Eh bien, la guerre. Pour faire la guerre. Plus précisément, la guerre économique. Une guerre sans forme, une guerre sans règle, une guerre sans fin. Et, pour le Congo, une guerre pour rien.
C’est, en effet, de cela qu’il est question. C’est la guerre économique qui est à la base de toute la misère de ce pays; en un mot: la crise. La guerre pour arracher à ce pays ce que la nature ou, pour mieux le dire, le Bon Dieu lui a donné.
Une guerre qui remonte à des siècles, une guerre de prédation des richesses du Congo. Depuis la cupidité des premiers portugais qui avaient foulé le sol du territoire congolais, en 1491, à la recherche du mystérieux trésor du mythique Abbé Jean, la guerre est notre destin : des ivoires volées, du caoutchouc pillé, des mains coupées, des villages incendiés, des coutumes ravagées, des impôts volés, des détournements sans fin des deniers publics, sans compter la corruption et la concussion au sein du semblant d’Etat que la même guerre nous impose.
Une guerre dont la stratégie a toujours reposé sur la destruction du moindre tissu de l’économie nationale, une guerre qui pervertit les valeurs sociales que mon dialecte appelle “variables économiques” et qui nous impose ses lois, ses programmes déséconomiques, et ses équilibres étourdis.
La guerre, hélas, sous sa forme la plus brutale consistant à spolier le moindre “bien”, la moindre ressource de ce pays scandaleux.
Oui, la guerre, sous divers épisodes, menée contre le Congo par une armée fantomatique dont les éléments drogués sont enrôlés, dans la foulée, parmi ses propres enfants, ses propres frères, ses propres amis et ses voisins jaloux !
Bien sûr, qui n’a pas pillé le trésor public et/ou les ressources naturelles de ce pays depuis l’Etat Indépendant du Congo de Léopold le roi des Belges jusqu’à la génération présente sous la gouvernance des dirigeants actuels, les “de père et de mère” ?
En somme, que fait le Rwanda avec l’or et le coltan que l’Angola n’a pas fait avec le pétrole de Moanda et le diamant de Kahemba sur le territoire congolais ? Que font les américains avec le cuivre et le cobalt congolais que les chinois et les Suisses ne font pas.
Que font le M23 et les ADF-Nalu que les gouvernants avec ses “éléments incontrôlés” ou les kuluna congolais n’ont pas fait, y compris l’expansion du sang des compatriotes innocents ?
La pauvreté individuelle, la précarité des fonds publics, l’insécurité sociale et judiciaire, le chômage des ressources humaines et naturelles, la délinquance de l’Etat, la défaillance du Marché, … sont là les défis du gouvernement, mais ils sont essentiellement les produits de la guerre.
Cette guerre qui condamne à la vie de ghetto tout soubresaut de l’économie nationale réduite aux activités informelles, qui réserve à l’étranger l’exploitation des ressources nationales et maintient au chômage les forces du travail de la nation.
La guerre économique, bien entendu, dans ses formes diverses: celle qui fait du travail de l’homme une corvée intenable, et de toute relation sociale un cadre du sauve-qui-peut; celle qui désintègre les marchés et fait des fonctions de l’offre et de la demande des pires ennemis sur le terrain national; celle qui corrompt la monnaie du pays pour embarquer dans la dépravation toutes les variables des reliques de notre vieille économie et de notre société traditionnelle.
La guerre économique, c’est elle qui nous endort dans l’illusion d’un bonheur toujours fugitif, un bonheur intouchable, un bonheur infiniment plus proche et plus lointain à la fois.
Cette guerre qui fait de nos politiques économiques, au mieux, de simples hallucinations, et, au pire, des outils de notre répression collective ou le bras séculier de notre éternelle capitulation.
Cette guerre économique qui fait de notre indépendance politique et de notre souveraineté, des expressions éloquentes de notre stupide naïveté et de notre ignorance intellectuelle.
C’est, à mon avis, ce défi de la guerre que le gouvernement devrait relever pour restaurer les intérêts individuels des nationaux, les valeurs sociales de la nation et les institutions pérennes de l’Etat.
Oui, l’ultime mission du gouvernement congolais devrait être de refonder l’Etat congolais par la restructuration de l’économie nationale en gardant l’œil rivé sur les affres de la mondialisation et de la globalisation financière. Le travail individuel, les normes sociales et les lois de la république, voilà le schéma.
Une telle mission n’a pas besoin d’un gouvernement patapouf, tapageux et folklorique. C’est une affaire des jokers, des kamikazes, des commandos rodés.
La classe politique a fait les preuves de ce qu’elle vaut avec ses pseudos experts et ses anciens combattants : effacez le tableau.
Fructueux mandat et bonne chance au nouveau gouvernement.
Michel Nsomue