Existe-t-il un accord militaire qui lie la Rdc et la Russie ? Ceci, pendant que l’opinion nationale souhaiterait son activation afin de mettre un terme à la guerre et ainsi se faire respecter dans la région. Le Gouvernement de la République qui reconnait qu’il existe une démarche initiée en 1999, a affirmé qu’actuellement, il n’y a aucune discussion bilatérale entre les deux parties pour la mise en œuvre effective de ce projet d’accord. Et pourtant, il nous revient que la loi n°18/008 du 9 juillet 2028 existe réellement. Cette loi autorise la ratification par la République démocratique du Congo de la convention sur la coopération militaire et technique entre le gouvernement de la fédération de Russie et celui de la Rdc. C’est au regard de tout ceci que le Docteur Professeur Antoine Roger Lokongo pense qu’il faut tout simplement du courage de la part du président Felix Tshisekedi de le mettre en exécution, continuité de l’État et situation sécuritaire du pays caractérisée par l’occupation tutsi dans sa partie orientale, obligent. Ce professeur associé et chef de département des Sciences Sociales Politiques et Administratives et Relations Internationales au sein du Département de Droit à l’Université Président Joseph Kasa-Vubu à Boma, une université d’Etat a répondu aux questions du média en ligne Lequotidienrdc.com et un trihebdomadaire paraissant à Kinshasa :
Le quotidien : Nous avons appris que la Russie prépare un accord militaire avec la Rdc, de quoi est-il réellement question?
Professeur Antoine Roger Lokongo : Le gouvernement russe a déjà approuvé, mardi dernier, un projet d’accord de coopération militaire avec la République démocratique du Congo (RDC). L’information a été révélée par l’agence officielle russe, Tass, et largement relayée par la presse congolaise.
“Conformément à l’article 11 de la loi fédérale russe sur les accords internationaux de la Russie, (le gouvernement) a approuvé le projet d’accord de coopération militaire avec la République démocratique du Congo, présenté par le ministère russe de la Défense en coordination avec le ministère russe des Affaires étrangères et d’autres organes exécutifs fédéraux concernés”, a rapporté l’Agence Tass sur son site.
Le projet d’accord “prévoit l’organisation d’exercices et d’exercices conjoints, la participation et le suivi d’exercices à l’invitation des agences compétentes, les visites de navires et d’avions de guerre sur invitation ou demande, la formation des militaires et d’autres formats de coopération”.
Rappelons que l’accord militaire russo-congolais a été signé par Mzée Laurent Désiré Kabila en 1999 et ratifié par le Parlement de la Rdc en 2018 sous le Président Joseph Kabila. Il faut tout simplement du courage de la part de Felix Tshisekedi de le mettre en exécution, continuité de l’État et situation sécuritaire du pays caractérisée par l’occupation tutsi dans sa partie orientale, obligent.
Pensez-vous que les autorités congolaises ont pris trop de temps pour réagir, même si la population les poussait à conclure un accord avec la Russie?
La coopération militaire russe avec les pays africains, que ça soit en Centrafrique, au Mali, au Niger et au Burkina Faso a tourné la marée en faveur des armées nationales dans ces pays en dépit du fait que cette présence militaire russe a suscité des critiques défavorables dans les médias occidentaux, étant donné que les mercenaires Russes du Groupe Wagner constituent la colonne vertébrale de la présence militaire russe en Afrique.
Le peuple Congolais bien informé, exhorte son gouvernement à mettre en exécution l’accord que la Rdc a signé avec la Russie en vue de la libération définitive de l’Est du Congo en proie au terrorisme des groupes armés locaux et étrangers et à l’expansionnisme Tutsi qui se traduit par les agressions, invasions, occupations, pillages, viol utilisé comme arme de guerre et holocauste contre le peuple Congolais, tout cela perpétré par le Rwanda et l’Ouganda soutenus par les puissances occidentales, surtout anglo-saxonnes (États-Unis et Grande Bretagne). Si les Russes viennent répéter le même exploit qu’ils ont réalisé en Centrafrique voisine, les Congolais entassés dans des camps des déplacés pourront regagner leurs milieux d’origine.
Lorsque le Président Félix Tshisekedi a envoyé Gilbert Kabanda, son ministre de la Défense prendre langue avec les Russes à l’occasion de la Conférence Internationale sur la Sécurité tenue à Moscou du 15 au 28 août 2022 (il était prévu que le Président Tshisekedi lui-même fasse le périple de Moscou via Kiev. Mais le périple a été annulé à la dernière minute), les médias occidentaux ont utilisé des tactiques alarmistes pour décourager Kinshasa de renouer avec la Russie, redoutant l’arrivée des mercenaires Russes du Groupe Wagner à l’Est du Congo, au moment où cette dernière poursuivait son agression contre l’Ukraine.
Les médias occidentaux ont eu gain de cause parce que Kinshasa, qui s’est déjà allié à l’Ukraine à l’ONU, a gelé sa coopération militaire avec la Russie et a porté le choix sur les mercenaires occidentaux, notamment Français et Roumains. Les médias occidentaux se sont tus!
Selon vous, qu’est-ce qui poussent les Congolais à se tourner vers la Russie?
Ce qui pousse les Congolais profondément occidentales à se tourner vers la Russie et la Chine. C’est le désespoir, car l’ennemi rwando-ougandais avance et gagne du terrain et il est manifestement soutenu par les puissances occidentales, surtout les États-Unis, la Grande Bretagne, la France, la Belgique, la Pologne, etc. Preuve : l’Union Européenne vient de signer des accords miniers avec le Rwanda qui mène une guerre de rapine y compris par procuration en Rdc et qui est pourtant dépourvu des minerais dans son sous-sol.
