La livraison de ce jour vient en appui à la dernière en date intitulée «Communicateurs ‘renseignants’ potentiels pour Chérubin Okende : faites gaffe !» publiée le 17 juillet 2023.
Il y est question, essentiellement pour les forces politiques et sociales se réclamant du régime en place, de s’aligner sur la position du Chef de l’État. A savoir, laisser la justice faire son travail. Concrètement, arrêter de spéculer autour d’un sujet hypersensible, susceptible d’amener des gens en procès, sinon de les pousser à la clandestinité, à défaut de les contraindre à l’exil.
Certes, la levée des boucliers observée du côté des Tshisekedistes s’explique : le Pouvoir est fragilisé. Ce qu’il faut d’emblée retenir, c’est que partout sur ce plancher des vaches, en démocratie ou non, le Pouvoir n’y échappe pas lorsqu’une personnalité publique – politique de surcroît – est assassinée.
Ainsi, avant que les enquêtes ne classent celui perpétré sur Chérubin Okende dans la catégorie du crime violent, financier ou passionnel, l’assassinat frappe d’abord un homme d’Etat. Normal que l’État se sente concerné le premier et, tout naturellement, se défende, sans nécessairement se faire aider par une base emportée plus par la passion que par la raison.
Pourquoi alors revenir à la dernière livraison ? Réponse simple : changé par les réseaux sociaux, le temps prend sa revanche sur les mêmes réseaux.
C’est, en effet, sous le régime actuel que le pays s’est doté de l’Ordonnance-Loi N°23/010 du 13 mars 2023 portant code du Numérique. Il n’y a de répréhensible puisque le monde a ajouté aux crimes existants le désormais crime informatique !
Comprenant 390 articles, ce texte contient des dispositions draconiennes en matière de répression. Cas de l’article 360 selon lequel «Quiconque initie ou relaie une fausse information contre une personne par le biais des réseaux sociaux, des systèmes informatiques, des réseaux de communication électronique ou toute autre forme de support électronique est puni d’une servitude pénale d’un à six mois et d’une amende de cinq cent mille à un million de francs congolais».
Ou de l’article 359 ainsi libellé «Quiconque aura harcelé, par le biais d’un réseau de communication électronique, une personne alors qu’il savait ou aurait dû savoir qu’il affecterait gravement par ce comportement la tranquillité de la personne visée, sera puni d’une servitude pénale d’une ou deux ans et d’une amende de cinq cent mille à dix millions de Francs Congolais ou l’une de ces deux peines seulement».
Ou encore de l’article 358 d’après lequel : «Quiconque initie une communication électronique qui contraint, intimide, harcèle ou provoque une détresse émotionnelle chez une personne, en utilisant un système informatique dans le but d’encourager un comportement haineux, tribal et hostile aux bonnes mœurs et aux valeurs patriotiques est puni d’une servitude pénale d’un mois à deux ans et d’une amende de cinq cent mille à dix millions de Francs Congolais».
L’assassinat de Chérubin Okende est comme le premier test grandeur nature auquel est confrontée la nouvelle loi !
Normalement, avec tous les débordements, tous les écarts de conduite qui se constatent dans les réseaux sociaux, une mise en garde s’impose de la part de ceux qui en ont la responsabilité publique : Gouvernement (Ministères de l’Intérieur, du Numérique, des Pntic et de la Communication et Médias), Cours et Tribunaux et Csac. But : prévenir les « internautes » des risques d’interpellation, de procès, voire d’arrestation qu’ils sont en train de susciter sans peut-être le savoir ou, pour ceux qui en sont conscients, les risques de se croire intouchables en raison de son positionnement politique.
Car, le silence qu’on peut afficher aujourd’hui peut se révéler un précédent fâcheux (d’aucuns diraient jurisprudence) alors que la Constitution déclare clairement à l’article 62 : «Nul n’est censé ignorer la loi».
Au demeurant, ce qui est valable aujourd’hui pour l’«affaire Chérubin Okende » l’est aussi pour les autres sujets brûlants de la vie nationale : sécurité, élections, pouvoir d’achat etc.
Aucune logique ne justifierait l’arrestation de telle personne pour avoir relayé dans les réseaux sociaux une infox sur cet assassinat et justifier l’interpellation de telle autre personne pour avoir relayé par le même procédé l’ ‘intox sur le processus électoral.
En rappelant l’existence de ces dispositifs légaux, la préoccupation n’est pas d’étouffer la libre expression ou d’opinion.
Il y a lieu de le noter : toutes les libertés reconnues dans toutes les Constitutions du monde portent l’incise «sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public et de bonnes mœurs».
C’est là que l’Etat fait valoir le Droit et fait sentir la Loi.
En définitive, on ne peut pas s’ériger bâtisseurs et défenseurs de l’État de Droit, mais aussi se prévaloir initiateurs des lois et oublier, à défaut de les appliquer, de prévenir, le moment venu, des risques encourus.
Le Pouvoir, le vrai, ne piège jamais ses sujets. Il ne garde surtout pas sa base dans l’ignorance des dangers qui la guette….
Omer Nsongo die Lema