Conférence dans le cadre de la Journée Internationale de la Femme: L’implication de la femme congolaise dans la lutte antifasciste

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Mme Charlotte Buimpe Diombelayi, Deuxième Vice-Présidente Nationale de l’UDS chargée des Femmes et Présidente Nationale de la Ligue des Femmes de l’UDS, LIFUDS.

Etabli en Italie en 1922 par Benito Mussolini, le fascisme est un système politique nationaliste et totalitaire. Il est le produit de la guerre mais aussi des déceptions qui lui sont liées. Il rejette les droits de l’homme, le communisme, l’anarchisme, les libertés individuelles et le libéralisme politique.

Ayant pour mot d’ordre «vivre dangereusement » c’est-à-dire « être prêt à tout, à quelque danger possible », le credo du fascisme c’est l’héroïsme.

Les conséquences du fascisme c’est l’envahissement des Etats voisins ou lointains. Ses caractéristiques c’est l’institutionnalisation de la dictature, le culte du chef, l’instauration du parti unique. Donc, le fascisme se traduit par une domination culturelle, économique, militaire d’un Etat ou groupe d’Etats sur un autre Etat ou groupe d’Etats. Le but du fascisme est la formation d’un Etat dominateur.

L’antifascisme, par contre, est un mouvement visant à s’opposer au fascisme.

Quand on parle de l’antifascisme, on imagine souvent un milieu extrêmement masculin, virilisé, violent et inaccessible aux femmes. Ce n’est pas la réalité des organisations antifascistes.

L’antifascisme est un mouvement politique d’extrême gauche organisé en collectif autonome s’opposant à l’extrême droite et au fascisme.

Dans la lutte partisane au cours de la Seconde Guerre mondiale, les femmes ont joué le rôle d’agents de liaison dans les services d’espionnage et parfois même ont pris les armes au sein des formations militaires partisanes (maquis).

Malgré toute l’étude du rôle des femmes antifascistes et révolutionnaires, par exemple italiennes, dans l’émigration, dans le contexte international, il existe une sorte de black-out sur leur apport.

Il faut signaler que, dans les années 1920 et 1930, les femmes avaient créé de véritables réseaux de solidarité pour héberger les compatriotes exilés qui arrivaient d’Italie. Il n’est donc pas surprenant qu’aucune étude n’ait été faite jusque-là sur la participation ou la présence des femmes dans la guerre civile espagnole.

En 2014, on publia un livre sur les conseils de LAURA BRANCOFORTE où on parle des femmes qui, par leurs expériences souvent dramatiques et douloureuses ainsi que leurs croyances, ont décidé de participer à une guerre considérée comme un choc entre les conceptions opposées de la vie, de l’organisation sociale du monde, du futur et des cultures absolument antagonistes et irréconciliables.

Ces femmes étaient convaincues que l’émancipation féminine ne pouvait provenir que de la culture antifasciste et de la révolution, d’une révolution sociale et culturelle comme de genre. L’émancipation de la femme faisait partie d’un processus concernant plus largement toute l’humanité.

Dans ce sens qu’elles se soient revendiquées de l’anarchisme, du communisme, du socialisme ou bien qu’elles ne soient d’aucune affiliation. Cela ne faisait pas de différence.

Si elles ne prenaient le plus souvent les armes, qu’elles en aient été empêchées ou qu’elles ne l’aient pas souhaité, elles furent bel et bien impliquées dans de nombreux secteurs en rapport avec la guerre, la santé, la propagande, le journalisme, le transport d’armes et l’approvisionnement, l’industrie de guerre, autant de secteurs vitaux dans ce type de conflit total inauguré au 20me siècle.

Le déclenchement de la guerre civile ouvre une nouvelle phase et de nouvelles possibilités pour les hommes en général et les femmes en particulier, une phase symbolisée notamment par des affiches montrant une milicienne marchant à côté des hommes, du même pas.

Evidemment, l’image ne correspond pas toujours à la réalité mais c’était objectif. Pendant cette période, l’arrière-garde était exposée au même titre que la première ligne. Les services rendus par les infirmières dans les hôpitaux étaient épuisants et difficiles. En première ligne pendant la bataille, elles travaillaient nuit et jour.

