Faux : la loi sur le statut de l’Opposition ne donne pas mandat au Président de la République de désigner par ordonnance le porte-parole !

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Faute de temps matériel, l’Assemblée nationale (dotée depuis le 22 mai 2024 de son Bureau définitif, soit 23 jours avant la clôture de la session ordinaire) et le Sénat (en attente de l’installation du sien) ne sont pas en mesure d’être juridiquement en mesure d’actionner l’alinéa 2 de l’article 19 de la loi n°07/008 du 04 décembre 2007 portant statut de l’Opposition politique. Cet alinéa : « Les Députés et les Sénateurs de l’Opposition politique se réunissent, à cet effet, sous la facilitation conjointe des Bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, à la demande écrite de tout groupe parlementaire ou politique de l’Opposition politique, selon le cas». Première conséquence : la désignation du porte-parole doit attendre la rentrée parlementaire de septembre…

Trois raisons

D’ici au 15 septembre prochain, beaucoup d’eau doit couler sous le pont pour plusieurs raisons.

Première raison : une loi se fait pour être appliquée. Si on en veut pas, on ne la garde pas en l’état. On la fait soit amender, soit proroger. Or, depuis 17 ans, l’Opposition n’y trouve rien à redire.

Deuxième raison : dans sa configuration depuis 2006 pour l’Assemblée nationale et 2007 pour le Sénat, le Parlement RDCongolais évolue avec une Majorité et une Opposition issues toutes les deux des législatives. Aucun des quatre cycles électoraux organisés jusque-là n’a joui de l’unanimité. Il y a toujours contestation. Les vainqueurs sont contestés par les vaincus dont certains se reconnaissent de l’Opposition parlementaire. Cas du Mlc en 2006 et 2007, de l’Unc et de l’Ecidé en 2011, du Nouvel Élan en 2018.

Curieusement, l’Opposition parlementaire n’a jamais pu ni su s’appliquer la loi qui la régit, se privant délibérément des avantages lui reconnus aux articles 8 (droits) ainsi qu’aux articles 13, 14 et 15.

Troisième raison : dans la configuration actuelle, l’Opposition parlementaire est majoritairement katumbiste. Elle est du parti politique Ensemble. Son aile extra-parlementaire a la singularité d’être animée dans sa majorité par des acteurs politiques ayant participé à la présidentielle de 2023 : Martin Fayulu, Delly Sessanga et Adolphe Muzito. Ils ont eu des résultats connus de l’opinion. A trois réunis, ils n’ont même pas 5 députés nationaux. Il est probable qu’ils n’aient aucun sénateur.

Dès lors que le corps électoral pour l’élection ou la désignation du porte-parole est exclusivement constitué d’élus de l’Opposition parlementaire, il est quasiment impossible pour Fayulu, Sessanga ou Muzito de prendre la fonction sans l’apport des Katumbistes.

Deuxième conséquence : ces trois acteurs n’ont aucun intérêt à faire appliquer la loi sur le statut de l’Opposition. D’où le juridisme qu’ils développent ou font développer.

Parmi les preuves, il y a cet argument fallacieux de lier le statut du porte-parole à la promulgation d’une ordonnance présidentielle. Nulle part dans ce texte n’est prévu un mécanisme d’implication du Président de la République dans l’investiture, par ordonnance du Chef de l’Etat de surcroît, du porte-parole de l’opposition au motif pour ce dernier d’avoir rang de ministre d’État prévu à l’article 21.

L’article 20 est précis. Son libellé est le suivant : « Le Président de l’Assemblée nationale notifie le procès-verbal de la désignation du Porte-parole de I ‘Opposition politique aux Institutions de la République. Le Règlement intérieur de l’Opposition politique et le procès-verbal de désignation du Porte-parole de l’Opposition politique sont publiés au Journal officiel de la République». C’est tout.

Rien d’anormal, ni d’amoral, surtout pas d’illégal

Parmi les acteurs politiques interdits de toute objection : Delly Sessanga. Initiateur de la loi, il n’en est pas cependant le propriétaire pour prétendre avoir le monopole d’en connaître la lettre et l’esprit.

Lors de la présidentielle de 2023, il s’est désisté en faveur de Moïse Katumbi. En acceptant de jouer le jeu, tous les acteurs politiques ayant concurrencé le candidat Félix Tshisekedi sont de l’Opposition. Sauf ceux qui, dans la suite des évènements, ont rejoint la Majorité. Cas de Constant Mutamba.

Que Moïse Katumbi ait contesté les résultats de la présidentielle, c’est tout ce qu’il y a de normal. Qu’il ait laissé ou encouragé ses députés nationaux de siéger à l’Assemblée nationale, c’est tout ce qu’il y a également de normal. Que les députés d’Ensemble aient choisi, lors de la plénière consacrée à la Déclaration d’Appartenance, d’évoluer comme groupe parlementaire de l’Opposition, c’est davantage ce qu’il y a de normal.

Troisième conséquence : revendiquer l’application de la loi qui gère l’Opposition, surtout quand on connaît les avantages qui en découlent, n’a rien d’anormal, ni d’amoral, surtout pas d’illégal.

A partir de cet instant, la question est de savoir à qui profite la politique de la chaise vide qu’il préconise aux côtés de Martin Fayulu et d’Adolphe Muzito.

Il y a lieu de persister et signer : Allez-y Katumbi

La vérité à rétablir est que Moïse Katumbi et le groupe parlementaire de l’Opposition « Ensemble » ne doivent prendre peur, ni se sentir gênés à cause des menaces proférées par l’Opposition qui s’est voulu extra-parlementaire en s’abstenant d’investir dans les législatives, les provinciales et les sénatoriales. Or, ils savent que l’Assemblée nationale et le Sénat constituent la base électorale pour le porte-parole de l’Opposition.

Moralité : Moïse Katumbi n’a pas à céder aux pressions d’une Opposition qui n’a aucune expérience de gouvernance institutionnelle, à l’exception d’Adolphe Muzito.

Gouverneur du Katanga, Katumbi a des députés et aura des sénateurs conscients du fait que lorsqu’on a géré le pays, on a une perception différente du jeu et des enjeux du Pouvoir par rapport à ceux qui n’ont jamais été de l’Exécutif national ou provincial.

Il y a lieu alors de persister et signer : « Allez-y Katumbi ! Ça fait tout de même 17 ans que l’Opposition est sans porte-parole ».

Pour rappel, en 2020, Félix Tshisekedi s’était engagé à accélérer la désignation de cet animateur sans en faire son obligé. Ce n’est prévu ni dans la Constitution, ni dans la loi portant statut de l’Opposition.

Omer Nsongo die Lema

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