Les récentes positions du Parlement européen (PE) et les allégations contenues dans la résolution votée par la majorité des députés européens le 19 janvier, ont fortement été dénoncées au Maroc. Réuni en session plénière commune lundi, le Parlement marocain, de ses deux Chambres, a décidé de « reconsidérer ses relations » avec le Parlement européen.
Sollicité à ce sujet par Hespress Fr, le politologue Driss Aissaoui, a estimé que le Parlement Européen, en affirmant que le Maroc a des problèmes de respect des droits de l’Homme, de respect de la liberté de la presse, et de la justice, etc., vient de se rendre coupable d’une « initiative qui est souhaitée ».
Une initiative « très très mal reçue par les politiques au niveau du Parlement marocain », a souligné Aissaoui. Le Parlement qui a d’ailleurs organisé une session conjointe entre la 1re et la 2e Chambre ce lundi, a permis aux deux chambres « d’exprimer leur désapprobation par rapport à ce qu’on pourrait appeler, l’immixtion du Parlement européen dans les affaires internes du Maroc », a soutenu le politologue.
« La résolution européenne remet en cause l’indépendance du pouvoir judiciaire au Maroc, alors que depuis 2017, nous avons une autorité judiciaire totalement indépendante du ministère public. Et c’est une première, même par rapport à un certain nombre de pays européens. C’est une première aussi dans la mesure où nous avons le ministère public qui est indépendant, légal et qui traite tous les justiciables sur le même pied d’égalité. Comment voulez-vous qu’un parlement par le truchement des jeux de majorité et minorité, etc., puisse juger un pouvoir judiciaire aussi fort que celui que nous avons au Maroc, et qui a fait l’objet de grandes réformes », a expliqué Aissaoui.
Concernant les parlementaires européens, le politologue a rappelé que ces derniers ont cité des cas où on parle de problématiques de libertés des médias, de la presse et de conscience, en citant des cas de journalistes qui sont aujourd’hui incarcérés pour des affaires qui les concernent.
« La haute autorité judiciaire au Maroc vient de faire un communiqué exprimant sa surprise par rapport à la réaction du Parlement européen et pour dire nous ne comprenons pas pourquoi le Parlement européen a pris cette initiative en condamnant l’indépendance de la justice au Maroc. Chose qui est inacceptable et qui ne pouvait pas être acceptée », a commenté Aissaoui.
D’autre part, le politologue a constaté que ceux qui ont voté pour cette résolution européenne sont pour la plupart « des Macronistes, des gens proches d’Emmanuel Macron, des gens du milieu droit de la France, et c’est des gens qui travaillent en étroite coopération avec le voisin algérien », a-t-il soulevé.
« Il ne faut pas oublier que les autorités algériennes ont mis beaucoup d’argent dans ce lobbying pour infléchir l’autorité du Maroc. Or, comment voulez-vous donner de la crédibilité à cette situation, alors que le Maroc est un partenaire stratégique de l’UE, et de l’Europe de manière générale« , a tenu à rappeler Aissaoui, notant que « le Royaume dispose depuis un bon moment, d’un statut avancé dans ses relations avec l’Europe« , citant comme exemple le Haut-commissaire européen, Josep Borell, qui était récemment en visite au Maroc et qui a déclaré que « le Royaume est un pays qui a de la valeur et avec lequel l’Europe travaille avec beaucoup d’intelligence« .
En somme, le politologue a estimé que le Parlement européen vient de créer un problème, rappelant ainsi la dernière décision du Parlement marocain de revoir les relations de coopération et les relations qui lient le Maroc au Parlement européen
« Finalement, c’est un évènement assez grave et très difficile que le Parlement européen est en train de vivre. Et ce qui est extraordinaire, c’est que les politiques européens, et français en particulier, ne regardent pas les choses dans le bon sens. Maintenant, on se demande bien pourquoi la France ou encore l’Europe ne remet pas en cause la stabilité ni le caractère, disons, incongru du pouvoir algérien, qui vient de dissoudre complètement une importante institution, celle des Droits de l’Homme en Algérie. C’est un évènement extrêmement historique, dont personne ne parle que ce soit au niveau du Parlement européen où au niveau des médias européens », a-t-il souligné.
Pour conclure, le politique Aissaoui a estimé que le Parlement européen « aura des choses à se reprocher et à faire, et très certainement, l’avenir nous dira comment le Maroc va pouvoir réagir « .
Mais ce qu’il y a d’extrêmement important à remarquer, dit-il, et ce qui dérange, « c’est la présence du Maroc en Afrique, et sa politique africaine qui lui créent des problèmes avec des pays européens, comme la France, qui ont perdu leur pied et leur position au niveau de l’Afrique et ne souhaitent pas que le Maroc puisse continuer dans ce sens-là », appelant ainsi à être « plus vigilants et attentifs à cette situation ».