Un «ministre» et dirigeant du Polisario déclare qu’un «État sahraoui indépendant» n’existera jamais

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Mustapha Ali Sidi El Bachir, dirigeant du Polisario, dont il est également l’un des «ministres» clés, reste toujours convaincu que la «RASD» n’existe pas, comme il l’a déjà déclaré en France, en décembre 2021. Cette fois-ci, il l’a ouvertement redit à Rabouni même, lors d’une rencontre célébrant le 51ème anniversaire de la création du Polisario, où il a demandé de tirer définitivement un trait sur le mirage d’un «État sahraoui indépendant». La réaction algérienne se fait toujours attendre.

Alors que le Polisario célébrait ces derniers jours le 51ème anniversaire de sa création, datée du 10 mai 1973, ses dirigeants et leur tutelle algérienne ont été pris à contre-pied par le franc-parler de Mustapha Ali Sidi El Bachir, soi-disant «ministre des Territoires occupés et de la Diaspora sahraouie». Intervenant lors d’une rencontre sous le thème «L’État sahraoui indépendant est la solution», Mustapha Ali Sidi El Bachir a déclaré, comme il l’avait fait plus de deux années plus tôt, qu’il n’existe ni État, ni «république» sahraouie, mais juste des camps à Lahmada, démunis de tout pouvoir et qui attendent, dans l’anarchie la plus totale, une chimère depuis 1976.

Bien que toujours ministre au sein du gouvernement du Polisario, ce notable tribal des Lebouihates, l’une des plus puissantes factions des Rguibat, est privé de passeport diplomatique algérien depuis fin 2021, suite à des déclarations similaires. Intouchable à la faveur de l’équilibre tribal très ténu qui maintient en vie la direction du Polisario, ce ministre-notable nie aujourd’hui l’existence de la «RASD» et fustige Brahim Ghali et son gouvernement, qui n’ont de président et de ministres que les noms, et qu’il accuse d’être des marionnettes vivant à Alger, où elles sont entretenues et manipulées par le régime algérien, tout en étant complètement déconnectées de la réalité amère des camps de Tindouf.

Le 20 décembre 2021, Mustapha Ali Sidi El Bachir, avait en effet fait des déclarations fracassantes devant une assistance de Sahraouis résidant en Europe, qu’il avait réunis à Mantes-la-Jolie, une commune des Yvelines située à une cinquantaine de kilomètres de Paris, la capitale française.

Interpellé à l’époque sur les nombreuses tracasseries dont font l’objet les Sahraouis d’Europe de la part des autorités algériennes (douanes, police des frontières…) qui leur rendent la vie difficile à chaque retour dans les camps de Tindouf, Mustapha Ali El Bachir n’y est pas allé par quatre chemins.

«Sachez que moi-même, je suis ministre de rien, que Brahim Ghali n’a aucun pouvoir et que la “RASD” n’existe pas», avait-il lâché. Une façon de dire que les dirigeants du Polisario n’ont aucun pouvoir de décision, et que c’est la junte algérienne qui décide tout.

«Depuis 46 ans, nous dépendons de l’Algérie et quémandons quotidiennement son aide pour avoir de l’eau, de la nourriture, du gaz, du gasoil… Nous ne pouvons rien faire à nous seuls», ajoute-t-il.

Ces déclarations, largement diffusées à l’époque dans une vidéo, et que Le360 avait relayées avant qu’elles ne deviennent introuvables depuis, a créé une vive panique au sein du régime algérien. Dès le lendemain de ces déclarations, Mustapha Ali Sidi El Bachir était retourné à Alger, où l’on croyait qu’au meilleur des cas il allait être embastillé ou, au pire, liquidé physiquement.

Finalement, vu son statut tribal, il lui a été d’abord intimé l’ordre de démentir immédiatement les propos qu’il a tenus un jour plus tôt en France, avant de se voir interdire de quitter l’Algérie et de se faire confisquer son passeport diplomatique algérien.

Dans une déclaration laconique à la télévision publique algérienne, il se limita à affirmer que «l’État sahraoui est une réalité, grâce au soutien jamais démenti de l’Algérie». Une phrase dont il est facile de déceler qu’elle lui a été soufflée, certainement sous la menace, par la machine à propagande de la junte algérienne.

De son côté, l’agence de presse algérienne (APS) a tenté de sauver les meubles en écrivant que «le ministre des Territoires occupés et de la Diaspora sahraouie à l’étranger, Mustafa Ali Sidi El Bachir a affirmé que le régime du Makhzen menait une guerre psychologique et une campagne de désinformation à l’encontre du peuple sahraoui». L’APS prétend ainsi que des «moyens de trucage électronique ont été utilisés par le Maroc» pour dénaturer les propos de Mustafa Ali Sidi El Bachir, consignés par le son et l’image dans une vidéo.

Mais, voilà que ce même dirigeant du Polisario revient à la charge pour confirmer ses propos exprimés en 2021, car ils reflètent en réalité ce que pense la majorité des sans-voix parmi les habitants des camps. Il est même allé encore plus loin, car s’il avait déclaré, deux années et demie plus tôt, que la «RASD» n’existe pas, il a pris à contre-pied la thématique choisie par le Polisario pour célébrer son 51ème anniversaire («L’État sahraoui indépendant est la solution»), pour conseiller aux rares Sahraouis qui croient encore à la propagande leur faisant miroiter un État-mirage, que ce dernier n’existe pas et n’existera jamais.

Une conviction profonde que lui ont sûrement enracinée davantage les derniers propos du président algérien Abdelmadjid Tebboune, qui a déclaré, le 8 mai courant au ministère de la Défense, devant tout ce que l’Algérie compte de généraux, qu’«il y a des Sahraouis qui ont 45 ans aujourd’hui. Ils sont nés dans les camps, ont vécu dans les camps. Ils ont perdu tout espoir».

Par Mohammed Ould Boah

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