Les trois sujets de cette livraison sont destinés aux faiseurs d’opinion, particulièrement les communicateurs, acteurs politiques et professionnels des médias compris.
Dans leurs prestations, la tendance est à confondre memorandum d’entente avec accord, pose de la première pierre avec inauguration, de même qu’à pratiquer le reniement avec ou sans diabolisation.
Pourtant, il n’y a pas de confusion à entretenir là dessus, à moins de vouloir se livrer à la manipulation. L’autre dirait à la désinformation, à l’intoxication…
Commençons par memorandum d’entente et accord.
Le premier se définit comme ” Texte, dénué de valeur juridique contraignante, par lequel deux parties récapitulent leurs points de convergence dans le cours d’une négociation”. Ou encore ” document qui, en l’absence d’une certaine formalité, vise à enregistrer la volonté des parties de réaliser à l’avenir les procédures nécessaires à l’exécution d’un contrat pour une transaction ou une affaire internationale”.
Pour faire simple, juste une simple déclaration d’intention.
Le second se définit comme ” Arrangement entre deux ou plusieurs parties pour régler un différend, définir les modalités d’une entente ; convention, traité…”.
Autant on reconnaît la valeur juridique d’un accord – puisqu’on y prévoit les modalités de règlement d’un differend pendant l’application – autant on ne peut reconnaître quelque valeur juridique à un memorandum.
Conséquence : un memorandum d’entente n’est pas un accord ! Il peut ou ne pas être suivi de concrétisation sans engager l’une ou l’autre partie, voire les deux.
Cette précision est à porter aussi à la pose de la première pierre.
Un certain abus de langage fait dire à plusieurs faiseurs d’opinion que telle personnalité publique (souvent politique) a inauguré tel chantier alors qu’il ne s’agit que de pose de la pierre symbolique ou de la première pierre.
Il arrive que cette pose soit immédiatement suivie du démarrage des travaux. Tout comme il arrive que les travaux suivent plus tard, voire, hélas !, pas du tout.
Cette dernière catégorie nous intéresse, s’agissant du financement.
Des deux choses l’une : l’argent en rapport avec la pose de la première pierre est soit détourné (pour une autre priorité) sinon volé (et là, ça intéresse la justice), soit non disponibilisé à l’échéance convenue.
La non-disponibilisation pourrait avoir plusieurs causes.
Raison pour laquelle il ne sert vraiment à rien d’organiser une cérémonie de pose de première pierre sur base d’un financement non disponible puisqu’en elle-même, la cérémonie protocolaire impose des dépenses.
Conséquence fâcheuse : avant d’affirmer quoi que ce soit sur la pose de la première pierre, tout faiseur d’opinion avisé doit au préalable s’informer, au risque d’être ridicule s’il s’avère qu’il s’est trompé.
C’est le cas également avec des informations sur des contrats sur lesquels on se livre à des commentaires en se contentant de la clameur publique. Sans en connaître les tenants ni les aboutissants, on investit les médias avec des affirmations que la réalité du terrain finit par démonter. Suivez mon regard…
A ce moment précis ou la communication politique, mieux la propagande pré-électorale l’emporte sur l’information, il est indiqué pour les personnes morales ou physiques en charge de cette grosse responsabilité de maîtriser les éléments du langage.
Autrement, dans la confrontation du genre ” pièce contre pièce “, la désillusion pourrait s’avérer ravageuse.
Autant l’est le reniement sur fond ou non de diabolisation.
C’est une pratique (lisez culture) remontant aux années 1990 avec des expressions genre ” le temps des reniements “, ” bal des chauves “, ” transhumance ” ou ” repositionnement ” intégrées dans la terminologie politique congolaise.
Rien – en dehors de la basse flatterie – n’explique dans le chef des acteurs politiques la propension à justifier leur départ par la diabolisation du camp qu’ils quittent après en avoir été le chantre. Simple question de respect du peuple, singulièrement de l’électorat.
Le ” peuple Palu ” avait sévèrement sanctionné son dieu Antoine Gizenga aux élections de 2006. Au premier tour de la présidentielle, il avait entendu tous les leaders du parti diaboliser Joseph Kabila. Et voilà qu’au second tour, il va entendre les mêmes leaders sanctifier le même Kabila. Le report des voix au bénéfice de ce dernier ne représenta que le tiers de l’électorat Palu. En toute logique, le contrat politique n’avait pas été respecté.
On connaît la suite : même si Joseph Kabila avait respecté son engagement en laissant la primature au Palu tout le long du mandat 2006-2011, ce parti ne s’en est plus remis. Qui aurait un jour cru qu’il se livrerait à des empoignades fratricides pour adhérer à l’Union sacrée de la nation ?
Heureusement pour Kabila : il avait un deuxième fer au feu avec l’Udémo de Nzanga Mobutu. Ce qui le sauva…
Moralité : on peut bien quitter X pour Z sans nécessairement diaboliser le partenaire dont on se sépare pour (re)positionnement !
Car la grande difficulté à laquelle est confrontée la démocratie en RDC est l’incapacité de l’acteur politique congolais d’évoluer en dehors du pouvoir réduit à un employeur ! Cet acteur ayant tout d’un fonctionnaire, d’un militaire, d’un policier, bref d’un agent de l’État déguisé!
Évidemment, dans les abus de langage et de comportement relevés dans cette livraison, la victime est le peuple congolais.
Aussi, en pleine précampagne électorale autoproclamée, devient-il utile pour les protagonistes de tous bords, agents comme destinataires de la communication politique, de récuser tous les éléments de langage contreproductif !
En effet, lorsqu’on aura à débattre sur le plateau de la télé du nombre d’accords conclus alors qu’il ne s’agit que de memoranda, ou du nombre d’inaugurations effectuées alors qu’il est juste question des premières pierres posées, ou lorsqu’on aura à débattre de la transhumance avec l’utilisation du VAR (Video Assistant Referee), il en tombera d’écailles !
L’absentéisme au niveau de l’écran catholique pourrait affecter les centres de vote !
A ceux qui savent comprendre de tirer à temps la sonnette d’alarme…
Omer Nsongo die Lema