Jules Alingete va-t-il se brûler les ailes ? Ce n’est pas impossible après son propre brûlot, à savoir le Rapport final de l’enquête sur la Sicomines commencée par une mission d’enquête d’une durée de 60 jours ordonnée le 24 juin 2022, mais arrivée à terme le 24 août de la même année. En effet, cette mission n’a approché la Direction générale de la joint-venture sino-congolaise qu’à partir du 29 août 2022, c’est-à-dire hors délai. Plus grave, à l’insu de la Direction générale de la Dgda et du ministre des Finances – pourtant autorité compétente pour délivrer, suspendre ou supprimer ce type de droit – elle a ordonné la suspension des droits d’exonération douanière. Ainsi, au départ déjà, l’IGF a fait exprès de se mettre en faute ; ce qui ne ressemble plutôt pas à Jules Alingete réputé prudent… Pour John Omombo, ancien chargé de communication du Bureau de coordination du programme sino-congolais, au niveau de la forme, il a l’impression que c’est un rapport politique.
Le patron de l’IGF aurait-il subi des pressions intérieures ou extérieures pour obtenir coûte que coûte la dissolution de la Sicomines, à défaut de la suspension des activités de cette entreprise qui n’a jamais été chinoise à 100 % comme l’opinion le croit, mais plutôt congolaise et chinoise ? On n’aimerait bien le savoir.
Toujours est-il que le vin tiré, il ne restait à l’IGF qu’à le boire.
Vraisemblablement, c’est ce qui s’est passé entre septembre 2022 et février 2023, période au cours de laquelleJules Alingete a donné du fil à retordre à la Sicomines. D’abord en lui signifiant qu’elle n’avait pas d’existence légale ; ensuite en lui imposant des exigences dont la première porte sur la renégociation du contrat sino-congolais.
Or, la thèse de la non-existence de Sicomines au regard de l’arsenal juridique congolais s’est retournée contre la République Démocratique du Congo. En effet, comment une entité légalement inexistante a eu pour associer la Gecamines, société légalement constituée ! Et comment, des années durant, la Gecamines a continué à percevoir d’une entreprise inexistante des dividendes ! Et comment, cette entreprise inexistante a-t-elle financé des infrastructures que le Gouvernement de la République met à son actif !
Réalisant le non-sens de cette exigence de nature à couvrir de ridicule le pays, l’IGF y a renoncé pour imposer la renégociation du contrat sino-congolais sur fond d’une quinzaine d’exigences relevant pourtant de la compétence du Gouvernement.
Nul n’est censé ignorer que le Groupement des Entreprises Chinoises (GEC) est en contre non pas avec un service ou un établissement public, mais le Gouverment congolais représenté par le ministère des Itpr.
La suite, c’est la réaction réellement musclée du porte-parole de l’ambassade de Chine en RDC et de la Direction générale de Sicomines le même jour : 17 février 2023.
Dans son commentaire, le porte-parole déclare que l’ambassade a « appris avec stupéfaction la publication du rapport sur le Contrat chinois par l’inspection Générale des Finances (IGF) de la République Démocratique du Congo ». L’ambassade, poursuit-il, a « le regret de constater que le rapport, dont le contenu est plein de préjugés, ne correspond pas à la réalité, ne peut pas être considéré comme crédible et n’a pas de valeur constructive ».
Affirmant que « Le Contrat chinois constitue un bel exemple du partenariat gagnant-gagnant » et que cela est « un fait indéniable », ce d’autant plus que « De nombreuses réalisations palpables prouvent que la partie congolaise a bénéficié effectivement de cette coopération », l’ambassade relève la position du gouvernement chinois en deux phrases :
– primo, la Chine « encourage les entreprises chinoises à travailler avec leur partenaire congolais pour améliorer la coopération en la faisant bénéficier davantage à la partie congolaise, et résoudre les désaccords à travers le dialogue amical et raisonnable ».
– secundo, la Chine dit qu’elle « va défendre fermement les droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises et riposter résolument à toute violation des droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises ».
Pourtant, on ne devrait jamais en arriver là puisque le contrat sino-congolais prévoit à son article 20 le mécanisme de règlement de tout différend : soit à l’amiable, soit, en cas de persistance du désaccord, à l’arbitrage du CIRDI (Centre international pour le règlement des différends relatif aux investissements).
Quant à la Sicomines, elle promet évaluer « la suite qu’il convient d’y donner afin de défendre ses droits » et rappelle que « La RDC est un État de droit où le droit de la défense est consacré et garanti par la Constitution ». Elle considère qu’« En particulier, la sécurité des investissements privés, nationaux ou étrangers, est garantie en RDC et les engagements pris à l’égard des investisseurs ne peuvent être bafoués ».
C’est quasiment, en duo, la réponse du berger à la bergère.
Controversé, le Rapport de l’IGF pourrait faire laisser à d’aucuns leurs plumes, à d’autres leur peau, ce qui revient au même.
Une fois de plus, les conseilleurs – qui sont rarement de bons payeurs – engagent la RDC dans un bras de fer dont on aurait dû s’épargner.
Un rapport de « politique »