenus et de préparer ensemble un avenir meilleur. Permettez-moi aussi de souhaiter la bienvenue au Liechtenstein qui est devenu en début de semaine le cent quatre-vingt-onzième pays membre du FMI, confirmant encore une fois l’importance du multilatéralisme.
Je me réjouis de la création d’un 25e siège au conseil d’administration du FMI pour l’Afrique subsaharienne et j’encourage vivement mes homologues gouverneurs à défendre la diversité et l’égalité des sexes. Pour préparer l’avenir, les institutions de Bretton Woods devraient adapter leurs conseils et leurs activités aux besoins et aux capacités spécifiques de chacun de leurs États membres. Dans le cas contraire, nous faillirons à notre responsabilité envers les citoyens que nous représentons, responsabilité que nous a rappelée avec sagesse le premier président des assemblées annuelles, John Snyder, il y a quatre-vingts ans.
Je voudrais, pour conclure, que nous gardions à l’esprit notre engagement indéfectible en faveur de la stabilité macroéconomique, de la prospérité et de la coopération.
Je vous remercie.