La lutte antifasciste est aussi intimement liée à la lutte antiraciste. Car, «l’antifascisme ne peut être vivant et représenter une alternative que s’il est pluriel, riche de la diversité de ses membres, de ses méthodes, et ses débats et les alternatives qu’il porte», selon l’historien belge Julien DOTTEL.

Les femmes que nous sommes, nous ne devons pas attendre de cadeaux venant de nos camarades hommes ou des pouvoirs publics mais plutôt réclamer nos droits notamment ceux de participer à cette lutte antifasciste.

Les groupes antifascistes agissent par différents moyens : manifestations, actions plus violentes, partage d’informations, réflexion théorique comme celle-ci sur l’antifascisme, le graffitisme, la musique, etc.

Ces groupes antifascistes ne sont ni un parti politique ni une organisation politique constituée ni encore moins une association indépendants les uns des autres. Les groupes souvent «affinitaires forment une mascarade plus qu’un véritable mouvement traditionnel organisé» à en croire le politicologue Nicolas LEBOURG.

La femme congolaise et la lutte antifasciste

Il est établi que les femmes ont toujours joué un rôle important dans les luttes révolutionnaires. Mais, leurs héritages n’impriment pas encore la conscience d’une société patriarcale. En France, par exemple, la tendance commence à s’inverser.

Les dernières années ont vu les groupes antifascistes atteindre la parité homme-femme contre le fascisme, le capitalisme, l’impérialisme.

Les femmes antifascistes revendiquent désormais les droits de militer comme leurs camarades hommes. Une femme qui fait du bruit et qui frappe fort, ça dérange.

A mon humble avis, la lutte antifasciste de la femme congolaise c’est une lutte pour son émancipation, pour son épanouissement, pour la parité, pour l’égalité des chances et pour sa contribution au développement de notre société.

Dans notre pays, la lutte pour la libération totale de la femme piétine encore. S’il est établi que la révolution et la libération des femmes vont de pair, on doit reconnaître que l’émancipation n’est pas un acte de charité ni un élan d’humanisme. C’est une nécessité fondamentale pour le triomphe de la révolution. Car, «les femmes portent elles l’autre moitié du ciel» comme disait Thomas SANKARA.

Les femmes congolaises sont en lutte pour leurs droits. Mais, elles ont remporté des victoires éclatantes comme ailleurs dans les cas, notamment :

– des droits de vote ;

– de l’égalité salariale ;

– de la pénalisation du viol et du féminicide;

– du droit au divorce ;

– du congé de maternité et tant d’autres.

Mais, même si des avancées ont été obtenues, il faut bien constater que l’égalité entre les femmes et les hommes est loin d’être atteinte et même que certaines de ces avancées sont aujourd’hui menacées par l’esprit fasciste qui est de retour dans nos sociétés.

Par contre, dans les milieux ruraux congolais, l’oppression des femmes qui date de plusieurs décennies, perdure aujourd’hui. Elles sont également victimes des comportements sexistes et misogynes, de violence sexuelle et conjugale. Cette oppression est essentiellement causée par le capitalisme pour des raisons évidentes dont la principale consiste à avoir une partie de la classe travailleuse (la moitié) qu’il faut surexploiter (salaire encore plus bas, donc avantage de plus-value).

Certaines pratiques rétrogrades et discriminatoires handicapent les femmes congolaises d’atteindre leur émancipation :

– discrimination sur le marché du travail ;

– dépendance des femmes aux hommes (cause de violence conjugale) ;

– manque d’infrastructures collectives ;

– domination ;

– absence d’autonomie financière ;

– harcèlement ;

– contrôle du mari sur les correspondances et les relations de la femme ;

-atteinte à la vie privée de la femme;

– répression très dure de l’adultère pour les femmes.

En ce qui concerne l’égalité complète entre les femmes et les hommes qui n’est pas possible pour le moment, il est imputable au système néocolonial et au capitalisme en vogue dans notre pays. Car, le système capitaliste a plus besoin de l’oppression des femmes pour se maintenir en place et augmenter ses profits.

