Deux évêques français et des représentants d’autres cultes se sont retrouvés mercredi 24 avril 2024 face aux députés de la commission spéciale qui travaille sur le projet de loi sur la fin de vie. Catholiques, protestants, orthodoxes, musulmans et bouddhistes ont été auditionnés à l’Assemblée nationale. D’une voix commune, ils ont exprimé leurs vives inquiétudes face à ce projet de loi de « l’aide à mourir ».
Communiqué la Conférence épiscopale française :
Ce mercredi 24 avril 2024, Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes, responsable du groupe de travail « Bioéthique » et Mgr Vincent Jordy, archevêque de Tours, vice-président de la CEF, en charge des questions sur la fin de vie, ont été auditionnés par la commission spéciale sur le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie. Les évêques de France se disent « sensibles aux soucis de vouloir promouvoir un modèle français de la fin de vie », où le soin et l’accompagnement sont au centre, mais il ne semble pas que le projet de loi présenté aille dans ce sens.
Sans avoir suffisamment de données sur les besoins réels, ce projet fait basculer vers un modèle qui rompt une digue essentielle, un principe structurant de notre société voire de notre civilisation, celui de l’interdit de tuer qui se trouve entre autres au cœur du serment d’Hippocrate. Cette loi introduit donc un déséquilibre, qui renforce les inquiétudes de l’Église de France quant aux effets sociaux d’un tel projet. Comme le souligne Mgr Vincent Jordy, « la dignité d’une société humaine consiste à accompagner la vie jusqu’à la mort et non à faciliter la mort ». Les évêques observent que ce texte de loi ne dit pas clairement ce qu’il ouvre comme possibilités et regrettent que ne soient pas clairement évoqué ce que prévoit de fait le projet de loi, à savoir, l’euthanasie et le suicide assisté.
Pour Mgr Pierre d’Ornellas : « il convient donc de bien nommer les choses, de les assumer pour s’assurer d’un débat éclairé. La réalité du contenu du texte et son objectif doivent être clairs ». Ils sont également surpris de l’usage qui est proposé de la notion de fraternité, aujourd’hui principe constitutionnel, qui assure la solidarité dans les droits économiques et sociaux, et qui devrait, avant toute chose, permettre une vraie égalité d’accès aux soins palliatifs, comme le prévoient les quatre lois depuis 1999. À ce titre, la priorité devrait être à la bonne application des lois existantes. Les évêques estiment qu’il est essentiel de prendre conscience des liens étroits entre la société et l’individu pour construire un avenir durable et équilibré.
Comme dans le concept de l’écologie intégrale, « tout est lié ». L’être humain est un être de relation. La liberté individuelle ne saurait se confondre avec l’individualisme, car la vie humaine trouve son sens dans la relation aux autres et ne peut être envisagée sans une interdépendance nécessairement solidaire. La manière d’envisager la mort est également l’objet d’un contrat social et la société ne se résume pas à une somme d’individus. Nul n’est l’exclusif propriétaire de sa vie, ses décisions comptent également pour les autres. La fraternité existe donc pour tisser des liens de vie et non pour arrêter la vie.