Selon vous, quelle réaction peut avoir les États-Unis à la suite de cet accord?
Perdre l’influence sur le Congo, c’est ce qui donne froid aux dos des puissances occidentales, c’est-à-dire, l’Europe et ses extensions coloniales aux États-Unis, Canada, Australie et Nouvelle Zélande. C’est pourquoi les puissances occidentales s’assurent que le Congo, géo stratégiquement localisé au centre de l’Afrique et regorgeant des minerais stratégiques encore inexploités ne leur échappe jamais. Pour ce faire, face à la présence manifeste de la Chine et d’autres pays BRICS au Congo, et pour déstabiliser leurs investissements gagnant-gagnant, elles font tout pour soutenir des régimes compradores sans légitimité populaire au Congo comme celui de Mobutu. Mais si un leadership nationaliste s’élève au Congo, comme celui de Patrice Lumumba et celui de Mzee Laurent Désiré Kabila, elles le combattent en instrumentalisant les pays voisins pour faire la sale besogne au Congo. Quant au Président Tshisekedi, il a déjà déclaré aux États-Unis même qu’il se range du côté de l’Occident et d’Israël. En effet, le Rwanda et l’Ouganda, chiens de guerre des puissances occidentales dans la Région des Grands Lacs sont responsables d’un holocauste de plus de 15 millions de Congolais, qualifié par le Président Tshisekedi “d’effets collatéraux” lorsqu’il a signé le livre des condoléances au site du mémorial du génocide au Rwanda.
Les Américains perdent-ils leur pré-carré au profit de la Russie et de la Chine?
C’est justement cette conception des pays africains comme des pré-carrés issus de la colonisation occidentale en Afrique qu’il faut combattre, car l’héritage colonial subsiste encore. En effet, l’Afrique demeure encore divisée : arabophone, anglophone, francophone et lusophone avec des structures comme le Commonwealth et la francophonie fermement en place et avec leur approche militariste vis-à-vis l’Afrique pour ne pas ” perdre l’Afrique”. Cette anxiété dérive du fait que l’Occident est en perte de vitesse sur le plan économique, politique et culturelle. Les puissances émergentes proposent un ordre mondial plus humaniste autour des normes différentes de celles du capitalisme occidental traditionnel qu’elles remplacent avec l’approche développementale basée sur une coopération gagnant-gagnant susceptible de promouvoir le destin commun pour l’humanité. L’initiative chinoise dénommée « une ceinture et une route » par exemple vise à connecter le monde par des infrastructures susceptible de booster le développement de tous. Non à un monde des perdants et des gagnants, à tel point que si vous n’êtes pas autour de la table, vous devenez un repas comme à la Conférence de Berlin. Cette mentalité coloniale persiste encore en Occident. C’est ce que Dominique de Villepin qualifie “d’occidentalisme” ou idée que l’Occident qui a dominé le monde pendant cinq siècles, peut continuer à le faire tranquillement sans opposition. Oui à une coopération gagnant-gagnant.
Quel devra être la contrepartie de l’accord militaire Rdc-Russie?
La contrepartie de l’accord militaire russo-congolaise devrait être une armée congolaise forte et dissuasive, capable de protéger la souveraineté nationale du Congo et son intégrité territoriale basées sur des décisions politiques qui privilégient l’intérêt national suprême qui doit être au-dessus de tous. Si les animateurs des institutions RD Congolaises réduisent leur train de vie (y compris les détournements); à commencer par les députés nationaux qui doivent se faire violence et ne toucher que des frais de mission et des primes pendant les sessions qui ne doivent pas dépasser $1,500 par mois (l’équivalent du salaire d’un professeur d’université), il y aura beaucoup d’argent pour payer les Russes. Pourvu que l’argent ne se retrouve pas dans des comptes privés. Le gouvernement Congolais peut aussi majorer les parts de l’État Congolais dans chaque contrat minier signé avec nos partenaires (actuellement c’est 10%, fruit de la lutte de Joseph Kabila), effort de guerre et reconstruction nationale (oui un plan de reconstruction nationale qui s’étend sur toute l’étendue du territoire national dont on ne voit aucun signe) obligent.
Nous avons déjà la Sadc, maintenant la Russie, soit une région sur-militarisée. Ne craignez-vous pas un désordre? Dans tout ça, quel est l’apport des Fardc dont ont dit qu’elles sont en train de monter en puissance?
Oui, nous avons déjà la Sadc, maintenant la Russie, soit une région sur-militarisée. Nous ne craignons pas le désordre. Ce qui compte, ce sont les bons résultats. Il faut de bons résultats. Il faut tout simplement rentabiliser ces présences coalisées pour mettre fin à une guerre injuste que le peuple Congolais subit pendant plus de 25 ans maintenant. Pendant ce temps, nous devons nous atteler à consolider la puissance de notre propre armée nationale. Nos partenaires étrangers peuvent être déployés simultanément dans de différentes zones à risques comme l’Ituri et le Nord-Kivu pour neutraliser les agresseurs et rétablir la paix pour que les Congolais entassés dans des camps des déplacés regagnent leurs milieux naturels. Les FARDC ne peuvent réellement monter en puissance que dans le cadre d’une guerre populaire. Car sans l’appui du peuple (Wazalendo), elles ne peuvent pas gagner la guerre. Sans être bien équipées, bien rémunérées et sans que leurs soldes soient détournées par des généraux qui se construisent des châteaux à Kinshasa, les FARDC ne vont pas réellement monter en puissance. Sans que les FARDC ne soient pas vraiment “désinfiltrées”, elles ne vont pas réellement monter en puissance.
Le quotidien