Pour ce qui est de l’épanouissement des femmes congolaises, il est à noter qu’être épanouie pour une femme c’est un cheminement personnel et multiforme en ce sens qu’il englobe à la fois le bien-être physique, émotionnel, social et souvent professionnel. Chaque femme a ses propres aspirations et sa propre définition de ce que signifie l’épanouissement.

Mais, pour mieux vivre son épanouissement, il y a des stratégies :

– s’octroyer du temps pour soi-même tout étant bienveillante envers soi-même sans oublier que chaque pas compte sur le chemin du bien-être et de la réalisation personnelle ;

– s’ouvrir à des nouvelles expériences parce que la découverte est un vecteur d’enrichissement personnel;

– sortir de la zone de confort et explorer de nouveaux horizons tant dans la vie personnelle que professionnelle ;

– s’informer à agir pour son bien-être ;

– s’engager dans un travail significatif et revalorisant,

– trouver une vocation ou une activité passionnante ;

– s’accepter et s’aimer.

Femme épanouie c’est une femme qui croit en elle, qui est responsable de sa vie, libre de ses choix. Ce qui est recommandé aux femmes congolaises.

Malheureusement, l’épanouissement chez les femmes congolaises rencontre quelques difficultés, à savoir l’inégalité des sexes, l’impunité et l’insuffisance des ressources humaines, techniques et financières.

Pour ce qui est de la parité homme-femme, son but est de lutter contre les inégalités et la discrimination fondées sur le sexe. Elle permet de réduire et d’abolir les inégalités liées à la rémunération, l’éducation, la représentation dans les institutions.

La promotion de la parité déjà garantie dans notre Constitution conduit à réduire la pauvreté, de promouvoir la santé, l’éducation, la protection et le bien-être des filles et des garçons sans discrimination.

Quant à l’égalité des chances c’est faire en sorte que tous les individus disposent des mêmes opportunités de développement social indépendamment de leurs origines sociales, de leurs sexes, de leurs moyens financiers.

Pour lutter contre les inégalités des chances dans notre pays, notre Gouvernement doit veiller à une répartition équitable des ressources, investir dans l’éducation et le développement des compétences, mettre en œuvre des mesures de protection sociale, lutter contre la discrimination, soutenir les groupes marginalisés.

S’agissant enfin de la contribution des femmes congolaises au développement, il sied qu’elles apportent une contribution inestimable à l’économie, que ce soit au sein des entreprises, dans les exploitations agricoles, comme entrepreneuses ou employées, ou par leur travail non-rémunéré à la maison où elles s’occupent de leurs enfants.

Femme congolaise antifasciste pour aller vers une égalité réelle, nous avons besoin d’un changement radical de notre société. L’antithèse du capitalisme c’est le socialisme, système de production basé sur une redistribution collective des richesses et qui ne met pas les travailleurs et les travailleuses en concurrence parce qu’il abolit l’exploitation de l’homme par l’homme.

En tant que femme congolaise antifasciste, je lance un appel pathétique à toutes les femmes congolaises d’être solidaires. Car, pour vaincre ce fléau qui ne nous permet pas de réaliser nos ambitions, nous devons nous unir pour notre émancipation.

A mon avis, le socialisme est le seul moyen de mettre fin à l’oppression véritable des femmes congolaises. Le mouvement des femmes constitue un cadre idéal de lutte et un élément clé de la conquête de l’ensemble des droits des femmes.

La révolution est l’œuvre des masses et non le produit d’une avant-garde éclairée et d’une génération spontanée.

En cette période de guerre d’agression de notre pays par le Rwanda, nous sommes toutes sans ignorer que la femme est, à la fois, la principale cible et la victime de cette persécution.

Nous devons nous révolter contre le fascisme. Mieux vaut une vie de lutte qu’une minute de silence.

Je dis et vous remercie.

Fait à Kinshasa, le 08 Mars 2025.-

Charlotte BUIMPE DIOMBELAYI

Deuxième Vice-Présidente Nationale de l’UDS chargée des Femmes, Présidente Nationale de la Ligue des Femmes de l’UDS

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